Depuis quelque temps, les Nigériens ont remarqué que malgré la bougeotte dont il est victime et qui l’amène à se transporter sur tous les théâtres du monde, tantôt pour aller féliciter un pair, tantôt pour l’assister dans le vernissage d’un livre lorsqu’il ne s’agit pas simplement de vacances déguisées en missions officielles d’État, Mahamadou Issoufou en voyage plus. La raison, c’est qu’il est angoissé par l’idée de quitter le Niger par l’avion présidentiel et de se voir contraint d’y revenir par un vol commercial. Africard LTD, qui poursuit le bras de fer judiciaire qu’elle a engagé contre l’Etat du Niger et qui a déjà fait opérer une saisie du Mont Greboun, entend ne pas s’arrêter à mi-chemin.
Le 30 juillet 2016, pour voir son coucou libéré, Mahamadou Issoufou a envoyé Saïdou Sidibé, ministre des Finances à l’époque et Gandou Zakara, Secrétaire général du Gouvernement, à Paris en vue de trouver un accord amiable avec Africard LTD. Objectif atteint puisque Africard LTD, devant qui les missionnaires de Mahamadou Issoufou ont pris des engagements douloureux pour le Niger, a accepté la mainlevée immédiate sur l’avion présidentiel sous la condition, d’une part, que le Niger lui verse un acompte de 2 milliards 200 millions de francs CFA immédiatement et qu’il ouvre, dans les meilleurs une négociation visant à trouver un accord transactionnel. Engagements que l’État du Niger n’a pas manifestement tenus puisque le Mont Greboun est désespérément cloué sur le tarmac de l’aéroport international Diori Hamani de Niamey (peut-être saisi à nouveau) ; d’autre part, parce Africard LTD a déterré la hache de guerre. Le 27 septembre 2016, devant la Cour de justice du District de Columbia, aux Etats Unis, elle a déposé une requête pour demander un avis sur le jugement rendu contre l’accusé, la République du Niger, conformément à l’article 207 de la loi en matière de jugement rendu à l’étranger. En guise d’arguments, Africard LTD a indiqué à la Cour que selon les termes de l’accord des parties, il a été a confié la production d’au minimum un million de passeports biométriques et électroniques, mais que le 24 mars 2011, le Niger a unilatéralement annulé cet accord. Ayant d’abord saisi les juridictions compétentes du Niger, puis la Cour d’arbitrage de l’OHADA, à Abdjan, Africard a finalement défendu sa cause devant le Tribunal arbitral de Paris qui, le 9 Juin 2014, a rendu un verdict de procédure intérimaire, concluant que «la résiliation unilatérale du contrat du 13 Octobre 2011 par l’État du Niger pour la production de passeports biométriques et électroniques était abusive et illégale. En définitive, Le tribunal a ordonné à l’État du Niger de verser à Africard LTD la somme de 44.740. 781 francs CFA pour compenser les frais engagés, 15 440 533 316 Francs CFA à titre de compensation pour les profits perdus, 1.000.000.000 de francs CFA pour atteinte à sa réputation ainsi que 156,747,299 francs pour le coût de la procédure de jugement . Le 4 Février 2016, Africard LTD a déposé sa pétition pour confirmer le jugement rendu et indiqué que bien qu’il ait reçu une copie de la requête, le Niger n’a toujours pas répondu. D’où le jugement par défaut rendu le 27 septembre 2016 en vertu du « Foreign Sovereign Immunities Act («FSIA») », la seule base pour juger un État étranger devant les tribunaux des États-Unis. En vertu, donc, de la loi fédérale américaine en matière de jugement, la Cour confirme la sentence, ainsi que la requête pour un jugement par défaut, et ordonne le Niger à verser à Africard LTD le montant de 46, 128,410.46 dollars US. Africard LTD ayant demandé que dans l’application du verdict, la Cour convertisse le montant des pénalités dans une monnaie étrangère, en l’occurrence en dollars, le Département du Trésor des États-Unis rapporte les taux de change sur une base trimestrielle. Ainsi, pour le trimestre se terminant le 30 Juin 2016, 1 dollar équivalait à 590.6900 Francs CFA. Pour la fin du trimestre du 30 septembre 2014, qui serait applicable à la sentence rendue le 6 décembre 2014, 1 dollar équivalait à 516,6500. La Cour a indiqué qu’étant donné que le taux de change a connu une dépréciation depuis la date de la décision finale, la Cour utilisera le montant plus élevé. Ce qui fait que, conformément à la décision de justice rendue aux Etats Unis le 27 septembre 2016, l’État du Niger doit payer à Africard LTD un peu plus de 24 milliards de francs CFA. Pour un contrat rompu de façon unilatérale et une désinvolture à se soumettre aux décisions de justice, voire une mauvaise foi dans le respect des engagements pris ! Nous y reviendrons lors de nos prochaines éditions.