Les personnes qui ont du fuir leurs foyers à cause de l'insurrection menée par le groupe jihadiste nigérian Boko Haram auront besoin d'une aide humanitaire sur de nombreuses années, a annoncé mercredi l'ONG Conseil Norvégien pour les Réfugiés (NRC).
"Nous serons là pour les dix prochaines années, les donateurs doivent rester dans la course. C'est un marathon", a expliqué Jan Egeland du NRC, contacté par l'AFP.
"Nous entamons la neuvième année de conflit contre Boko Haram. C'est deux ans de plus que la guerre en Syrie, le double de la Première Guerre Mondiale. Il faut réfléchir sur le long terme", a-t-il ajouté.
Le NRC publiait mercredi les résultats d'une étude sur les intentions des 1,8 millions de déplacés dans le nord-est du Nigeria.
Sur les 27.000 personnes déplacées interrogées par l'organisation humanitaire, 86% d'entre elles ont indiqué qu'elles n'étaient pas prêtes à retourner chez elles, citant en majorité l'insécurité comme raison majeure.
Le conflit entre le groupe jihadiste et l'armée nigériane a fait au moins 20.000 morts, et la situation sécuritaire reste extrêmement précaire tout autour du lac Tchad.
La région est dévastée, et les autorités locales de l'Etat nigérian du Borno estiment qu'il faudrait près de 6 milliards de dollars pour reconstruire les maisons, écoles, commerces, infrastructures et communication.
Fin août, des milliers de personnes déplacées qui sont actuellement logées dans un camp à la sortie de Maiduguri, la capitale de l'Etat du Borno, avaient dénoncé leurs conditions de vie et demandé aux autorités à pouvoir rentrer chez elles.
Dix d'entre elles sont toujours en détention pour "troubles à l'ordre public", dans l'attente de leur procès le mois prochain.
L'armée nigériane assure avoir mis fin à l'insurrection jihadiste, mais Boko Haram continue de mener des attaques contre les villages, notamment pour s'approvisionner en nourriture, rendant le retour des personnes déplacées très difficile.
Dans certaines zones, "il n'y a plus une seule âme qui vive", raconte M. Egeland. "S'il n'y a plus personne, c'est Boko Haram qui s'installe et qui rend le retour impossible". "Les autorités doivent rétablir la paix, nous, les humanitaires, devons nous concentrer sur la reconstruction des maisons, des vies, des écoles, des hôpitaux...".
Fin septembre, Human Rights Watch a publié un rapport accablant dans lequel il dénonce le retour forcé de 100.000 réfugiés nigérians, qui s'étaient établis au Cameroun voisin.
"Les retours forcés opérés par le Cameroun violent le principe de non-refoulement, qui interdit le renvoi de réfugiés et de demandeurs d'asile vers des lieux où ils peuvent être persécutés", écrivait HRW.