Dakar - Le niveau "catastrophique" de pêche illégale en Afrique de l’Ouest représente pour elle un manque à gagner considérable en termes d’emplois et de revenus, affirme un rapport d’experts publié mercredi,
qui recommande à la région d’investir dans ses industries de pêche locales.
Des pays comme le Sénégal, la Sierra Leone et la Mauritanie perdent des revenus substantiels à cause des tonnes des captures illégales dans leurs eaux par des chalutiers venus parfois d’aussi loin que la Corée du Sud, selon l’Overseas Development Institute (ODI), un groupe de réflexion britannique
spécialisé dans le développement et porCausa, une organisation espagnole de journalisme d’investigation.
En 2012, la pêche illégale a représenté un manque à gagner de 300 millions de dollars (plus de 271 millions d’euros) pour le Sénégal, soit 2% de son produit intérieur brut (PIB). La même année, la Sierra Leone, un des pays les plus pauvres du monde, a perdu 29 millions de dollars (plus de 26 millions d’euros), selon ce rapport intitulé "Le poisson manquant d’Afrique de l’Ouest".
Opacité des accords de pêche entre gouvernements ouest-africains et leurs partenaires commerciaux, capacités limitées de patrouilles et failles juridiques à l’arrivée de ce poisson en Europe contribuent à cette situation, affirme à l’AFP Alfonso Daniels, un des auteurs de ce rapport. "C’est un grand
problème et qui empire", dit-il.
Les poissons pêchés illégalement en Afrique de l’Ouest sont transportés dans des conteneurs géants réfrigérés et mélangés à d’autres cargaisons pour échapper à la minutie des contrôles en Europe, qui représente 44% des exportations de poissons ouest-africains, explique M. Daniels.
Outre une lutte renforcée contre la pêche illégale, le rapport appelle les gouvernements régionaux à un "effort concerté pour renforcer leurs industries de transformation du poisson et les flottes de pêche autochtones, au lieu de vendre des droits de pêche à des opérateurs étrangers".
Cette cession de droits de pêche à des étrangers rapporte à l’Afrique 400 millions de dollars par année, avait estimé en 2014 l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Mais ces droits pourraient en théorie générer "3,3 milliards de dollars (près de 3 milliards d’euros)" de revenus si le continent pêchait et exportait lui-même les poissons, estime le rapport de l’ODI et PorCausa selon lequel de tels efforts pourraient permettre de créer "300.000 nouveaux emplois".