Dans un entretien qu'il a accordé au journal gouvernemental, " Le Sahel ", alors qu'il avait tout aise de convoquer un point de presse, le procureur de la République, Chaïbou Samna, sort de son bois pour annoncer la fin de la récréation pour " tous ceux qui ont pris irrégulièrement des biens publics ". " Ils doivent, dit-il, les réintégrer sans délai, pendant qu'il est encore temps ". Une sortie qui a laissé plus d'un perplexe, le Niger, depuis six ans, étant un vaste champ de détournement de biens et de deniers publics. Chaïbou Samna faisait-il allusion au scandale survenu à la Soraz où des matériels divers d'une valeur de six milliards avaient été dissipés ? Pas uniquement.
Car, si le scandale de la Soraz a été l'alibi principal de sa sortie médiatique, Chaïbou Samna a également parlé d'argent public, soulignant au passage que " les gens qui ont pris irrégulièrement de l'argent public doivent le réintégrer incessamment, même si c'est un copeck. De même, ceux qui ont pris irrégulièrement d'autres biens publics doivent les rendre sans délai, cela quelle que soit la personne ". Tout un programme ! Victimes d'une prédation jamais égalée dans l'histoire du Niger, faite de détournements massifs de deniers publics, de corruption et de trafics d'influence, de fraudes aux examens (Baccalauréat) et concours professionnels d'entrée à la Fonction publique, de trafics de devises et de drogue, le Niger n'a jamais connu une période aussi noire où, pratiquement au su et au vu de tout le monde, des réseaux entiers ont fait main basse sur des centaines de milliards appartenant à l'État. Pour apporter sa part de contribution dans la réalisation de cette œuvre salvatrice du procureur de la République qui vient quelque peu perturber la tranquillité des réseaux mafieux, Le Courrier descend dans les eaux troubles de la 7e République, histoire de donner des rondeurs au message de Chaïbou Samna et rappeler au bon souvenir de la justice des affaires scabreuses que les Nigériens attendent de voir jugées.
Brigi Rafini, Africard LTD et le groupe nigérian Contec global
La plupart des citoyens nigériens ont de la peine à croire en la faisabilité du projet imminent du procureur de la République, Chaïbou Samna qui, en plein scandale financier secouant la douane nigérienne, a lancé, chose curieuse dans une démarche judiciaire, un avertissement aux délinquants économiques et à " tous ceux qui ont pris irrégulièrement, pour reprendre ses propres mots, les biens et l'argent publics ". En guise d'arguments soutenant leur opinion, ils évoquent toutes ces sales affaires régulièrement dénoncées par la presse locale mais étouffées ou carrément ignorées. Pourtant, il s'agit d'affaires graves dans lesquelles l'Etat a été spolié de plusieurs centaines de milliards de nos francs. Pour entamer ce rappel des dossiers fumants qui attendent de livrer les secrets des actes et des complicités qui ont permis de spolier l'État de centaines de milliards de francs CFA, Il ne serait sans doute pas superflu de vous rappeler les récentes révélations du Courrier à propos de cet homme qui a longtemps trompé les Nigériens par son allure, totalement trompeuse. Brigi Rafini, on l'a finalement su, est passé outre tous les conseils et mises en garde de ses collaborateurs et a refusé d'obtempérer à un arrêt de la plus haute juridiction du pays, la Cour d'État, pour annuler un marché régulièrement signé entre le Niger et Africard pour le réattribuer à un groupe nigérian, Contec global. À quelles fins ? Nul ne le sait pour le moment. Ce qui est su, c'est que son entêtement à violer l'arrêt de la Cour d'État et à refuser les conseils de ses collaborateurs a valu au Niger d'être traîné devant les juridictions internationales compétentes ; une procédure qui a alourdi la dette extérieure du Niger de l'ordre de 27 milliards de francs CFA et qui n'est pas près de terminer. Déjà en 2013, sur la foi de documents publiés au lendemain des faits, Brigi Rafini avait donné son autorisation au ministre de l'Economie et des Finances pour octroyer des marchés à des entreprises bien ciblées : Ets MIM, SST, IC, SBRS, Pluricom, Complite Technique. Une autre affaire sulfureuse qui ne manquera pas de soulever des lièvres !
Autre affaire qui défraie actuellement la chronique, la douane nigérienne est traversée par un scandale lié à la dissipation de matériels divers d'une valeur de six milliards de nos francs. Curieusement, des douaniers sont interpellés, notamment le directeur régional des douanes de Zinder et le responsable du bureau des douanes de Soraz tandis que le directeur général des douanes au moment des faits se la coule douce à la présidence. Aussitôt limogé consécutivement à l'éclatement de ce scandale, Issaka Assoumane s'est vu nommer par Mahamadou Issoufou conseiller avec rang de ministre. Et pourtant, des indices graves pèsent sur le secrétaire chargé des relations avec le patronat du Pnds Tareyya, c'est-à-dire les commerçants et les hommes d'affaires. N'a-t-il pas été nommé à la tête des douanes pour faciliter les choses aux hommes d'affaires qui financent le parti ? Issaka Assoumane est, donc, une pièce maîtresse de cette affaire pour laquelle ses comptes bancaires ont été bloqués et qui a vu l'interpellation de plusieurs personnes. Cette affaire constitue, à n'en point douter, la première épreuve de la justice. Sa conduite permettra de savoir si la justice est décidée à aller jusqu'au bout de sa logique : traquer, sans discernement, tous les cas de malversations financières.
Bety Aïchatou Habibou Oumani et la firme Hachette "s'entendent" au détriment des intérêts du Niger
Sous le couvert d'une commande destinée au ministère des Enseignements secondaires se cachait en réalité une gigantesque magouille qui a saigné, une fois de plus, les finances publiques. À la veille de la rentrée scolaire 2013-2014, Bety Aïchatou Habibou Oumani, alors ministre des Enseignements secondaires, fait la commande d'une grande quantité de manuels scolaires auprès de la maison d'édition Hachette. Elle doit certainement fournir des explications crédibles à la justice sur les contours de cette importante commande. D'abord, sur le choix de l'unique fournisseur, en l'occurrence la firme française Hachette. Pourquoi a-t-elle passé une commande d'une telle envergure (1.856.609.240 FCFA) sans recourir à un appel d'offre international et sans jamais communiquer à la structure chargée du contrôle des marchés publics et des engagements financiers le montant exact de cette commande. Un important lot de 332 334 manuels scolaires était au centre de cette affaire. Pour contourner les procédures usuelles en pareille circonstance, Bety Oumani, avait simplement adressé une lettre à la patronne du contrôle des marchés publics et des engagements financiers (voir fac similé). Dans cette missive, la ministre demandait l'autorisation de se livrer à une grosse arnaque. Pas moins que ça puisqu'il s'agit ici d'esquiver les textes qui régissent la passation des marchés publics. Pour justifier sa forfaiture, la ministre évoque entre autres, le Copy right (droits d'auteur) des manuels qui serait exclusivement détenu par la firme Hachette. Or, tous les techniciens en la matière savent que c'est faux. N'empêche ! C'est de cet alibi que s'est saisie dame Bety pour demander à passer commande auprès de ce seul éditeur, sans lancer un appel d'offre. En termes clairs, une " entente directe " avec le fournisseur. Dans la même lettre, Bety soulignait le cas d'urgence, car, selon, ces manuels seraient destinés à couvrir les besoins de la rentrée scolaire 2014-2015 alors que les manuels sont arrivés seulement à la fin de l'année scolaire 2015. La même dame se retrouve aujourd'hui à l'ARTP, victime déjà de sorties de fonds frauduleuses à hauteur de plusieurs dizaines de milliards. La justice ne doit-elle pas se pencher sur cette affaire ?
Massoudou Hassoumi, le fameux "don" d'Areva et l'achat d'un nouvel avion présidentiel
En décembre 2013, sous la plume d'Adnan Abidi de Reuters, il a été clairement rapporté que " Contrairement aux déclarations de l'entreprise nucléaire, une partie de son "don" de 35 millions d'euros à l'Etat du Niger était bien destinée à acheter un nouvel avion au président du Niger. Un don démenti puis admis en janvier 2013, Areva reconnaissant finalement l'existence de la promesse d'un "don" de 35 millions d'euros à destination du Niger.
En effet, le 4 décembre 2012, Gilles Baillet, ministre des Finances du Niger, intervient devant l'Assemblée nationale pour opérer un "rajout budgétaire" inattendu pour l'année 2013. Son intervention, bien qu'alambiquée, fait le lien entre le don d'Areva et son affectation à l'achat d'un avion présidentiel. Le 9 novembre 2012 à Paris, se tenait une réunion confidentielle concernant "le planning d'exécution du Projet Imouraren". Olivier Wantz, accompagné de deux autres hauts représentants d'Areva, a reçu à Paris Massoudou Hassoumi, le directeur de Cabinet de la présidence de la République du Niger à l'époque. Malgré les précautions prises par les deux parties pour que le compte-rendu de ce meeting appelé " Les minutes de discussion ", reste confidentiel, l'Observatoire du nucléaire arrive à mettre la main dessus et le rend public le 14 janvier 2013. Voici ce que l'on peut y relever : " Prenant en compte le manque à gagner généré par le report probable du projet Imouranen au-delà de fin 2014, Areva s'engage à soutenir financièrement l'Etat du Niger en mettant à disposition la somme de 35 millions d'euros sous la forme de paiements successifs (de 16 millions d'euros en 2013, 10 millions d'euros en 2014, et 9 millions d'euros en 2015. Il est entendu que cet effort est exceptionnel ". Outre cet argent d'Areva dont une partie est destinée à l'achat d'un nouvel avion présidentiel, le gouvernement a également inscrit au titre de deux budgets successifs (2013 et 2014) quelques 21 milliards pour l'acquisition et sept milliards pour la construction d'un abri pour de l'appareil. En définitive, c'est un avion d'occasion de 16 ans qui a été acheté dans des conditions troubles aux îles Caïman, un paradis fiscal, sous la conduite de Hassoumi Massoudou, alors directeur de cabinet de Mahamadou Issoufou. Un scandale révélé par la presse mais qui est restée lettre morte alors que ce sont des milliards de l'État qui ont été dissipés dans cette scabreuse affaire. Massoudou Hassoumi a acheté ce vieil appareil pour le compte du Niger à 41 775 000 dollars, soit 20 887 500 000 FCFA en raison de 500 FCFA le dollar. Scandaleux ! Ce n'est pas tout car le scandale est encore ailleurs, dans les conditions d'achat de cette ferraille volante. Outre le coût trop élevé pour un appareil d'occasion de ce genre, la lettre d'intention signée entre les deux parties le 16 juillet 2013 indique clairement que " l'acheteur contribuera un montant de 22 millions de dollars de ses propres fonds au coût total de la transaction et le reste sera couvert par le financement qui sera arrangé par Afribridge (l'obscure société avec laquelle Massoudou Hassoumi a traité aux îles Caiman). Il est prévu que ce financement consistera en un prêt de 2 ans au taux d'intérêt de 6% par an, avec des garanties comprenant une garantie souveraine et une prise de sûreté sur l'avion ". En clair, Malgré les 35 millions d'euros d'Areva, les 28 milliards inscrits aux budgets 2013 et 2014, Hassoumi Massoudou a endetté le Niger pour acheter l'avion présidentiel. N'est-ce pas grave pour que la justice inscrive ce dossier en bonne place des affaires qui prouveront que les menaces agitées par le procureur de la République concernent toutes les personnes impliquées dans de sales affaires, quelles qu'elles soient et où qu'elles se trouvent ?
Le FMI, Mahamadou Issoufou et les prêts Eximbank et Congolais
Les scandaleux prêts d'Eximbank et du Congo constituent d'autres " merveilles " où, au nom de l'Etat, des milliards du contribuable nigérien ont pris des destinations inconnues. En novembre 2013, la polémique sur le frauduleux prêt contracté auprès d'Eximbank de Chine, sans que l'Assemblée nationale ait été consultée, divise le Niger. Ce prêt est-il de deux milliards de dollars comme l'a reporté l'Agence chinoise de presse, Xinhua, en date du 9 janvier 2014 ou d'un milliard comme l'a clamé le gouvernement nigérien ? Ce débat est derrière nous mais il n'a pas suffi à éclaircir les zones d'ombre de ce dossier sulfureux. Où sont passés ces 500 milliards de francs CFA ? Pourquoi l'Assemblée nationale a-t-elle été tenue à l'écart de ce dossier alors que c'est au parlement donner son quitus ou de le refuser avant tout engagement du gouvernement ? Ce manquement aux règles constitutionnelles n'est-il pas suffisant pour que la justice sévisse ? Ce prêt d'Eximbank de Chine n'est pas d'ailleurs un cas isolé. Pratiquement dans la même période, un autre prêt de 50 milliards FCFA a été directement négocié par Mahamadou Issoufou auprès du Congo. En dehors de toute procédure consacrée la loi. Apparu dans le budget 2012, il est aussitôt retiré de la loi de finance après une protestation des institutions financières internationales. Celles-ci réprouvent la procédure et les conditions dans lesquelles le crédit a été contracté. Il n'apparait pas dans le budget 2013, mais subitement réapparait dans celui de 2014. Mais c'est au cours de l'année 2013 où le prêt n'était pas inscrit dans le budget national que le gouvernement a touché " la moitié ", soit 25 milliards FCFA. C'est le ministre des finances de l'époque, Gilles Baillet qui l'a dit en direct de l'hémicycle, lors des discussions générales précédant l'adoption du budget 2014. N'est-ce pas un détournement pur et simple ? En tout cas ? La gestion de l'État et des ressources publiques obéit à des règles qu'il faut respecter sous peine de subir les rigueurs de la loi. La lumière doit être faite sur l'usage qui a été fait de ces fonds qu'on dit sécurisés à l'époque dans un compte alors que le crédit n'est même pas inscrit au budget et que la moitié a été déjà encaissée en 2013. Par qui ? That is the question.
Daouda Mamadou Marthe fait main basse sur 145 millions de francs CFA
LE procès-verbal de passation de service entre le payeur entrant et le payeur sortant de l'Assemblée nationale a été l'occasion de découvrir les libéralités que s'est accordé Daouda Mamadou Marthe, véritable tête de pont du complot qui a illégalement destitué le légitime président de l'Assemblée nationale. Premier vice-président de l'Assemblée nationale, il a cru devoir s'octroyer les fonds politiques destinés au président de l'Assemblée nationale. Il a, donc, usé de sa station temporaire, l'Assemblée nationale étant sans président, pour exiger que les fonds politiques lui soient versés. Ce qui fut fait, un premier montant de 36 250 000 FCFA lui ayant été payé le 5 novembre 2014. Il tenait à se servir ! Nul ne sait le sort advenu aux 72 500 000 FCFA qui représentaient le reste à payer. Toujours est-il que, probablement pour saluer les éminents services rendus au régime dans le cadre du complot visant le renversement de Hama Amadou, Amadou Salifou, qui venait d'être nommé - c'est lui qui le dit ainsi - par Mahamadou Issoufou à la tête de l'Assemblée nationale, instruit les services de la paierie pour que l'intégralité des fonds politiques du 4e trimestre 2014 lui soit payé. Ce qui a été fait par ordre de paiement n°711/DOB/2014 du 21 novembre 2014 au nom de Daouda Mamadou Marthe. Pourtant, et afin que nul ne se trompe sur le caractère frauduleux de cette démarche, le rapport a clairement mentionné, au niveau du paiement partiel au titre du troisième trimestre de 2014, que " il ressort un reste à payer à l'ex-président de l'Assemblée nationale, soit Hama Amadou alors que c'est Daouda Mamadou Marthe qui a encaissé les 36 250 000 du paiement partiel. Une mention qui ne fait place à aucune ambiguïté quant au détournement avéré de fonds publics.