Des couleurs, des lumières, un spectacle féerique, et surtout une forte dominance de solennité. C'était hier matin dans la vaste salle de Conférence du Complexe Indira Gandhi Stadium de New Delhi, à l'occasion de la cérémonie consacrée à l'ouverture du troisième Forum du Sommet Inde-Afrique. Quaranteun (41) Chefs d'Etat et de gouvernement des pays d'Afrique, des délégations composites venues des quatre coins de l'Afrique, formées de ministres, de diplomates, de cadres administratifs, d'hommes d'affaires, de journalistes et de jeunes artistes africains, se sont joints, ce jeudi matin, aux sommités de la classe dirigeantes indiennes fortement mobilisées autour du Premier ministre Narendra Modi, pour rehausser le niveau de cette rencontre entre le pays de Mahatma Gandhi et le continent africain.
Pour sceller cette fraternité entre leur pays et le continent, les organisateurs de la cérémonie n'ont pas fait économie de leur engagement et de leur génie. Il fallait d'abord remonter le temps, en levant un coin du voile de l'histoire des traversées de l'Atlantique pour déboucher à la rencontre entre les grands voyageurs indiens et les peuples d'Afrique. Pour ce faire, un spectacle géant, digne de la renommée artistique indienne, a été savamment exécuté par des jeunes talents du pays hôte et ceux venus de pays africains. La scène, vous le deveniez bien, était tout aussi enivrante en sons qu'auréolée de lumières et de couleurs. A certains moments de ce spectacle impressionnant, l'on eût cru que le temps s'était arrêté, pour permettre au public de revivre dans leur mémoire certaines épilogues décisives de ces rencontres des peuples.
Après le spectacle, les discours. Tour à tour, la ministre des Affaires Etrangères, Mme Shusma Swaraj, le Premier ministre, Narendra Modi, tous deux du pays d'accueil ; le Président de l'Union Africaine, M. Robert Mugabe, la Présidente de la Commission de l'Union Africaine Mme Dlamini-Zuma, se sont relayés à la tribune pour souligner l'importance, voire la nécessité de ce partenariat naissant entre l'Inde et l'Afrique. S'en est suivie une longue série d'interventions des Chefs d'Etat. Au total, 38 chefs d'Etat, parmi lesquels le Président Issoufou Mahamadou, ont pris la parole pour rappeler les actions déjà réalisées dans le cadre du partenariat Inde-Afrique, et les orientations qu'il convient de donner à ce partenariat pour le rendre plus fructueux et durable.
Dans son allocution d'ouverture, le Premier ministre indien, M. Narendra Modi, a exprimé toute l'émotion qu'il ressent devant la richesse de ces couleurs qui dominent cette cérémonie, en faisant allusion à la multiplicité et à la brillance des couleurs des drapeaux des 54 pays africains et de celui de l'Inde, qui flottent harmonieusement ensemble ; des couleurs qui, a-t-il ajouté, font du somptueux local du Indira Gandhi Stadium, «la plus merveilleuse place du monde», en cette journée du jeudi 29 octobre 2015.
Aussi, s'adressant aux 41 Chefs d'Etat et de gouvernement, aux autres éminentes personnalités, aux milliers d'autres officiels composant les délégations, aux hommes d'affaires et aux centaines de journalistes venus d'Afrique, M. Narendra Modi leur a témoigné sa très profonde gratitude pour cette présence si massive, qui, selon lui, honore les autorités et le peuple indien. « A nos visiteurs venus de la terre qui a vu commencer l'histoire de l'humanité, cette même terre où l'humanité a grandi pour donner lieu de nouveaux espoirs ; des déserts du Nord, où la gloire de la civilisation humaine brille à travers les signes du temps ; du sud où la conscience de nos âges a été forgée, de Mahatma Gandhi, Albert Luthuli, à Nelson Mandela ; des portes de l'Atlantique théâtre de l'histoire des traversées tragiques pour conduire de nos jours aux frontières d'innombrables succès ; de nos voisins de la côte Est ; du cœur de l'Afrique où la nature est généreuse et les cultures très riches, ainsi que des pays insulaires, recevez la chaleureuse bienvenue et la fraternité de l'Inde toute entière», a lancé le Premier ministre indien sur un ton plutôt poétique.
Selon ses propres mots, cette journée n'est pas seulement celle d'une rencontre entre l'Inde et l'Afrique, mais plutôt celle de la consécration d'un rêve pour un tiers de l'humanité qui aspire à vivre ensemble. «Aujourd'hui les cœurs de 1.25 milliard d'Indiens et de 1.25 milliard d'Africains battent au même rythme», a lancé le premier ministre indien. M. Narendra Modi a rappelé que les peuples africains et celui de l'Inde sont unis par des liens historiques et géographiques, notamment avec le lien que constitue l'Océan indien, dont les côtes ont vu le développement du commerce, mais aussi l'imbrication des cultures tout au long des siècles.
En effet, a-t-il poursuivi, des générations d'Indiens et d'Africains ont voyagé de part et d'autre des terres à la recherche de leur destin ou par la force des circonstances. Ainsi, ont-elles tissé et renforcé des liens séculaires de fraternité entre elles. « Nous avons vécu sous le règne du colonialisme, et nous avons combattu pour notre liberté et notre dignité.
Nous avons lutté pour la justice, qui nous enseigne la sagesse africaine, est la première condition de l'humanité. Nous avons parlé de la même voie dans le concert du monde, et nous avons créé par nous-mêmes, un partenariat pour notre propre prospérité », a-t-il souligné.
Le Premier ministre indien a ensuite développé le thème sur la nécessité de sauvegarder la paix et la sécurité dans le monde en fondant un espoir sur la jeunesse qui, a-t-il dit, doit œuvrer en faveur de la paix, de l'unité des peuples indo-africains, tout en jouant pleinement son rôle de moteur du développement. En effet, a-t-il acclamé plus loin, l'Afrique, comme le reste du monde développé, a ses propres défis à relever. « Et, à l'image des autres nations du monde, elle a ses propres préoccupations en matière de sécurité et de stabilité, notamment ceux du terrorisme et du radicalisme religieux».
Une question qui, a promis, M. Narendra Modi, sera prise en compte dans le cadre de la poursuite du partenariat avec l'Afrique.
Pour sa part, le Président en exercice de la Conférence des Chefs d'Etat de l'Union Africaine, M. Robert Mugabe a axé son discours sur les injustices faites à l'Afrique et à l'Inde depuis l'ère coloniale, tout en exigeant l'instauration d'un nouvel ordre mondial, aussi bien sur le plan politique et économique, que sur celui du droit international. Il s'agit, a dit M. Mugabe, de restaurer le principe de l'égalité des peuples et des Nations dans toutes les grandes décisions prises au sein des instances de l'ONU.