"Si tu n’est pas le plus fort dans la vie, essaies d’être le plus malin” disait un sage nigérien. Donné pour "politiquement mort" après sa fracassante exclusion du parti présidentiel, le PNDS-Tarraya en Octobre 2015, le leader du Mouvement Patriotique Nigérien, MPN ''Kishin Kasa'' est revenu en l'espace de six (6) mois dans le premier cercle du président Issoufou sans tambours ni trompettes. Comment a-t-il pu tourner en si peu de temps l'une des page les plus sombre de sa carrière politique et survivre à la redoutable machine du parti socialiste nigérien? Explications avec l’un de ses proches.
Jeunesse et Diaspora comme fer de lance
L’avantage de Ibrahim comme l’appelle ses amis, c’est sa jeunesse, la jeunesse de ses militants et sympathisants et la jeunesse de son parti. Moins de 3 mois après la création du MPN Kishin-Kasa, le parti réussissait une véritable percée électorale avec 5 députés et son leader propulsé au devant de la scène politique dans le rôle du faiseur de roi malgré sa cinquième place au premier tour de l'élection présidentielle. ”Dans son fief de l'Aréwa, jeunes comme vieux, hommes comme femmes ne jurent plus que par lui” s'étonne un observateur de la scène politique. Désormais, le jeune leader et sa formation politique sont incontournables sur la scène politique nationale, Mais le poids électoral de l'ancien syndicaliste n’explique pas tout.
Les véritables atouts du leader du MPN Kishin Kasa sont incontestablement son humilité et sa tolérance, deux qualités qui tranchent d'avec l'attitude va-t-en guerre de la classe politique. Lorsqu’il avait été banni du parti rose, Ibrahim Accoua avait préféré le profil bas à l’affrontement: pas de fanfaronnade, pas de provocation. Il avait tout au plus pris acte de son exclusion avant de "se caser". Avec l’appui précieux et bénévole de la diaspora nigérienne, notamment des États-Unis, l’aide d’amis et sympathisants, des militants aussi bien de l’opposition que de la majorité présidentielle, mais également des indépendants, il parvint à monter son propre parti. "M.Ibrahim Yacouba, entre dans l'histoire comme étant le premier haut gradé de la Douane nigérienne à démissionner de son poste et à créer sa propre formation tout en étant dans l’opposition " se réjouît M.Elhadji Salissou Idi, le président du MPN Kishin-Kasa de la Communauté Urbaine de Maradi, seconde place forte du parti.
Combat politique sans haine ni rancune
Mais lorsque le moment était venu de se prononcer entre les deux finalistes de la présidentielle de 2016, il n’avait pas hésité à soutenir le président Mahamadou Issoufou, à serrer la main de Bazoum Mohamed et faire la paix avec l’establishment du parti socialiste nigérien. Une décision surprenante aux yeux d’une partie de l’opinion publique nationale et internationale, mais pas de ses proches. ‘Nous ne sommes pas naïfs, mais nous pensons qu'on peut mener le combat politique autrement, sans haine ni rancune tout en sauvegardant les intérêts de notre parti, du système démocratique et du peuple nigérien” explique M. Elhadji Salissou Idi. “Ce que vous ne savez pas, ce que le président Yacouba était disposé à soutenir le président sortant dès le premier tour. Mais nous l’avions convaincu de se présenter aux élections présidentielles pour jauger son poids électorat” ajoute-t-il. Une stratégie qui s'est finalement avérée payante. Premier résultat concret: libération immédiate de son vice-président Elhadji Sani Attiya. Un bon leader politique dit-on, c’est aussi et surtout celui qui refuse de conduire ses partisans à l’abattoir pour assouvir ses propres intérêts
"C'est impressionnant de voir comment il a pu transformer ce qui semblait être un échec en un véritable succès, administrant une leçon d’humilité et de tolérance à toute la classe politique habituée à l'affrontement et aux règlements de comptes” affirme un observateur qui fait remarquer qu'en vingt (20) ans, l’ancien président M. Mahamane Ousmane et l’actuel président M. Mahamadou Issoufou n’ont toujours pas pu régler leurs différents malgré les innombrables tentatives de leurs proches.
Chef de la diplomatie nigérienne depuis Avril 2016, M. Ibrahim Yacouba voyage beaucoup, a la possibilité de rencontrer tous les grands de ce monde, du Secrétaire Général de l’ONU M. Ban Ki-Moon au président américain M.Barak Obama, le président français François Hollande en passant par le roi d’Arabie Saoudite M.Salmane ben Abdelaziz Al Saoudite, le président Nigérian M.Mahammadu Buhari M. Buhari ou encore le chinois Jiang Zemin, Il a aussi et surtout la possibilité d’acquérir beaucoup d’expérience, expérience qui lui serra précieuse dans cinq (5 ) ans au moment d’affronter les élections générales. Mais en attendant, il préfère se consacrer exclusivement à son ministère pour le rayonnement de la diplomatie nigérienne au quatre (4) coins du monde. Il a l'intention de céder prochainement la direction du parti à son vice-président selon ses proches.
“Nous n'avions posé aucune condition et nous n'en poserons aucune à nos alliés, notamment au président Issoufou, autre que celle de servir notre pays. Nous sommes des patriotes et nous resterons toujours comme tels. C’est à dire, le Niger d’abord avant tout intérêt partisan ou personnel" précise M. Elhadji Salissou Idi. "Le président Ibrahim Yacouba a instruit tous les cadres du parti, à tous les niveaux, de privilégier d’abord les intérêts de notre pays avant toute autre considération. Nous devons mériter la confiance placée en nous par le président de la République et le peuple nigérien" conclut-il. Décidément, le leader du MPN Kishin-Kasa et sa jeune formation politique ne cessent de surprendre l'opinion publique nationale.
Au total, au delà de son poids électoral, le retour en force de M.Ibrahim Yacouba repose sur sa capacité à encaisser le coup à faire table rase avec le passé et à faire la paix avec ses adversaires politiques au bon moment. Dans le même temps, il rassure le président Issoufou qui voit en lui une personnalité digne de confiance. Entre Ibrahim Yacouba et le Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme, la hache de guerre est définitivement enterrée, laissant désormais la place à la complémentarité et au respect mutuel.