A quelques jours de la fête de Tabaski, les marchés de bétails d’Agadez sont inondés de moutons qui arrivent de tous les villages de l’AÏR ; mais les clients répondent absents. On ne constate pas un engouement des acheteurs au niveau du marché principal d’Agadez. Pourtant, le mouton pour accomplir ce sacrifice recommandé à tout musulman qui peut ne manque pas, on en trouve pour toutes les bourses de 40.000 FCFA à plus de 100.000 FCFA pour les plus aisés.
Une crise économique
Dans les différents marchés d’Agadez, les revendeurs et intermédiaires ne comprennent pas cette absence de clients. Chaque matin, le bétail et surtout les moutons viennent en quantité et en qualité. BAZO est revendeur ; il confie au journal la NATION : « On ne comprend pas le manque d’afflux des acheteurs ; nous sommes à quatre jours de la fête ; mais les clients sont très rares. Ici j’ai de moutons de 35, 40, 50.000 FCA et même plus mais vous voyez, les clients sont rares ; les quelques-uns qui viennent rodent seulement ; nous posent des questions sur les prix et continuent. C’est vraiment inquiétant ; avant, dans les années antérieures, on arrive à faire un bon chiffre d’affaires à la même période. Certains nous disent les salaires ne sont pas encore tombés ; ils espèrent avoir leur salaire la veille pour payer leur mouton de sacrifice. On espère que d’ici ces trois jours les clients vont venir », conclut BAZO qui nous quitte voyant deux clients venir vers ses moutons.
Un autre revendeur du nom de AGHALI nous confie : « J’ai fait un bon élevage dans l’espoir de gagner un bénéfice ; aujourd’hui ça fait trois jours que je garde mon enclos ici mais les rares clients qui viennent ne répondent pas à mes attentes. Regardez ce mouton bien gras ; les années passées je vendais ce genre de mouton à 90.000 FCFA et même plus ; les premiers clients qui sont venus ce matin veulent ça à 70.000 FCFA ; je ne peux pas céder ça ; les clients nous parlent d’une crise économique ; et je suis d’accord avec eux car depuis le début de cette année, l’argent ne circulait pas comme avant a Agadez. On n’en sait pas les causes mais les gens nous disent qu’ils n’ont pas de travail ; le commerce est timide ; les moutons sont là et on attend. Qu’Allah nous vienne en aide », conclut AGHALI abattu par la situation.
IBILAL est un éleveur venu de la zone de TCHIROZERINE. Il confie au journal la NATION : « J’ai conduit mes animaux à pieds pendant une journée pour venir au grand marché d’Agadez ; ça fait deux jours que je suis là ; je dépense seulement parce que je paye de l’herbe au bétail que j’ai amené ; j’ai choisi parmi les meilleurs de mes animaux mais les prix sont très cassés cette année. Les clients qui se présentent cherchent des moutons à 40.000 FCFA ; moi j’ai des grands que je ne peux pas céder à ce prix ; j’ai vendu quatre à 60.000 FCFA chacun ; je pense que les vendeurs ambulants en sont pour quelque chose. J’attends voir l’évolution de la situation, peut être quand les agents de l’Etat auront leurs salaires ça va marcher ; on le souhaite en tout cas », conclut IBILAL.
SALISSOU est un chef de famille qui est venu payer son mouton, il confie au journal la NATION : « C’est cher, j’ai tenté un mouton à 80.000 FCFA mais les vendeurs refusent ; ce sont de moutons qui n’atteignent pas le prix qu’ils veulent ; ceux qui sont à 60.000 FCFA sont de petits moutons. Les clients ne manquent pas mais les intermédiaires et les revendeurs veulent augmenter les prix, ce n’est pas facile avec la situation actuelle d’Agadez ou rien ne marche ils n’auront pas ce qu’ils veulent. Je veux continuer de négocier pour payer un bon mouton ; ils doivent tenir compte du moment ; j’espère que tout le monde aura son mouton d’ici la fête », conclut-il. A côté de lui un autre nous confie : « Le marché est plein ; les bons moutons sont chers ; ceux qu’ils cèdent à 40, 50.000 FCFA sont petits ; on n’a pas le choix quand on n’a pas le moyen. Vaut mieux payer parce que dès que les salaires tombent, ils vont encore augmenter les prix ; j’ai payé un à 50.000 FCFA », dit-il.
Les vendeurs ambulants, une alternative
Les vendeurs ambulants sont devenus une alternative pour bon nombre de chefs de familles. Mallam ALI était assis à l’ombre d’un hangar quand il a payé son mouton. Il nous confie : « Je ne suis pas allé au marché ; on m’a dit que les bons moutons sont chers ; avec les vendeurs ambulants j’ai eu deux bons moutons à 35.000 FCFA chacun ; le même mouton est vendu à 50.000 FCFA au marché. Je demande aux gens d’être patients et j’espère que ces vendeurs ambulants ne vont pas eux aussi augmenter leurs prix ; cela va permettre à de nombreux fidèles d’accomplir leur sacrifice ».
Ils sont nombreux ceux qui nous ont confié que ces vendeurs ambulants sont une alternative. ISMAEIL est un jeune marié ; il nous confie : « Je me débrouille, il n’y a pas de travail en ville ; j’ai eu la chance de rencontrer ces vendeurs ambulants et j’ai eu un mouton à 30.000 FCFA. C’est petit mais ma famille aussi est petite ; si d’ici la fête je trouve de quoi payer un autre plus grand je veux le faire », conclut le jeune marié.
TAHIROU est un revendeur en ville, il confie au journal la NATION : « Nous partons dans les villages pour payer le bétail et arriver en ville on circule avec, on a des enfants avec nous et tout le monde gagne dans ce commerce ambulant. On nous dit que la commune veut interdire cette vente ; ce n’est pas normal qu’on nous interdise cette vente ; les pauvres arrivent à payer leur mouton grâce à nous ; au marché les prix sont élevés ; avec nous on peut trouver même un mouton de 30.000 FCFA ».
A la commune urbaine d’Agadez, des mesures sont prises pour mettre de l’ordre dans la vente du bétail. Adamou HABI, agent à la mairie, en charge de l’opération confie au journal la NATION : « Ce ne sont pas des nouvelles mesures ; elles existent déjà et on a l’habitude de les appliquer chaque année pour réglementer et assurer l’approvisionnement du bétail dans la commune urbaine d’Agadez. La première mesure concerne les marchands ambulants de bétails ; on ne peut pas tolérer cela du moment où il y a des marchés dans la commune et ils sont en train de salir la ville. La deuxième mesure c’est par rapport aux véhicules de transport de bétails. Ils ne doivent pas rentrer à l’intérieur du marché ; il y a une place réservée pour décharger et même les clients doivent stationner dans des parkings à l’extérieur du marché pour qu’il y ait une fluidité à l’intérieur du marché. Voilà en gros de quoi il s’agit. C’est juste pour mettre de l’ordre dans la vente du bétail et assainir la ville. Ce ne sont pas de nouvelles mesures qui vont à l’encontre des marchands ambulants », conclut M. Adamou HABI.
En attendant, les chefs de familles comptent sur l’appui du bon Dieu pour donner du sourire à leurs enfants.