On ne mesure pas la brutalité d’une gifle par le simple bruit qu’elle produit. En effet, seul celui qui reçoit la gifle peut, en toute objectivité, témoigner de sa portée, du dégât qu’elle produit. Eh oui, il a suffi d’une sortie, une seule sur certains errements de certains organes de presse, pour que le monde se mette en branle, surtout du côté de ceux qui ont toujours perpétré le mal.
Dans une de nos langues maternelles, on vous dira tout simplement que « vous êtes un gobelet », lui qui aime à se remuer allégrement dans le canari sans pour autant pouvoir en supporter le contraire. Cela dit, on ne s’amuse pas à sauter le feu quand on a une culotte en paille. Evitons tout simplement de jeter le discrédit sur d’humbles citoyens si nous voulons nous-mêmes être à l’abri de tels comportements.
Certes, on ne peut nier la dureté des mots que le président de l’Assemblée Nationale a prononcés contre certains acteurs de la presse, du reste, une partie connue de la presse qui s’est acharnée contre lui ces derniers temps. En effet, Hama Amadou n’est pas passé par quatre chemins pour fustiger le comportement de ceux qui, bon gré mal gré, on fait de lui le sujet de leurs préoccupations premières. Des dires, des analyses et des faits rapportés le plus souvent pas avec l’orthodoxie souhaitée. C’est surtout contre ces délateurs et leurs semblables que s’est acharné le président de l’Assemblée Nationale pour leur demander un peu plus d’objectivité et de la retenue. Ce discours n’a nullement pour dessein de remettre en cause la liberté de la presse, un acquis désormais inaliénable dans notre pays, comme l’a bien souligné Sala Habi qui a bien voulu expliciter les propos tenus par son président. Hama Amadou a parlé comme pour dire à ses détracteurs que trop, c’est trop. Il est vrai que quand on est un homme politique de la trempe de Hama Amadou, on ne saura échapper aux critiques de la presse. Cependant, ces critiques doivent être constructives et avoir comme objectif de rectifier les errements constatés. Autrement dit, on ne critique pas dans le simple dessein de le faire. Surtout que cette fois-ci, on a comme l’impression qu’une machine à broyer les consciences a été actionnée dans le seul but de déstabiliser nos institutions.
Ceci dit, comme il fallait s’y attendre, le discours du président de l’Assemblée Nationale a encore soulevé des vagues inattendues. On aurait bien voulu qu’il agisse d’une certaine manière. Cependant, il est resté lui-même, avec cette fois-ci une volonté affichée de répondre à qui il faut. Et cette façon de faire a donné lieu à plusieurs interprétations. Figurez-vous, ce n’est pas aujourd’hui seulement que Hama Amadou a fait l’objet de critiques de la part de la presse. Depuis tout le temps où cette presse a sévi contre lui, il est resté de marbre, laissant au temps de jouer son rôle. Et très vite, certaines analyses tronquées se sont estompées. Pour cette fois qu’il a décidé de répondre – car c’en était de trop – les langues se sont déliées, certaines allant jusqu’à commettre de flagrantes erreurs. C’est comme ce jeune homme à un débat télévisé qui rappelle haut et fort que lui, il n’a jamais cru au président de l’Assemblée Nationale du moment où il a été son tortionnaire à l’université, autrement l’artisan de son échec ! Quel est le rapport sérieux que l’on peut établir entre les deux situations ? Et aussi cet autre qui ne voit de dossiers sérieux de justice que celui qui concerne Hama Amadou. Toutes ces façons souvent bornées de voir la question fait dire qu’en s’acharnant sur Hama Amadou, les gens veulent tout simplement s’attaquer à la sérénité, à la santé même de l’alliance qui porte la destinée de la 7ème République. Ceci est d’autant vrai quand on voit le désarroi qui s’est emparé de l’opposition politique qui pensait avoir suffisamment mijoté son plan de déstabilisation des deux partis ténors de la majorité. On comprend donc que c’est bien à dessein qu’une certaine presse s’entête à tirer sur la ficelle pour donner l’impression d’un climat délétère qui serait récupéré par l’opposition qui argumenterait pour un éventuel dépôt d’une motion de censure. Tout le monde voyait ainsi la trappe ouverte pour une éventuelle recomposition du paysage politique du pays. D’un côté, on entrevoyait déjà un retour retentissant aux affaires, de l’autre côté on attendait des ristournes mirobolantes pour le rôle de kamikaze qu’on aurait joué. Somme toute, le président Hama Amadou a réellement déçu les espoirs que nourrissaient les uns et les autres avec son discours qui a rassuré sur la santé de l’alliance au pouvoir. Plus, Hama en a fait un non événement, s’étant plus penché à rappeler certains journalistes à l’ordre, ceux qui croyaient avoir réussi à couper la tête du serpent. Quoi de plus normal si ces mêmes gens reviennent encore pour cette fois-ci saisir la brèche en présentant le président de l’Assemblée Nationale comme un tortionnaire de la liberté de la presse ? On ne peut empêcher aux journalistes de commenter un discours ou les dires d’un politicien. Cependant, commenter ne veut pas dire répondre mot pour mot, comme si on prenait la place de l’opposition politique qui en a la vocation et les prérogatives. Pourquoi un bras de fer entre un journaliste et un politicien ? Nous ne voyons pas l’opportunité du moment où les deux n’ont pas le même champ d’action. C’est peut-être là où le bât blesse car ce comportement est monnaie courante dans la presse nigérienne. Et, en fin de compte, on ne fera que donner raison à l’opinion publique qui désormais ne voit plus de différence entre la politique, la société civile et la presse. Ne soyons pas naïfs ; arrêtons-nous et appréhendons cette question avec lucidité. Certes, dans tous les pays du monde, mêmes les plus démocratiques, la presse a toujours été un tremplin qui accompagne le positionnement politique. Dans le même temps qu’elle participe aux activités de veille citoyenne, la presse ne s’est jamais éloignée des grands hommes politiques qui l’utilisent dans leur combat quotidien. Ceci dit, il serait inopportun de fustiger le comportement d’un journaliste qui s’aligne politiquement dans son travail. Sinon, on ne parlera jamais de ligne éditoriale, une réalité à laquelle aucun organe de presse ne saura se soustraire. Nous défions qui n’épouse pas cette réalité à sortir pour le démontrer. Ceci dit, tout va désormais reposer sur la manière de conduire son analyse, les mots que l’on utilise dans son travail. Au-delà du fait qu’il faut s’appuyer sur des faits réels ou réalistes, il faut nettement se démarquer du discours politique. Un article de journal n’est donc ni un tract ni un pamphlet pour desservir vertement la cause de quelqu’un au profit d’une tierce personne. Et, si jamais l’on se prête à ce jeu, si l’on doit répondre du tic au tac à un homme politique, on court le risque de transformer son organe de presse en un journal du parti politique. Et c’est bien de cela qu’il s’agit car, à bien parcourir certaines analyses, l’on s’apercevra qu’elles n’ont rien à envier à certains discours politiques. Une fois que l’on choisit de s’aligner dans cette logique, il est donc tout à fait normal que l’on reçoive sur la tête la foudre des politiciens. C’est le lieu de relever qu’avec une telle conduite, nous journalistes, nous hypothéquons nous-mêmes la liberté de la presse si jamais nous nous mettons au strict service d’un homme politique. Ceci est d’autant plus vrai qu’il y a aujourd’hui des journaux qui ne voudraient jamais publier une analyse qui dessert leur poulain. Sommes-nous libres si jamais nous devons coûte que coûte pencher notre plume selon le bon vouloir de quelqu’un ? De ce fait, avons-nous réellement besoin de cette liberté de presse si nous épousons cette idée de ligne éditoriale à la nigérienne, c’est-à-dire, collée à telle ou telle autre tendance politique ? A méditer.