La capitale malienne, Bamako, a accueilli du 22 au 24 août dernier, la troisième édition du Forum des Journalistes Africains pour la Paix. Après Ouagadougou en 2013 et Niamey en 2015, le rendez–vous de Bamako est venu consolider la bonne pratique des rencontres périodiques pour poser une fois de plus les jalons de la paix et porter ce précieux message de lutte contre le terrorisme dans nos différents pays. Pendant trois jours, les journalistes africains ont échangé sur beaucoup de questions qui ont trait aux causes et aux formes du terrorisme, à la communication des groupes terroristes, à l'Islam et le terrorisme, etc. Des communicateurs avertis sur ces différentes questions ont livré aux participants la quintessence de ces thématiques riches d'enseignements. Traitant du thème ''Islam et terrorisme'', Dr Mohamed Kimbiri, Directeur de la Radio Dembé de Bamako, a indiqué que pour les auteurs de cet amalgame (Islam et terrorisme), l'objectif recherché est qu'au lieu de présenter la religion musulmane comme une religion attractive, une religion victime du terrorisme sur toutes ses formes, ils la présentent comme religion répulsive, une tanière effrayante de fauves dont le sang et la violence sont les symboles. Selon le conférencier, devant une telle situation effroyable de guerre psychologique sous-tendue par une intoxication médiatique internationale, devant une telle atmosphère de croisade caractérisé par une islamophobie frontale et agressive, notre objectif serait d'apporter une modeste contribution à l'éclairage d'une certaine présentation erronée de l'Islam comme un fauve blessé, et de présenter l'Islam dans sa forme originale. ''Quand la raison du plus fort gouverne le monde, et que l'injustice internationale est érigée comme une vertu, les plus faibles, très souvent sans aucune référence religieuse, utilisent des moyens de terreur pour se venger'', souligne Dr Mohamed Kimbiri. Il ajouté qu'au nombre des causes du terrorisme, on peut citer l'injustice, la politique de deux poids deux mesures, la provocation du monde musulman, et l'ignorance des préceptes de l'Islam.
Il a souligné que le terrorisme n'est pas seulement un phénomène islamique, proche ou moyen oriental. Il est aujourd'hui un phénomène international. La condamnation de la violence est explicite dans le Coran: ''Vous ne viderez plus vos querelles dans le sang comme à l'ère de l'ignorance''. Selon le conférencier, le Coran précise, s'agissant du prosélytisme et des conversions : ''Point de contrainte dans la religion'': sourate II verset 256.
Cette attitude pacifique à l'égard du non musulman est prescrite plusieurs fois dans le Coran : sourate XVI verset 126 : ''Appelle au sentier de ton seigneur par la sagesse et la bonne exhortation. Discute avec eux de la meilleure manière...... ''.
Selon Dr Mohamed Kimbiri, cette interdiction du recours à la contrainte est rappelée de différentes manière dans le Coran y compris au Prophète Mohamed (PSL) lui-même : ''Si ton seigneur avait voulu, tous ceux qui sont sur terre en totalité auraient cru. Et quoi ! Peux-tu contraindre les hommes à être des croyants alors qu'il n'est donné à une âme de croire qu'avec la permission d'Allah..... '', Sourate X verset 99.
Pour combattre le terrorisme, le conférencier pense qu'il faut supprimer les causes qui lui permettent de se développer et qui se situent au niveau de la misère sociale, des situations d'humiliation collective ou individuelle, et des tentations de désespoir qu'elle entraîne, ''tout ceci favorisé par des thèses dévoyant le vrai message de l'Islam et de Démocratie''. Ces genres de situation sont des facteurs d'amplification du terrorisme à travers le réarmement des réseaux criminels comme AQMI dans la bande sahélo-saharienne'', a conclu le conférencier.
Quant au second conférencier, M. Ouezzin Louis Oulon, il a axé son intervention sur comment ''parvenir à la paix''. En introduisant son propos, Ouezzin Louis Oulon a indiqué que les guerres destructives sont récurrentes aujourd'hui si bien qu'elles sont acceptées. Il a ajouté que certains diront qu'elles sont inévitables et occupent une bonne partie de la nature humaine. ''Lorsque vous ne savez pas ce que vous pouvez faire de mieux pour arrêter un conflit, vous ne vous foulez pas la rate'', a-t-il dit. Dans des conflits tels que ceux du Rwanda ou de la Bosnie, le refrain que l'on pouvait entendre c'est par exemple : ''Ces gars se sont toujours battus.....des siècles'' ou ''ces gars ne vont pas finir de se tuer'', ou encore ''ils ne vont jamais s'entendre ces gars etc.''.
Selon le conférencier, le fatalisme paralyse notre volonté d'agir. ''Fatalisme né de notre ''ration médiatique'' quotidienne faite de guerres, de violences de rue, de grèves, de violation du droit, de combats politiques. Finalement, la figure conventionnelle de l'existence humaine admet la violence comme quelque chose de compréhensible, acceptable'', a dit Ouezzin Louis Oulon
Parlant de la paix, il a indiqué qu'elle est la norme. Il a ajouté que la majorité du temps, la majorité des gens vivent ensemble. ''Nous ne faisons pas attention à cela, et pourtant... Malgré les tempéraments, les habitudes et les styles de communication différents, beaucoup de maris, de femmes et d'enfants vivent bien ensemble. Même pendant les siècles les plus meurtriers, beaucoup de gens sur la Planète ont vécu ensemble en paix et non en guerre. LA PAIX EST DONC LA NORME : La paix est prépondérante comparée à la guerre'', a-t-il souligné. Il a ajouté que ''Parvenir à la paix'' suppose d'inventer une approche puissante différente de la coercition pour gérer les différends quand la négociation ne suffit pas ; ''d'examiner les racines d'un conflit en se rappelant de notre passé en tant que humain ; de voir les rôles pratiques que nous pouvons jouer pour nous aider et aider les autres à aller vers la paix''. Une 3ème partie aiderait alors à résoudre le conflit. Selon M. Ouezzin Louis Oulon, la 3ème partie, c'est la communauté environnante qui sert de récipient, de ''container'' pour contenir toute situation d'escalade. En son absence, un conflit entre deux parties peut se transformer en lutte, en conflit ravageur et destructif. Avec le container, un conflit peut graduellement passer de la confrontation à une coopération. C'est une forme de système immunitaire social, qui prévient du virus de la violence. La 3ème partie agit d'entrée sur les parties en conflit par un appel à leurs intérêts réciproques et au respect des normes de la communauté.
La mission de la 3ème partie, c'est donc d'éviter le franchissement du seuil de la violence'', a-t-il conclu.
Le Forum de Bamako a également été marqué par d'autres communications sur la situation sécuritaire dans les pays de la sous-région, notamment au Burkina Faso, au Mali et au Niger. Au nombre des recommandations formulées par les participants figurent, entre autres, le contrôle rigoureux sur l'accès des prêcheurs aux radios afin d'éviter la diffusion de messages radicaux, extrémistes, faisant la propagande de la violence ; la facilitation aux journalistes de l'accès à l'information sur les questions relatives à la sécurité nationale etc.