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Gouvernement: L’affaire SML/SOPAMIN tourne au pugilat politique
Publié le mardi 16 juin 2015   |  actuniger


Omar
© Autre presse par DR
Omar Hamidou Tchana,ministre d’Etat,ministre des Mines.


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L’entrée en scène du ministre d’Etat en charge des Mines et du développement industriel Omar Hamidou Ladan Tchiana dans une sorte de « droit de réponse » à l’article qui a révélé l’affaire, a révélé au grand jour la guerre tranchée qui couve depuis quelques temps entre deux puissants ministres de l’actuel gouvernement. La succession des évènements et la sortie médiatique des acteurs concernés, laissent présager que les ingrédients son en train d’être réunis pour que cette affaire qui sent « les gros sous », finisse par provoquer une nouvelle crise au sein du gouvernement et partant de la majorité.

Dans son droit de réponse, Ladan Tchiana s’est en effet expressément pris à un autre poids lourd de l’exécutif, son collègue Amadou Boubacar Cissé qui est le ministre d’Etat au Plan et à l’aménagement du territoire.

Contrairement au directeur général de la SOPAMIN et PCA de la SML Mahamadou Zada, les propos utilisés par le cabinet du ministre Tchiana sont des plus durs et visent clairement le ministre Cissé. Ladan Tchiana n’a pas fait dans la dentelle en faisant endosser la responsabilité de cette affaire SML/SOPAMIN qui défraie la chronique au ministre du plan, qu’il accuse de « népotisme » en plus de l’indexer d’avoir mener des manœuvres visant, ni plus et ni moins, à maintenir son fils à la tête de la SML ! C’est le ministre Tchiana qui le dit, ce qui rappelle encore une autre affaire familiale dans laquelle il a été récemment impliquée et qui à l’époque déjà, avait faillit remettre en cause la cohésion gouvernementale.

Tout est parti de la demande d’audit demandée par le nouveau directeur de la SML Abdoul Kader Cissé, qui n’est autre que le fils de son père, afin de voir clair dans les comptes de la société qui traverse une grave crise financière en dépit de son rachat par la SOPAMIN. A l’évidence, il n y a rien de plus anormal surtout en matière de transparence financière publique sauf si les intérêts politiques sur fonds de supposition de mauvaise gestion, sont en jeu.

On ne sait pour quelles raisons, le directeur général de la SOPAMIN Mahamadou Zada ainsi que le ministre Omar Hamidou Tchiana, qui assure la tutelle des deux sociétés, se sont opposés à cette opération qui devrait être financée par un projet de la Banque mondiale supervisée par le ministère du Plan.

En tout cas, en dépit des explications données par ces deux responsables, l’opinion des nigériens est largement favorable au nouveau directeur de la SML et des voix s’élèvent de plus en plus pour exiger non seulement l’audit de la SML mais aussi de la SOPAMIN, deux entreprises publiques qui brassent beaucoup d’argent.

C’est certainement là que se situe le nœud de cette équation à multiples inconnues qu’est devenue cette affaire avec des échanges administrativement pas du tout responsables entre les différents protagonistes. Au passage, les médias d’Etat sont appelés en renfort, ce qui ne fait que concourir à alimenter la polémique sur fonds d’enjeux politiques et entre partisans d’un même bord puisque les principaux acteurs sont membres de la majorité.

Avec la dernière réponse de Tchiana qui fait suite à une « mise au point » de Mahamadou Zada, le coté politique de l’affaire a vite fait de prendre le dessus sur la vraie problématique de l’affaire, celle de la situation financière exacte de la SML et de la gestion peu orthodoxe de la société ces dernières années. A ce niveau, et c’est ça qui est intéressant pour l’opinion nigérienne, s’il y a une chose qui se confirme d’elle-même dans cette affaire, c’est qu’il y a beaucoup de « flous » et de « non-dits » dans la gestion tant de la SML que de la SOPAMIN et qu’il faudra en situer les responsabilités.

Les audits menés ou qui le seront ainsi que l’inspection d’Etat commanditée par la Présidence permettront assurément de voir plus clair, même si et comme c’est assez souvent le cas au Niger, l’affaire pourrait être étouffée par les compromissions politiques en vogue chez nous depuis des lustres. Cependant, cette fois l’affaire risque de laisser beaucoup de dégâts, au sein du gouvernement et au-delà, risque de fissurer la majorité MRN.

Les désormais trois protagonistes de l’affaire ne sont pas n’importe qui et chacun des deux clans disposent de son propre réseau et de ses soutiens au sein de l’exécutif.

Amadou Boubacar Cissé, ancien premier ministre et président de l’UDR Tabbatt, est le chef d’orchestre de la mise en œuvre du PDES (Plan de développement économique et social), l’un des programmes phares de la Renaissance. A ce titre, il est au cœur de la mobilisation des financements internationaux, ce qui le place « au cœur du système », c'est-à-dire l’un des plus grands connaisseurs de certains dossiers où les nigériens restent encore assez circonspects à la suite des inquiétudes soulevées par la tendance à un endettement accéléré du pays. De même, les nigériens restent assez circonspects sur certains prêts contractés par le Niger à travers des montages financiers tellement complexes qu’ils légitiment ces doutes. Si Amadou Boubacar Cissé et son parti qui dispose il est vrai de quelques députés au Parlement ne constitue véritablement pas une force politique de taille, son positionnement au cœur du Guri système, est un atout stratégique en ces temps de guerre de tranchées.

En face, Zada Mahamadou, militant dissident du MNSD Nassara de la section de Dosso et l’un des bras droits de Albadé Abouba, tout puissant ministre d’Etat à la Présidence, mène le front avec Omar Hamidou Ladan Tchiana, également dissident du Loumana, lequel a sacrifié ses ambitions politiques pour porter secours à la Renaissance lors de la grave crise qui a secoué le régime avec le départ de son principal allié. En plus de leurs poids politiques plus important que celui de Cissé, ils sont en droit de compter sur leur allégeance au régime pour attendre de ce dernier une certaine gratitude, ce qui en l’espèce pourrait également leur servir d’avantage concurrentielle dans cet épisode.

Le décor est ainsi planté mais l’issue reste incertaine car comme dans le cas de la dernière affaire Tchiana/Djackou, quelqu’en soit l’issue de cette affaire, elle laissera des séquelles pour le régime. Il est clair qu’en voulant laver le linge sale en public, les principaux protagonistes de cette affaire ont pris le risque de mettre à rude épreuve la cohésion gouvernementale.

La crise qui émerge donc et qui n’est pas que des bruits de couloirs au vue des positions affichées publiquement de part et d’autres, interpelle au premier plan le chef du gouvernement qui va devoir accorder les violons de ses deux ministres d’Etat. A l’évidence, c’est une véritable bombe à retardement que le régime doit encore désamorcer au plus vite afin de mettre de l’ordre dans la famille de la Renaissance. L’expression consacrée par un confrère, « la patate chaude » sied à merveille à la situation dans laquelle se trouve, on l’imagine, le Président de la République à qui il incombera de trancher encore par une de ses prouesses politiques dont il a presque seul le secret même si jusque-là, la stratégie consiste à des « légers remaniements ministériels » déguisés à chaque fois qu’une crise émerge ou que des ministres se trouvent en mauvaise posture. Il va sans dire qu’avec cette affaire qui s’est accompagnée de grands déballages de scandales financiers et d’attaques savamment téléguidés, la solution nécessitera plus qu’une simple retouche politique mais un traitement de fonds pour assainir la gestion financière de ces entreprises stratégiques de l’Etat.

A moins que les deux ministres d’Etat reviennent à de meilleurs sentiments pour enfin laver leur linge sale en famille au grand détriment de l’intérêt national puisque désormais les nigériens ont été assez édifiés sur cette affaire qui tient l’opinion en haleine.

L’enjeu est donc de taille pour le régime puisqu’il s’agira de veiller à ce que ce dossier ne soit pas encore un de plus sur la longue liste des scandales financiers de ces dernières années. Ce qui pourrait prêter le flanc à l’opposition sans cesse à l’affut du moindre soupçon de gabegie financière pour décrédibiliser le régime. C’est certes la politique mais en l’espèce et dans ce cas de figure, le scandale dépasse largement le cadre d’une quelconque considération partisane surtout que ce sont des responsables publiques partisans du pouvoir qui sont à la base de cette affaire.

En tout cas l’affaire SML/SOPAMIN n’est pas sans rappeler une autre qui ne s’est pas encore entièrement consumée dans l’esprit des nigériens et qui impliquait déjà Ladan Tchiana et son ancienne ministre déléguée. On se rappelle comment le Président Issoufou a pu gérer la crise qui s’est amplifiée sur fonds de rivalités familiales et de chantage politique d’un ministre conseiller à la Présidence.

Cette fois et comme nous le mentionnons un peu plus haut, les détails de l’affaire ont été largement exposés à l’opinion publique par ses principaux acteurs et le Président dispose d’un référentiel qui pourrait lui faciliter la tâche, c'est-à-dire l’inspection d’Etat sur la gestion de la SML et sur laquelle, il faudrait le reconnaitre, chacun des deux clans essaient de tirer profit. Le cas de la CAIMA où l’inspection d’Etat a déjà commencé à produire ces effets avec des interpellations en séries est de nature à fonder l’espoir qu’enfin le Président a décidé de taper sur la table et de mettre de l’ordre avant la fin de son mandat.

Ce qui est sûr et certain, c’est que cette affaire est loin de « sentir bon » comme on le dit chez nous, en plus de donner raison à ceux qui critiquent le régime pour une gestion peu orthodoxe des affaires de l’Etat surtout en matière de gestion financière et de transparence budgétaire. C’est ce qui du reste a confirmé aussi le ministre conseiller Sanoussi Djackou dans l’affaire que nous évoquions un peu plus haut.

Comme disent les ivoiriens, tout ce qui ne sent pas bon finira par se savoir ! Alors attendons de voir l’issue de cet énième épisode des affaires rocambolesques du gouvernement Birgi Raffini.

Y. Barma

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