Au moins une cinquantaine de soldats nigériens ont été tués samedi sur le lac Tchad par des éléments de Boko Haram, dans l’une des attaques les plus meurtrières subie par la coalition régionale, a-t-on appris lundi de sources tchadienne et nigériennes.
Samedi, un élu local s’attendait déjà à un bilan "très lourd dans les rangs de l’armée nigérienne". Lundi, les bilans différaient selon les sources mais toutes évoquaient avec certitude plusieurs dizaines de morts.
L’armée nigérienne "a perdu 48 soldats et 36 sont portés disparus", a déclaré une source sécuritaire tchadienne, ajoutant que des militaires "ont fui et sont en train de regagner la localité de Bosso" voisine.
Un élu du sud-est du Niger, région frontalière avec le Nigeria où l’assaut s’est produit, a lui fait état à l’AFP de "80 soldats tués" et une trentaine de disparus, tandis qu’une source proche de l’armée nigérienne mentionnait 100 morts et 17 disparus.
"Il y a eu énormément de pertes" au sein d’une position militaire située à Karamga, une île "particulièrement isolée" du lac Tchad, dans laquelle 120 à 150 hommes étaient postés, a confirmé une source humanitaire à l’AFP.
"L’armée tente de faire un point de ceux qu’elle a perdus, pour savoir qui est mort et qui est porté disparu", a poursuivi cette source, selon laquelle 45 soldats basés sur l’île auraient pu être joints.
Aucun officiel ni cadre militaire nigérien n’a pu être contacté par l’AFP pour un commentaire.
L’assaut, si un tel niveau de pertes était confirmé par Niamey, serait l’un des plus meurtriers pour la coalition régionale composée du Tchad, du Niger, du Nigeria, du Cameroun et du Bénin et active depuis quatre mois contre Boko Haram.
Le 10 avril, le Tchad a fait état de 71 soldats tombés au total dans la lutte contre les islamistes. Ce bilan était début avril de 26 morts parmi les militaires nigériens, avait indiqué à l’AFP Seyni Garba, le chef d’état-major nigérien.
Karamga, attaquée samedi à l’aube par des islamistes de Boko Haram, a depuis lors été reprise par l’armée nigérienne, de même source.
Umar Yerima, un pêcheur nigérian qui vivait sur cette île, a fait état d’un bilan humain également "énorme" parmi les civils.
"Après en avoir terminé avec les soldats, ils ont retourné leurs armes contre les habitants", "visant les têtes" de ceux qui s’étaient jetés à l’eau pour leur échapper et "brûlant vivant beaucoup de résidents dans leurs maisons", a-t-il raconté.
Les assaillants sont demeurés sur l’île jusqu’à samedi à la mi-journée, quand un avion de combat a commencé à bombarder la zone, a affirmé M. Yerima, qui s’est décrit comme "l’un des rares chanceux" ayant survécu.
"L’aviation tchadienne, notamment les hélicoptères tchadiens stationnés à Diffa (la capitale du sud-est nigérien), est intervenue pour détruire les éléments de Boko Haram", tuant certains d’entre eux et détruisant leur équipement, a déclaré la source tchadienne, sans plus de précision.
Cette île avait déjà été attaquée le 20 février par le groupe islamiste. Sept soldats nigériens et 15 combattants islamistes, ainsi qu’un civil, avaient été tués, selon un bilan officiel.
Aucune attaque importante de Boko Haram n’avait été recensée depuis plus d’un mois au Niger, où le groupe armé nigérian avait multiplié les assauts en février.
"Les risques de survenance d’attentats sont même très réduits du fait de l’élimination de tous les acteurs potentiels", avait assuré mi-mars à l’AFP Mohamed Bazoum, un proche du président nigérien Mahamadou Issoufou.
"La situation est totalement sous contrôle" au Niger, "il n’y a plus de chance que Boko Haram prenne une ville, même sur le lac Tchad", une importante surface d’eau partagée entre Tchad, Cameroun, Nigeria et Niger, avait-il assuré.