Les corps de centaines de personnes ont été découverts jeudi dans la ville de Damasak, au nord-est du Nigeria, apparemment victimes des exactions du groupe islamiste Boko Haram. «Des corps ont été trouvé dans les maisons, les rues, et encore davantage dans la rivière Damasak dont le lit est à sec», a témoigné un habitant, Kaumi Kusur.
es victimes ont été enterrées dans une vingtaine de fosses communes pendant le week-end, a-t-il précisé. Selon un autre habitant, Mohammed Sadiq, qui a aidé à enterrer ces corps samedi, le bilan pourrait s’élever à plus de 400 morts. De son côté, le gouvernement de l’Etat de Borno a parlé de «centaines» de cadavres.
En mars dernier, à l’issue d’une offensive lancée en novembre, des soldats venus du Tchad et du Niger avaient repris Damasak à Boko Haram. Quelque200 rebelles avaient alors été tués, de même que 10 soldats, selon une source sécuritaire tchadienne. L’armée tchadienne disait avoir ensuite découvert une centaine de corps dans une fosse commune sous un pont à l’extérieur de Damasak, dont certains avaient été décapités. Un massacre qui pourrait avoir eu lieu en janvier dernier, selon les Tchadiens. Mais selon Kaumi Kusur, le nombre de corps découverts jeudi «dépassait nettement» celui de mars.
Attaque meurtrière au Niger
Après avoir subi plusieurs défaites militaires, le groupe islamiste a mené une attaque meurtrière samedi au Niger sur un camp militaire du lac Tchad. L’armée nigérienne «a perdu 48 soldats et 36 sont portés disparus», selon une source sécuritaire tchadienne. Un élu du sud-est du Niger, région frontalière du Nigeria où l’assaut s’est produit, a quant à lui fait état de «80 soldats tués» et d’une trentaine de disparus, tandis qu’une source proche de l’armée nigérienne mentionnait 100 morts et 17 disparus.
«Il y a eu énormément de pertes» au sein de cette position militaire située à Karamga, une île «particulièrement isolée» du lac Tchad, où 120 à 150 hommes étaient postés, a confirmé une source humanitaire, selon laquelle 45 soldats basés sur l’île auraient pu être joints. Umar Yerima, un pêcheur nigérian qui vivait sur cette île, a fait également état d’un bilan humain «énorme» parmi les civils à Karamga. «Après en avoir terminé avec les soldats, ils ont retourné leurs armes contre les habitants», a-t-il raconté, «visant les têtes» de ceux qui s’étaient jetés à l’eau pour leur échapper et «brûlant vivant beaucoup de résidents dans leurs maisons».
Les assaillants sont demeurés sur l’île jusqu’à samedi à la mi-journée, quand un avion de combat a commencé à bombarder la zone, a affirmé Umar Yerima, qui s’est décrit comme «l’un des rares chanceux» ayant survécu. «L’aviation tchadienne (...) est intervenue pour détruire les éléments de Boko Haram», tuant certains d’entre eux et détruisant leur équipement, a complété la source tchadienne. Aucune attaque importante n’avait été recensée depuis plus d’un mois au Niger. Depuis, Karamga a été reprise par l’armée nigérienne.
Des déplacés abattus au Nigéria
Vendredi, en parallèle, des combattants présumés de Boko Haram, déguisés en soldats, ont abattu 21 déplacés qui tentaient de regagner leur village dans le nord-est du Nigeria pour y chercher à se nourrir. «Les hommes, ils étaient 21, ont été arrêtés dans (le village de) Bultaram par des hommes armés dont on pense qu’ils font partie de Boko Haram, qui les ont abattus par balle», a déclaré Baba Nuhu, un responsable de la localité de Gujba, dans l’Etat de Yobe, un récit qui concorde avec celui D’Haruna Maram, le frère d’une des victimes.
L’Etat de Yobe a été le théâtre de très nombreuses attaques de Boko Haram ces six dernières années. Au total, l’insurrection islamiste et sa répression par l’armée nigériane ont fait plus de 15.000 morts depuis 2009, selon l’ONU. Plus d’1,5 million de personnes ont aussi été obligées de fuir leur domicile.
Lundi, le président élu du Nigeria, Muhammadu Buhari, qui doit être investi le 29 mai, a promis de traiter Boko Haram comme «des terroristes» parce qu’ils ne sont «qu’un faux groupe religieux».