Tantôt annoncée, tantôt repoussée. 2003, 2005, 2009, 2015, désormais 2020 ; la nouvelle échéance de la monnaie unique de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) rassure de moins en moins, malgré les micmacs des techniciens de la Task Force Présidentielle qui se retrouvent ce jour même à Accra pour proposer une nouvelle feuille de route.
La feuille de route initialement annoncée faisait état d’une opération en deux temps, avec l’introduction de la monnaie unique dans les pays non membres de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) dès 2015, avant une fusion 5 années plus tard avec les Etats de la zone franc d’Afrique de l’ouest.
Son échec avait été constaté en mars 2014 à Yamoussoukro par les experts qui ont tablé pour le tout sur 2020, essentiellement à cause de la complexité du chemin d’une convergencetoujours recherchée.
A la dernière réunion de la Task Force Présidentielle à Niamey en octobre 2017, les chefs d’Etat avaient proposé une approche graduelle privilégiant un démarrage avec les pays qui respectent les critères de convergence.
Mais, comment les Etats de l’UEMOA vont gérer leur politique monétaire dans la période de transition, étant donné qu’ils n’ont pas une expérience d’indépendance monétaire, au cas où d’autres pays de l’union formeraient déjà ce noyau avec d’autres pays de la zone hors UEMOA?
Et s’il faut procéder à un élargissement sélectif de la zone CFA pour englober à terme, l’ensemble des pays de la CEDEAO, quel pays de la zone hors CFA (le Ghana, le Nigéria, le Cap-Vert, la Gambie, le Liberia, la Guinée et la Sierra Leone) accepterait y rentrer, au regard des vives critiques actuelles sur la zone Franc en général ? La question reste posée.
L’on se rappelle encore de la mise en garde faite par le président Nigérian Buhari, quand il appelait à une prudence dans le processus, au regard des disparités économiques des Etats. « Le Nigeria mettra en garde contre toute position qui milite en faveur d’une approche accélérée de l’union monétaire, tout en négligeant les fondamentaux et d’autres questions pertinentes », avait-il fait savoir à la tribune, où il s’était plaint d’une feuille de route non inclusive.
Il est clair que cette « monnaie de rêve » nécessite un mécanisme destiné à faire face aux chocs asymétriques de la région. Bien que le Nigéria soit la première économie de la région, il reste encore un grand aux pieds d’argile, au vue de son économie basée sur les ressources pétrolières dont il n’a pas la maitrise de l’évolution des prix.
Aussi, la faible intégration économique de la région malgré, malgré les quarante ans d’existence de la CEDEAO, ne favorise pas l’intégration financière.
Par ailleurs, même si ces contingences d’ordre technique sont de nature à bloquer le processus de cette monnaie, la bonne foi politique des chefs d’Etat est également mise à l’épreuve.
Comment les Etats membres de l’UEMOA, avec un franc cfadéjà relativement stable, vont se départir de leur monnaie coloniale, et tourner ainsi le dos à l’ancienne métropole ? Comment le Nigéria, première puissance de la région, parviendrait-il à trouver un consensus avec le Ghana et d’autres Etats encore, sur la gestion des réserveset sur la paternité de la monnaie ?
Autant de facteurs qui pourraient repousser la concrétisation de ce noble projet aux calendes grecques.