En réaction à un SMS que je lui avais le 6 février 2017, le Premier ministre Brigi Raffini a apporté un petit éclairage sur le sort réservé par le gouvernement au projet agro-industriel de la société saoudienne Al Horaish, défendu bec et ongle par M. Mairou Ligari, Président du Conseil régional de Diffa. Compte tenu de l'enjeu que représente ce projet, je me permets de rendre publics les échanges que j'ai eu avec le Chef du gouvernement qui, il est important de le savoir, est la seule personne habilitée par la loi à autoriser la signature d'un accord de partenariat public/privé, à travers une lettre de non objection.
Voici en intégralité le message que j'ai envoyé le 6 février au Premier ministre : "Bonsoir Excellence, nous cherchons depuis 2 mois à vous rencontrer au sujet du projet agro-industriel de la Société Fleuve Niger SA à Diffa. A ce jour, toutes nos demandes d'audience ont été vaines; et en dépit de toutes les rumeurs persistantes qui circulent à ce sujet, aucune réaction du gouvernement pour rassurer. En tout cas, s'il plait à Dieu, aucune portion de terre ne sera bradée. Nous osons espérer que vous serez du côté des pauvres". Tchangari
Voici la réponse du Premier ministre envoyée le 8 février 2017 : "Salut, Tchangari. Ce projet est une initiative des élus régionaux de Diffa sous la forme d'un PPP entre la collectivité et l'opérateur saoudien. Toutefois, le gouvernement n'accordera sa non objection que si le projet remplit les conditions légales, s'inscrit dans la politique de développement durable du pays, recueille l'adhésion des populations et enfin après le retour de la paix dans la région". Brigi Raffini.
Au vu de ce message, on peut donc considérer que le projet défendu par Mairou Ligari, Président du Conseil régional, n'a pas encore reçu la non objection du gouvernement; comme nous l'avons d'ailleurs souligné dans notre rapport disponible sur le site web d'Alternative Espaces Citoyens (www.alternativeniger.net). Le message du Premier ministre laisse entendre que, pour le moment, le gouvernement préfère lui-même laisser le tout puissant Président du Conseil régional faire sa danse du ventre; tout en se réservant le droit d'accorder ou non son aval pour la signature d'un accord de partenariat public/privé.
Ainsi, même s'il est déplorable de voir le gouvernement laisser M. Mairou Ligari continuer à battre campagne autour d'un projet dangereux pour les populations et qui ne répond nullement aux conditions de légalité prévues par les lois nigériennes, on peut se réjouir de savoir qu'il n'a pour l'instant que l'autorisation de jaser sur la télévision nationale et d'autres médias qui veulent bien lui tendre leurs micros. En vertu de la liberté d'expression, il peut donc continuer à faire sa campagne de promotion du projet d'accaparement des terres; et il appartient aux élus régionaux de Diffa, aux populations de la région et à tous ceux qui défendent les droits fonciers des communautés locales, de se mobiliser pour mettre en échec ce sinistre projet.
Aujourd'hui, la mobilisation contre ce projet d'accaparement des terres est d'autant plus nécessaire que le message du Premier ministre ne lui ferme pas totalement les portes; bien au contraire, il laisse clairement comprendre que le gouvernement mise en quelque sorte sur le succès de la campagne de Mairou Ligari, pour se décider lui-même; et ce, malgré les arguments multiples qui militent contre la signature d'un accord de partenariat public/privé qui ne fera qu'ouvrir la voie à une spoliation des communautés locales de la région.
En tout cas, les élus régionaux de Diffa ont donc encore la possibilité de se racheter aux yeux de leurs électeurs; eux qui affirment avoir été induits en erreur par celui qu'ils ont choisi pour présider leur assemblée régionale. Quant à nous, nous continuerons, sans relâche, notre combat contre les "accaparateurs" de terres et leurs complices; et si le gouvernement a besoin de preuves pour être convaincu de la non adhésion des populations de la région à ce projet funeste, nous lui suggérons d'organiser un référendum régional sur le sujet.