N’Djamena (Tchad), La Ligue des Oulémas, prêcheurs et imams des pays du Sahel, réunie à N’Djamena, au Tchad, pour son cinquième atelier régional, a estimé, désormais nécessaire et important que les prêcheurs revoient leur discours religieux, afin de le rendre plus en phase avec les attentes et aspirations des jeunes.
Les Oulémas du Sahel et des autres pays d’Afrique, menacés par le terrorisme précisent que les jeunes étant une cible vulnérable, doivent faire l’objet d’une attention particulière de la part des leaders religieux africains, en vue de leur éviter de tomber dans le piège de la radicalisation et de l’extrémisme.
En revanche, et pour y parvenir, les participants ont été unanimes sur le fait qu’il est impératif que les Etats accompagnent les efforts des leaders religieux dans leur mission de prévention contre la radicalisation et l’extrémisme violent.
« Les participants se sont accordés sur l’importance de mettre en place des programmes d’activités à l’adresse des jeunes, englobant les secteurs économiques et culturels, visant à combler un vide intellectuel et à les prémunir contre toute tentative d’endoctrinement de la part des idéologues des groupes terroristes. Ils ont également appelé à mettre en place un mécanisme de suivi et d’échange chargé de promouvoir, coordonner et évaluer les projets précités », rapporte le communiqué issu de deux jours d’échange d’expériences et de méthodes sur la lutte contre le terrorisme.
Les imams et prêcheurs africains avaient également souligné l’importance qu’ils soient formés, eux-mêmes, aux Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), afin d’élargir leur auditoire et de le rendre plus performant et efficace, notamment auprès de la population des jeunes. Ils ont cependant mis en garde les jeunes de la région du Sahel contre l’embrigadement dont ils peuvent faire l’objet de la part des groupes extrémistes terroristes, tels que Daech, Boko Haram, Ancar el Chari’ à, El Mourabittoun, El Qaida et autres ; car ils sont vecteurs de l’aveuglement et de l’ignorance.
Pour montrer le caractère désormais globalisant de la lutte contre le terrorisme, les oulémas de la dizaine de pays africains avaient mis en exergue, le rôle important que pourraient jouer les femmes, en tant que premier rempart et au niveau même de la cellule familiale, dans la prévention de la radicalisation des jeunes, afin d’intervenir de manière précoce contre tout processus de radicalisation.
Au nombre de pays, qui ne sont pas membres de la Ligue des Oulémas du Sahel, mais présents à cette rencontre, du fait qu’ils sont aussi victimes du terrorisme, la Côte d’Ivoire, représentée par Imam Koné Ibrahim. Ce dernier estime que la protection de la jeunesse africaine contre les maux qui minent notre société, dont la radicalisation, est un impératif religieux et social.
« La jeunesse représente un trésor aux yeux de toute société normale. Elle constitue la relève des adultes d’aujourd’hui. Pour faciliter le passage de témoin, cette frange de la société a besoin de l’attention de tous, surtout des guides religieux », souligne-t-il.
« Les leaders religieux de par leur statut, sont des modèles et des références pour la population. La conjugaison de leurs efforts en faveur des jeunes dans la lutte contre toutes formes de radicalisation est plus qu’attendue, car salutaire. Leurs actions permettront à coup sûr de prémunir nos jeunes de l’embrigadement des groupes extrémistes et terroristes », indique le théologien ivoirien.
Selon Cheikh Ibrahim Koné, la jeunesse qui est considérée à raison par toutes les sociétés comme l’avenir de demain, est malheureusement le vivier où les groupes terroristes viennent recruter leurs éléments, qui à travers les bombes et autres explosifs, doivent tuer et semer la désolation pour eux.
« Ces jeunes à qui l’on a ‘’lavé le cerveau’’, sont prêts à tout. Ils acceptent de mettre en application les ordres du diable en croyant servir la cause de Dieu pour certains ou en espérant faire fortune pour d’autres », estime le religieux ivoirien, dont le pays a connu des attaques terroristes, en 2016, à Grand Bassam.
« Devant ces entrefaites, les leaders religieux sont sollicités. Ils doivent apporter secours et protection aux jeunes pour leur éviter l’aventure qui conduit sur un chemin sans lendemain. Les leaders religieux sont appelés à « démanipuler » ces jeunes en les humanisant à nouveau. En d’autres termes, les leaders religieux ont pour mission d’éduquer l’âme et le cœur de cette jeunesse, en l’orientant vers son Seigneur, afin de la tirer des mains de ces prédateurs », lance le guide religieux ivoirien.
« La jeunesse étant la frange la plus fragile et la plus vulnérable de nos sociétés, se retrouve au centre de la radicalisation, à l’instar des autres maux que sont : le chômage, l’immigration clandestine, la violence, la rébellion armée, la prostitution et j’en passe. De ce fait, elle est la cible privilégiée et potentielle, facile à manipuler par des recruteurs. Il est donc nécessaire que l’on se tourne vers cette frange de la société afin de la protéger, en la sensibilisant et l’orientant vers un discours cohérent et unique. Celui de la tolérance, la non-violence et de la cohabitation pacifique prônée par l’islam », a-t-il dit.
Selon lui, cela passera par l’implication de tous les acteurs du système éducatif, politique et socio-économique, les parents, l’école, les associations de jeunesse, les femmes et les medias, tous organes confondus.