Michel Djotodia doit faire une déclaration solennelle ce lundi 25 mars à Bangui. La veille, quelques heures après la prise de la capitale, le chef de la Seleka s'est déclaré président de l'Etat centrafricain. Michel Djotodia a annoncé qu'il souhaitait conserver Nicolas Tiangaye, le Premier ministre issu des accords de Libreville, à la tête du gouvernement. Il promet également d'organiser des élections d'ici trois ans maximum. Edition spéciale sur RFI de 7h00 à 8h00, heure de Paris et de Bangui (6h00 à 7h00 TU).
Michel Djotodia le dit encore du bout des lèvres mais ses réserves ne trompent personne. Il se considère déjà comme le nouveau président de la République. Cette annonce devrait être formalisée dans la matinée par une déclaration solennelle prononcée dans l’hôtel où il s’est installé.
Au terme d’une offensive éclair, ses hommes ont pris Bangui et contre toute attente, le chef rebelle en treillis endosse donc les habits du chef de l’Etat. Pour lui, la tâche est immense. La Centrafrique est à la dérive et son premier défi sera de ramener la sécurité non seulement dans la capitale mais dans tout le pays.
Pour l’appuyer, le chef de la Seleka compte sur Nicolas Tiangaye, l’opposant devenu Premier ministre en janvier à la faveur des accords de Libreville : « J'ai rencontré M. Tiangaye, nous resterons dans l'esprit de Libreville. Je vais le garder comme Premier ministre. Nous parlerons avec les membres du gouvernement proches de Bozizé qui sont encore là. Nous ne ferons pas la chasse aux sorcières. Je ne sais pas combien de temps je vais rester au pouvoir. Dans trois ans, comme prévu par l'accord de Libreville, nous organiserons des élections libres et transparentes ».
Nicolas Tiangaye n’a pas encore publiquement donné sa réponse. Il dit qu’il faudra encore attendre un peu. Mais un de ses très proches le confirme, le Premier ministre est prêt à épauler Michel Djotodia dans la conduite des affaires du pays.
Arrivé au pouvoir à la faveur d’un coup de force, le chef rebelle doit maintenant se faire accepter par la communauté internationale. Un membre de l’entourage du Premier ministre confesse que le plus important, ce sont les présidents de la région. Une manière détournée de dire que ceux-ci ne voient pas forcément d’un mauvais œil le départ de François Bozizé.
Qui est Michel Djotodia?
Le nouveau dirigeant de Centrafrique a une soixantaine d'années, c'est un ancien fonctionnaire et diplomate. Il est l'un des principaux leaders de la rébellion depuis environ huit ans, et il faisait partie des cinq représentants de la Seleka à faire partie du gouvernement d' nationale formé il y a deux mois. Louisa Lombard, anthropologue, spécialiste du nord de la RCA, dresse son portrait.
La bataille de Bangui
En 24 heures, le pouvoir a changé de mains en Centrafrique. Engagés samedi, les combats ont repris dimanche dès l’aube, les combats ont repris à une dizaine de kilomètres du centre ville. Ils sont âpres, violents mais les soldats centrafricains sont absents. Les rebelles portent leur coup de butoir sur les militaires sud-africains.
Dans la bataille, ces derniers perdent, de bonne source, quatorze hommes. Puis peu avant 8h00, les hommes dirigés par le général Arda Harkouma franchissent ce verrou et déboulent dans le centre-ville. Le palais présidentiel est dans leur ligne de mire. Les détonations d’armes lourdes détonnent, les kalashnikov claquent et aux environs de 9h00 l’information tombe : le palais est pris...
Le président Bozizé a fui mais les tirs résonnent encore toute la matinée et une bonne partie de l’après midi.
Dans les rues de Bangui, rebelles et civils pillent en masse. Voitures, frigos, tiroirs de bureaux, tout y passe. Les officiers de la Seleka promettent de ramener l’ordre mais ils sont submergés.
Finalement les soldats de la Fomac, la force d’Afrique centrale, les épaulent pour sécuriser la ville. Forte de 750 hommes, pour l'essentiel des Tchadiens, la Fomac patrouille désormais en ville.
Selon son chef, le général Jean Felix Akaga , « La Fomac est chargée de la sécurisation de Bangui. Il y a baucoup de pillages. Les combats ont fait des dégats limités, mais la situation sécuritaire est préoccupante. Nous allons essayé de nous coordonner avec la Seleka, qui est un peu débordée».
Les rebelles de la Seleka ont gagné la bataille mais le plus dur commence pour eux. Il leur faudra désormais tenter de remettre à flot un pays devenu depuis bien longtemps un bateau ivre.