La diplomatie nigérienne a un nouveau patron. Il s’agit de Mme Aicha Boulama Kane qui a succédé le mardi 25 février 2015 à Mohamed Bazoum nommé ministre d’Etat à la Présidence.
La nouvelle chef de la diplomatie nigérienne n’est pas une inconnue de la scène politique nigérienne même si son parcours, depuis l’avènement de la démocratie, a été pour l’essentiel consacré à la lutte pour la promotion de la condition féminine.
Aicha Kane Boulama est, en effet, un membre actif du PNDS Tarreya, parti au sein duquel elle a milité depuis sa création au lendemain de l’instauration du multipartisme au Niger. Comme son époux, Kane Souleymane, ancien directeur de campagne de Issoufou Mahamadou (2004) et actuellement ministre-conseiller du Président de la République, elle est membre du Bureau exécutif fédéral du PNDS Tarreya.
Selon sa biographie officielle, la nouvelle ministre des Affaires étrangères et de la coopération a été une pionnière dans la lutte pour la prise en compte de la question genre dans le nouvel ordre démocratique nigérien des années 90. C’est à ce titre qu’elle a été de celles qui avaient initié l’organisation et la tenue de la marche historique des femmes nigériennes qui protestaient contre la faible représentation des femmes à la Conférence Nationale. C’est en effet à partir de ce mouvement qu’a été instituée la journée nationale de la femme nigérienne, désormais célébrée tous les 13 mai de chaque année. C’est à cette époque que son parcours politique prend un tournant décisif puisqu’elle fut désignée déléguée à la Conférence nationale souveraine au titre du PNDS-Tarayya.
Selon la même source, Madame Kané Aïchatou Boulama, mariée et mère de trois enfants est née le 24 avril 1955 à Keita dans la Région de Tahoua. Après des études primaire et secondaire à Mainé-Soroa de 1961 à 1967, elle fréquenta le Lycée Mariama de Niamey où elle obtint son Baccalauréat série D en 1974. Elle paracheva ce parcours au Niger par des études supérieures à l’étranger notamment à l’Université de Rennes I en France, où elle obtient un diplôme d’économie générale en 1979, qu’elle compléta par un Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées (DESS) en transport et distribution à l’Université de Paris 1 Panthéon -Sorbonne toujours en France.
En 1993, la nouvelle ministre des Affaires étrangères et de la coopération fut nommée secrétaire d’Etat au Plan dans le gouvernement de transition. Par la suite, elle disparut un peu du radar politique en raison notamment de la traversée de désert que connut son parti le PNDS Tarreya à l’opposition. Kane Boulama Aichatou a profité de ce long intermède pour renouer avec son militantisme au sein des organisations féminines. C’est à ce titre qu’elle fut chargée pendant plusieurs éditions, sous le régime de Tandja Mamadou, de la coordination du Salon International de l'Artisanat pour la Femme (SAFEM).
L’avènement du PNDS au pouvoir en 2011 la propulsa au premier rang des personnalités du régime de la « Renaissance » puisqu’elle fut nommée Gouverneure de la Région de la capitale Niamey, une fonction qu’elle occupa durant deux années. Alors qu’elle était pressentie pour intégrer le gouvernement au ministère de l’Intérieur à l’occasion des premiers remaniements ministériels de la Renaissance, Kane Boulama Aichatou se retrouva à la tête du cabinet du Chef du gouvernement à la suite de la formation du dernier gouvernement de large ouverture d’Aout et septembre 2013. Aujourd’hui, elle passe comme chef de la diplomatie nigérienne, ce qui constitue une consécration pour cette militante de la section PNDS Tarreya de Niamey.
La nomination de Kane Boulama au ministère des Affaires étrangères traduit donc la confiance dont elle bénéficie auprès du Président Issoufou mais aussi une reconnaissance du combat militant qu’elle a mené durant les 20 ans d’opposition au sein du parti en tandem avec son époux qui jusqu’à récemment était responsable de la section de la Fédération PNDS de Niamey.
Il va lui falloir relever beaucoup de défis notamment dans le contexte régional et international actuel, marqué par l’amplification des risques sécuritaires. C’est à elle qu’incombe désormais de mettre en musique la politique étrangère du Niger conformément à l’orientation donnée par le Président de la République. Les dossiers chauds ne manquent pas avec le chaos libyen ainsi que la lutte contre Boko Haram. Le Niger, ce n’est un secret pour personne, prône la manière forte notamment une intervention internationale à laquelle la communauté internationale semble rechigner. Sur les dossiers de la diaspora, elle aura à gérer le dossier ouvert sous Mohamed Bazoum relativement au vote des nigériens à l’extérieur et à leur représentation, une première au Niger.
La riche expérience de Kané Boulama Aichatou ainsi que ses soutiens politiques lui seront certainement d’un grand atout dans sa nouvelle mission à un poste de souveraineté. Il est vrai qu’elle ne dispose pas, comme son prédécesseur, du statut de ministre d’Etat et qu’elle va devoir partager ses attributions avec une ministre déléguée Madame Sani Mariama Moussa.
En somme, plusieurs années après le départ de Aichatou Mindaoudou qui a fait ses preuves sous Tandja Mamadou, la diplomatie nigérienne se met encore une fois de plus au féminin. A quelques jours de la célébration de la journée internationale de la femme, la coïncidence mérite d’être amplement soulignée !