Le gouvernement vient d’annuler le concours de recrutement des agents de la santé, organisé par le ministère de la fonction publique, après la publication des listes des admis, des listes pour le moins scandaleuses. A entendre la partie gouvernementale, appuyée par le procureur de la République, trop de magouilles et autres corruptions ont entaché le déroulement de ce concours, où des candidats qui n’ont pas composé ont eu, pour les uns, des notes parfois au dessus de 17/ 20.
Aussitôt après l’annulation, une enquête a été ouverte et des poursuites engagées contre des agents du ministère de la fonction publique dont le directeur général de la fonction publique et le directeur du recrutement. Cette action de charme du gouvernement laisse croire que le régime s’engage désormais dans une véritable lutte républicaine, autrement impartiale, contre la corruption et autres fraudes aux examens et concours, ces étapes cruciales qui ouvrent la voie aux études supérieures et à l’entrée dans l’administration nationale. Mais, à l’analyse des faits gravissimes qui se sont passés et jusqu’ici laissés impunis, dont les auteurs présumés sont connus de tous, et même promus après leurs forfaits dans les hautes sphères de l’Etat, on ne peut que douter de la sincérité de l’assainissement qui ne concerne en fait que le menu fretin. Un assainissement annoncé très tôt en 2011 par Mahamadou Issoufou, mais qui à l’épreuve des faits n’a concerné que les opposants politiques auxquels on colle de faux dossiers. Cette belle intention a d’ailleurs été très tôt abandonnée par son régime, gangrené par la corruption et la prédation des ressources nationales. Les Nigériens ont besoin de justice, pas celle sélective, ciblée. D’autres concours, on se rappelle, ont été décriés par l’opinion, et même par le pouvoir qui en a annulé un, notamment celui pour le compte du ministère de l’intérieur. Mais ceux qui ont l’habitude de s’autosaisir avec empressement et célérité n’ont engagé aucune poursuite, mieux, ils ont même étouffé les dossiers. Il y a eu d’abord le concours des agents des finances, où beaucoup de voix se sont élevées pour dénoncer les fraudes et les magouilles qui ont émaillé son organisation. Mais, le poussin a été très vite étouffé dans l’oeuf. Le concours des agents du ministère de l’intérieur a été plus scandaleux au point où une action judiciaire a même été initiée et des personnes interpellées. La gendarmerie a mené son enquête, mais le parquet a mis fin à la poursuite, comme par miracle. Voila un concours qui a été annulé par le gouvernement pour cause de fraudes et de magouilles, mais les auteurs ne sont pas poursuivis ou inquiétés outre mesure. Par qui ? Ceux-là même qui aujourd’hui nous promettent l’assainissement. Sinon ce ne sont pas les dossiers qui manquent et les concernés sont connus de tous. Le prêt Eximbank de 2 milliards de dollars, le miraculeux prêt congolais de 50 milliards dont la moitié a été empochée avant son inscription au budget national, l’affaire des passeports, l’avion présidentiel dont le seul hangar a coûté 7 milliards FCFA, ont pendant longtemps défrayé la chronique mais sans aucune réaction de la part du gouvernement. Pourtant des milliards de FCFA du contribuable nigérien ont été engagés dans ces affaires scandaleuses et nébuleuses où les citoyens ne voient que de la fumée. Il en est de même des 20 milliards ponctionnés à l’ARTP, dont la moitié pour un appui aux soldats envoyés en mission au Mali, mais qui auraient pris une autre destination. Une commission d’enquête parlementaire a même été mise en place pour faire la lumière sur l’affaire, mais aussitôt bloquée par des mains invisibles.
Que les Nigériens ne se leurrent pas, le régime actuel ne peut pas faire de l’assainissement, en raison de la politique de deux poids deux mesures, appliquée dès le départ. Et quand il y a un semblant d’investigation, c’est toujours le menu fretin que l’on prend, laissant de côté les gros poissons et les partisans. Sinon, quel a été le traitement réservé à l’affaire dite de « fausses factures » dont certains pontes du régime ont pourtant fait à un certain moment leur cheval de bataille ? L’opérateur économique au centre de l’affaire a rejoint le Guri, les fonctionnaires incriminés ont tous été innocentés et réintégrés. Point. Etait-ce une simple affaire de propagande et de postes visés ? C’est en tout cas le constat amer que les Nigériens ont fait. Cette fois ci aussi, qu’est-ce qui nous dit que ce ne sont pas des postes qui sont visés et qu’il faut chercher des prétextes ? Sinon, l’on sait où se trouvent les vrais coupables de toutes ces prédations des ressources nationales ainsi que les violeurs invétérés des lois et règlements de la République. Allons-y seulement. Les intrigants finissent toujours par être victimes de leurs intrigues.