Deux motos complé-tement abimées couchées sur l'asphalte, en bordure du goudron deux jeunes gens, de toute évidence les conducteurs de ces motos, eux aussi étalés sur le sol en se tordant de douleur.
A quelques mètres plus loin se trouve stationnée une voiture, une grosse cylindrée, à l'aile gauche vilainement défoncée, et tout autour des badauds qui semblent avoir trouvé de très bon matin de quoi se ''rincer'' les yeux. C'était lundi dernier, peu après 8 heures, sur le côté ouest du Rond-point Château 8 de Niamey.
Le décor ainsi planté permet très aisément de deviner ce qui a pu se passer en ces lieux. On n'a pas besoin d'un constat d'expert pour savoir que le conducteur de l'auto a royalement brulé la priorité aux motocyclistes au mépris de leur vie. Et dire que l'homme n'a rien de ces adolescents au sang chaud réputés dans la manie de traverser à vive allure et au hasard, même les plus grands carrefours de
Niamey.
Le même jour, en début de soirée, à quelques encablures du lieu où s'est produit cet accident, une autre scène similaire s'offrait aux yeux des passants médusés : une autre voiture (un taxi) à l'arrêt en bordure de la voix principale allant vers le Château 8, entre ses roues avant une moto salement écrabouillée. Le conducteur de la moto, qui a sans doute été évacué d'urgence, n'était pas sur les lieux. Et, on se rappelle qu'en fin décembre 2015, c'est une autre voiture qui était couchée sur le flanc, en cette même place, après avoir fait un tonneau. Une voiture s'abimer en effectuant un tonneau en plein centre-ville... Voilà une scène qu'on ne pourrait voir qu'à Niamey !
Ces scènes que nous venons de décrire ne sont que des exemples pour montrer à quel point les accidents de la circulation sont de plus en plus courants à Niamey. Chaque jour, en parcourant les rues de la capitale, la conscience collective des se heurte à chaque coin de rue, à des scènes d'accidents, les unes plus tragiques que les autres.
Le pire dans tout cela, c'est de constater la faillite des valeurs d'humanisme et de solidarité qui entourent ces accidents. En effet, au mépris du bon sens qui commande à chacun un sursaut d'assistance à toute personne en danger, mais aussi de la loi en vigueur et écrite, noir sur blanc, qui impose à tous cet effort d'assistance, les auteurs et autres témoins de scènes d'accidents, affichent une certaine indifférence qui frise le manque d'humanisme à l'égard des blessés.
Oui, on me rétorquera que depuis l'avènement du SAMU, interdiction est faite de toucher aux blessés. Mais le problème n'est pas là. Il se trouve que ces dernières années, les auteurs d'accidents graves prennent de plus en plus le malin plaisir de fuir, laissant sur place des blessés sans secours. Et dans la plupart des cas, les témoins ne font rien pour permettre l'identification de l'auteur d'un tel crime. Remarquez que nous parlons de crime, et non de délit de fuite, car dans le cas d'espèce, la fuite peut conduire à la mort d'un blessé gisant dans son sang et laissé sans secours.
Toujours est-il que, pour revenir à la fréquence des accidents et aux dégâts occasionnés dans notre pays, les statistiques sont là pour nous édifier sur leur ampleur: selon les chiffres donnés récemment par le Ministère des Transports, à l'occasion de la célébration de la Journée africaine de la sécurité routière, le 18 novembre 2015, il a été enregistré de 2011 à 2014, au Niger, au total environ 26.000 accidents pour un total de 3046 tués, 11.953 blessés graves et 19.446 blessés légers. Pire, il en ressort que les principales victimes sont des jeunes de la tranche d'âge 20 à 39 ans.
Franchement, ces accidents n'ont rien d'une fatalité. Il faut arrêter l'hécatombe ! Il faut, et il suffit que chacun se départisse de cet air d'insouciance qui caractérise les conducteurs, pour faire preuve de plus de prudence. Il s'agit d'amener chaque conducteur à prendre conscience du fait, qu'une fois au volant de leur voiture ou aux guidons de leur bécane, le moindre acte d'imprudence pourrait être fatal pour lui-même ou pour d'autres personnes se trouvant dans leur proche environnement. Car le jour où chacun s'appropriera cet adage qui dit : «Rien ne sert de courir, il faut partir à point'', il y aurait sans doute moins d'accidents à Niamey et sur nos grands axes routiers, donc moins de morts et de larmes.
Réduire considérablement le taux d'accidents de la route et de la circulation dans les centres urbains de notre pays : voilà un point qui, si moi, j'étais candidat aux prochaines élections, j'inscrirais en bonne place dans mon programme de campagne. Car, à coup sûr, les électeurs parce que, révoltés et écœurés d'assister au quotidien à cette hécatombe, m'accorderont une oreille plus attentive, voire leur confiance.