TUNIS -- L'épicentre du terrorisme international s'étend de plus en plus pour se concentrer sur le nord et la partie centrale du continent africain dans une tentative, selon des observateurs, de faire le lien avec les "machines de production" de l'Etat islamique (Daech) en Syrie, en Irak et en Libye.
A l'instar de Boko Haram au Nigéria, le groupe Shebab en Somalie ou encore Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), les mouvances terroristes visent des sites touristiques de renommée en Afrique, ce qui prouve l'existence d'une stratégie bien conçue, a commenté récemment Chaker Bouajila, analyste politique tunisien.
Ancien chef de la communication à la présidence tunisienne, M. Bouajila a indiqué que "ces groupes terroristes adoptent, dans ce sens, une tactique médiatique portant sur l'illustration de l'incapacité des pays africains à protéger leurs citoyens et d'assurer la sécurité des touristes".
Le terrorisme gagne ainsi de plus en plus du terrain en Afrique. Juste sur l'année 2015, certains médias occidentaux ont chiffré plus de 4.500 attentats terroristes mortels ayant secoué 44 des 54 pays composant le continent africain. Le Nigéria, le Soudan et la Somalie trônent en tête des pays ayant été les plus touchés.
Preuve en est, les attaques ciblant des hôtels comme le Radisson Blu de Bamako (Mali) le 20 novembre dernier et le Splendid de Ouagadougou (Burkina Faso) le 15 janvier 2016. Plus de 50 morts ont été recensés suite aux deux attaques revendiquées par des groupes extrémistes.
Fin novembre 2015, trois attentats terroristes sanglants ont endeuillé la Tunisie, faisant plusieurs dizaines de morts, à majorité des étrangers, dont 12 agents de la Garde présidentielle tués suite à l'explosion de leur bus en pleine capitale tunisienne.
"Malheureusement", a encore confié M. Bouajila à Xinhua, "les organisations terroristes ont trouvé dans certains pays africains sub-sahariens et nord-africains, comme la Mali, la Tunisie et la Libye, un terrain fertile, faute de coordination efficace et de politique régionale de lutte contre la contrebande et le trafic d'armes".
D'après lui, "les pays africains souffrent encore d'une certaine défaillance en matière d'équipements militaires et d'outils logistiques susceptibles de mener correctement une guerre contre le fléau extrémiste et de sortir traquer les terroristes en plein désert".
Avec tout cela, l'Afrique semble avoir grandement besoin d'une alliance militaire panafricaine. "Il est urgent de se rendre compte que le terrorisme ne pourra pas être vaincu par un seul pays mais plutôt dans l'union", a lancé dans la presse africaine le président de l'Institut panafricain de stratégie (IPS), Cheikh Tidiane Gadio.
L'économie informelle dans certains pays africains se transforme désormais en une économie chapeautée par des narcotrafiquants, des trafiquants d'armes et des contrebandiers de "gros".
"Depuis longtemps, les présidents du Niger Mahamadou Issoufou, du Tchad Idriss Deby et du Mali Ibrahim Boubakar Keïta, ont manifesté de manière constante leurs craintes quant au silence de la communauté internationale face à l'avancée de la menace terroriste en Afrique", a encore fait remarquer l'analyste tunisien M. Bouajila.
Il a indiqué que les différents groupes extrémistes opérant sur le territoire africain ont grandement profité des situations sécuritaires chaotiques, en particulier au Mali et en Libye.
"Il faudra renforcer la coordination militaire et de renseignements sous l'égide de l'Union africaine (UA) pour faire rebrousser chemin aux mouvances djihadistes armées", a-t-il recommandé.
"Il faut frapper en profondeur les racines de ces groupes terroristes, à savoir la contrebande, le trafic humain et les trafics d'armes et de drogues."
Attristé par la mort de trois ressortissants chinois dans l'attaque contre le Radisson Blu à Bamako, M. Bouajila a estimé que "la Chine est plus persuadée que jamais que la menace terroriste pèse de plus en plus lourdement sur la stabilité du continent africain, qui est désormais l'un de ses principaux partenaires économiques".
Dans ce sens, a-t-il poursuivi, "le président chinois Xi Jinping n'a cessé d'exprimer la ferme volonté de son pays à promouvoir les relations bilatérales sino-africaines notamment en matière de lutte contre le terrorisme".
Une "nouvelle vision chinoise", a insisté l'ancien responsable tunisien, qui "reflète une conviction africaine quant au rôle que pourrait jouer la Chine - ayant investi pas moins de 220 milliards de dollars américains annuellement - dans l'effort anti-terroriste sur ce continent".