Le groupe jihadiste Boko Haram, qui a attaqué lundi un internat pour filles à Dapchi, dans le nord-est du Nigeria, mène une lutte armée dans la région du lac Tchad depuis 2009 et s'est affilié au groupe Etat islamique (EI) en 2015.
Ses offensives ne se cantonnent pas au Nigeria dont il est originaire, mais se prolongent au carrefour du Niger, du Tchad et du Cameroun. A l'origine de nombreux raids et attentats-suicides souvent menés par de jeunes adolescentes, Boko Haram utilise aussi les kidnappings de masse comme mode de recrutement.
- Une secte radicale -
Boko Haram signifie "l'éducation occidentale est un péché" en haoussa, la langue la plus parlée dans le nord du Nigeria. C'est à l'origine le surnom "populaire" qui a été donné à la secte radicale Jama'atu Ahlis Sunna Lidda'Awati Wal-Jihad, qui signifie "ceux engagés auprès du Prophète pour la prédication et le jihad".
Dans les années 1990, les prêches de son fondateur, Mohammed Yusuf, drainent de plus en plus de fidèles à Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno (nord-est). Mais on considère que Boko Haram est né en 2002, quand Yusuf commence à attirer l'attention des autorités.
Prônant un islam radical, il accuse les valeurs occidentales, instaurées par les colons britanniques, d'être responsables des problèmes du pays (indépendant depuis 1960).
Il séduit la jeunesse sans travail de Maiduguri et plus largement du nord-est du Nigeria, critiquant le régime central d'Abuja, gangréné par la corruption, qui néglige le développement socio-économique de la région, majoritairement musulmane.
- La répression, un tournant -
En 2009, éclatent des affrontements entre Boko Haram et la police à Maiduguri. L'armée tue 700 personnes et capture Yusuf, exécuté sans jugement.
Le mouvement devient clandestin, ses cadres rescapés s'enfuient à l'étranger. Abubakar Shekau, bras droit de Yusuf, lui succède.
A leur sortie de clandestinité, les mouvements jihadistes internationaux sont en pleine expansion, rassemblés derrière Al-Qaïda. Abubakar Shekau ne veut plus seulement faire appliquer la loi islamique au Nigeria, mais s'engage à déstabiliser l'Etat avec une campagne de violences, de conversion en masse et de terreur.
S'ensuit une escalade de la violence, avec des dizaines d'attaques faisant plusieurs milliers de morts, prenant pour cibles des écoles, églises, mosquées et symboles de l'Etat et les forces de l'ordre, principalement dans le nord et le nord-est.
- Essor et allégeance à l'EI -
L'enlèvement en avril 2014 de 276 adolescentes d'un lycée de Chibok (Etat de Borno), dont 57 se sont enfuies juste après, confère une notoriété mondiale à Boko Haram. Depuis, 107 ont été relâchées, échangées contre des prisonniers ou se sont échappées.
En août, Boko Haram proclame un "califat" dans les zones sous son contrôle, comme l'EI en Irak et en Syrie.
L'organisation engrange les conquêtes territoriales dans le Nord-Est, qui devient inaccessible. En mars 2015, elle fait allégeance à l'EI.
- Revers mais menace persistante -
Une contre-insurrection menée depuis 2015 par les armées de la région (Nigeria, Tchad, Cameroun, Niger) a permis de chasser les jihadistes de la plupart des localités dont ils s'étaient emparées. Mais les attaques sanglantes restent quasi quotidiennes.
Boko Haram connaît des divisions internes. En août 2016, l'EI désigne unilatéralement un nouveau chef, Abou Musab Al Barnaoui, fils du fondateur de Boko Haram, un camouflet pour Shekau.
La faction rivale, celle de Shekau, lance surtout des attaques contre les civils, tandis que celle d'Al Barnaoui vise plutôt les militaires.
L'insurrection a fait depuis 2009 plus de 20.000 morts et 2,6 millions de déplacés et a généré une terrible crise humanitaire.
La justice nigériane a démarré en octobre 2017 des procès de masse de membres présumés de Boko Haram, dont plusieurs centaines ont été libérés faute de preuves suffisantes. Plusieurs dizaines ont été condamnés à des peines de prison.