C'est aujourd'hui que s'ouvre, dans la capitale des Zarmakoye, la 37ème édition du Sabre National de lutte traditionnelle. C'est la sixième fois que la ville de Dosso accueille cet événement, après 1977 qui a consacré le sacre de Kantou de Maradi en finale devant Kadadé de Tahoua ; 1984 qui a vu la victoire de Issoufou Aboubacar devant Kassou Kazouga, tous deux de Tahoua ; 1990 où Mahamadou Idi de Tahoua a arraché le sabre face à Badamassi Alassane de Zinder ; 1999 quand Balla Harouna emporta la victoire face à Badamassi Alassane de Zinder ; et en 2008, année où Harouna Abdou de Tahoua s'imposa face à Oumarou Ali Bindigaou de Maradi.
En rappel, il y a une année de cela, les 80 lutteurs sélectionnés des 8 régions du pays s'étaient donné rendez-vous à Agadez. A l'issue des différentes confrontations, c'est Issaka Issaka de Dosso qui avait remporté le sabre devant Sabo Abdoulaye de Niamey. Chaque année, l'enthousiasme et l'engouement que suscite cet événement ne font que croître, preuve que ce sport - frappé du label de ''Sport Roi'' au Niger - compte des millions d'admirateurs. Mais, il aura fallu beaucoup de temps pour que ce sport, qui tire toute sa popularité des valeurs de fraternité et de solidarité qu'il incarne, soit hissé sur la scène nationale et même internationale. Car, il faut bien le noter, au Niger, la lutte traditionnelle fait partie des valeurs ancestrales les plus profondes. En effet, la plupart des communautés de l'espace nigérien de l'époque pré-coloniale connaissent la pratique ludique de la lutte avec des variantes en fonction des régions.
Les rencontres, qui opposaient les jeunes des quartiers et des villages, se déroulaient sur la place publique ou devant la cour du chef, sous la supervision des responsables de la jeunesse (Maï samari), des commerçants jouant le rôle de managers pour les lutteurs. Le calendrier des rencontres est établi suivant les cycles de moissons ou de transhumance. A l'issue des combats, un ''roi'' ou le champion de la région est désigné. Quand la renommée d'un lutteur dépasse les limites de sa contrée, des tournées sont entreprises pour lui rendre visite, le vaincre ou se faire battre dans une atmosphère de joie et de gaieté. Selon le directeur technique national de la Fédération Nigérienne des Luttes, M. Malam Barka Akoda, auteur d'une étude sur la question, les pouvoirs nationaux issus de l'indépendance dans les années 1960 se sont très peu intéressés au développement des pratiques sportives traditionnelles, les reléguant, comme leurs prédécesseurs, aux oubliettes. Il aura fallu la dernière édition de la semaine de la jeunesse, en 1973, pour que la lutte fasse partie du programme de cette grande manifestation nationale. Il faut dire que la lutte a connu son envol au Niger à partir de 1975, lorsque le gouvernement de l'époque, sous la férule du Conseil Militaire Suprême (CMS), a inséré dans son programme l'organisation successive, dans chaque chef-lieu de département, d'un championnat de lutte traditionnelle. L'objectif recherché par les gouvernants de l'époque était d'abord le renforcement de l'identité et de l'unité nationales et ensuite la cohésion sociale et la mise en place d'infrastructures destinées à la lutte. Pour atteindre ces objectifs, les autorités ont entamé une réforme et la mise en place des instances pouvant prendre, de concert avec le ministère, l'organisation de ces championnats. C'est ainsi qu'une association des lutteurs vit le jour par ordonnance présidentielle N° 7511/PCMS du 13 mars 1975. Cet acte confirme la vision du régime qui veut que la lutte traditionnelle soit un facteur d'unité nationale et de l'affirmation de l'identité culturelle des Nigériens. Elle est devenue une grande manifestation culturelle et sportive qui mobilise tout le pays : les pouvoirs publics, les lutteurs, les différents animateurs, les techniciens, les spectateurs, les auditeurs, les téléspectateurs, les sponsors. Chacune de ces composantes joue un rôle précis et complémentaire.