A en croire des sources proches du parti au pouvoir, la majorité MRN, Mouvance pour la renaissance du Niger hésite à déposer une motion de défiance contre le président de l’Assemblée nationale.
Quand on sait que le régime en place à travers ses canaux de divulgation de rumeurs a, depuis quelques temps, laissé planer l’imminence de la destitution de Hama Amadou, on peut penser que c’est un adoucissement de sa position que de renoncer à cette entreprise. On a vu la démonstration de force au siège du SNAD où la MRN a affirmé avoir à ses ordres 68 députés. Une façon de dire qu’il ne s’en faut plus que de 7 pour atteindre le nombre nécessaire afin détrôner le président de l’Assemblée. Face à ces menaces, le MODEN FA est resté imperturbable sur sa position première. Alors, cela a-t-il irrité le pouvoir au point de reculer dans son jusqu’auboutisme ? A priori on peut répondre par l’affirmative à cette question. Oui, le PNDS-Tarayya s’est finalement rendu compte qu’il ne pourra pas débarquer le président du MODEN FA de son piédestal du parlement. Cela, pour plusieurs raisons.
D’abord le parti de Hama Amadou pourra désormais bénéficier du soutien officiel du MNSD-Nassara avec ses 30 députés qui, du reste, ont voté pour que Hama soit président du parlement. Donc, en plus des ressentiments que le parti de Seïni Oumarou nourri contre le PNDS-Tarayya, c’est aussi une question d’orgueil pour le MNSD de maintenir celui dont il a voulu et oeuvrer à l’élection. Ainsi, malgré les « ponctions » opérées dans les rangs de ses députés par les spécialistes du Guri en la matière, le mot d’ordre du MNSD sera en faveur de Hama Amadou. Deuxième raison, les députés élus sous la bannière du MODEN FA Lumana ont fait preuve d’une fidélité à toute épreuve, du moins jusque- là. Aussi, rien ne dit au PNDS-Tarayya que certains de ses alliés les plus fidèles (ANDPZaman Lafia, RDP-Jama’a et UDR-Tabbat), ni même ses propres députés le suivront dans sa logique de faire de Amadou Salifou le remplaçant de Hama Amadou au sommet du parlement.
De ce point de vue, on peut soutenir que le parti rose n’a de choix que se rétracter en mettant de l’eau dans son vin et abandonner l’idée d’une motion de défiance. Dans ce cas, le mieux serait d’engager des négociations en vue d’une réconciliation avec l’ancien allié MODEN FA du moment que le parti au pouvoir revient à de meilleurs sentiments. Mais pas tant que ça. N’oublions pas que dans le même temps, 16 conseillers municipaux de la MRN dont 13 du PNDS, 2 de l’ANDP et 1 du RSD ont déposé une motion de défiance contre le maire président du conseil de ville de Niamey, Oumarou Dogari, du MODEN FA. Selon le quotidien L’Enquêteur, une somme de 2 millions est distribuée aux conseillers Lumana pour que ceux-ci votent la motion contre leur militant. De ce fait, on ne peut dire que le parti socialiste fume le calumet de la paix avec son ancien allié libéral. En faisant déposer cette défiance contre l’un des lieutenants de Hama Amadou, le PNDS voudrait probablement tester sa capacité de nuisance.
En mettant les « gros moyens » pour arriver à cette fin, c’est comme si le régime essai de voir dans des conditions réelles si Lumana est perméable aux « gros moyens » ou pas. Dans le cas de résultats concluants, en d’autres termes si le parti rose arrive à bout du maire Dogari, il peut espérer s’attaquer au président de l’Assemblée nationale qui doit à son tour connaître le même sort. Autrement dit, si l’option de débarquer Hama Amadou est reléguée au second plan, ce n’est nullement le signe d’un quelconque fléchissement du pouvoir. Ce sera plutôt une sorte de reculer pour bien sauter. Le président Hama peut-il ignoré cela ? La réponse est : Non ! Donc même si l’introduction d’une motion de défiance contre lui venait à être abandonnée par le parti au pouvoir, il n’en demeure pas moins qu’une recomposition politique fasse jour à l’Assemblée nationale. Quand tu rates l’adversaire, il ne te ratera pas, dit le dicton. Alors, puisque Lumana sait que son président ne sera pas destitué non pas parce que le PNDS n’en meurt pas d’envie, pour lui faire plus de mal ? Evidemment non ! L’intention vaut l’action, dit-on souvent.
Dans le cas d’espèce, compte tenu de la colère du MNSD-Nassara contre le régime et la menace de déstabilisation que celui-ci fait peser sur toutes les formations politiques de taille du pays, l’occasion est trop belle pour que l’ARN et Lumana la laisse passer. Selon toutes vraisemblances, le schéma qui se dessine tend vers une coalition ARN – Lumana et peut-être d’autres formations de la majorité dès la session parlementaire d’Octobre. Dans lequel cas, cette nouvelle coalition ne fera du gouvernement de Brigi Rafini qu’une seule bouchée. Elle mettra alors en place son gouvernement de cohabitation qui va diriger le pays jusqu’aux élections de 2016, la désormais raison d’exister du PNDS. Pour se tirer d’affaire, le parti au pouvoir va probablement appeler le président de la république à sa rescousse. Lui, à qui la constitution a donné le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale quand il le juge nécessaire. Là aussi, remporter des législatives anticipées est une autre paire de manches. En attendant, difficile de dire que le parti socialiste a l’intention d’arrêter sa croisade contre les principales formations politiques du Niger.
Au contraire, les manoeuvres vont s’intensifier et maintenant que tout le monde est au courant, personne ne croisera les bras pour se livrer mains et poings liés au PNDS sur l’autel de la stabilité politique. Donc de part et d’autre, il n’y a pas de cadeau à se faire, chacun utilisera les moyens à sa disposition. La seule différence est que la nouvelle coalition travaille à se défendre dans la discrétion tandis que le pouvoir lui, attaque avec fracas et fanfare.