Assalam, Albarka, Lakal kaney, Doubaï, Madina, !Niamey compte aujourd’hui une multitude, en tout cas pas moins d’une quinzaine de marchés privés. Crées à la faveur de la libéralisation du secteur, ces marchés appartenant à des particuliers, ces marchés sont paradoxalement situés aux alentours du grand marché, souvent à quelques mètres du célèbre Habou béné. Certains marchés sont construits en hauteur et tous présentent les caractéristiques des marchés modernes disposant en leur sein de nombreuses boutiques. Les mêmes produits vendus au grand marché se retrouvent à Albarka, Doubaï, Madina, Assalam et dans bien d’autres marchés. Pourquoi alors tous ces marchés ? Selon Monsieur Abdou Ibrahim, directeur des études et de la programmation au ministère du Commerce et de la promotion du secteur privé, « depuis les années 2000, on constate effectivement une prolifération des marchés privés à Niamey. Ce phénomène, relève de la motivation manifeste des opérateurs économiques souhaitant se réaliser dans le secteur privé dans le but de la création des richesses et des emplois. Cela a suscité un effet d’entrainement après les essais des tous premiers marchés crées». Aujourd’hui dans la ville de Niamey, le nombre de marchés privés est évalué à environ 15. Il faut ajouter selon le directeur des études et de la programmation du ministère en charge du commerce, 10 autres qui sont en voie de création.
En réalité, les perspectives sont beaucoup plus importantes en matière de création de marchés au Niger. En effet, en plus des privés, il faut ajouter les marchés publics dont la création selon M. Abdou Ibrahim entre dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de la Renaissance acte II du Président de la République. « Ainsi, pour améliorer le cadre du développement des activités commerciales du Niger en général, il est prévu la construction de cent (100) marchés dont sept (07) modernes dans les chefs lieux des régions. D’ores et déjà deux (02) nouveaux marchés ont vu le jour notamment le marché centrale de Maradi en 2015 et le Marché Dolé de Zinder en 2017 », précise le directeur des études et de la programmation au ministère en charge du commerce.
« Tous ces marchés sont gérés par la mise en concession des sociétés anonymes mises en place à cet effet qui sont évidement dotées de Conseils d’Administrations ». Pour la création des marchés privés, les promoteurs s’adressent au Ministère en charge du commerce pour avis. « Mais le contrôle de la construction doit être assuré par le Ministère de Domaine et de l’habitat. Le mode de gestion adopté à ce niveau ne peut être que la gestion déléguée par le promoteur sous le contrôle de la collectivité », précise M. Abdou Ibrahim.
Incontestablement ces marchés font le bonheur des consommateurs qui ont désormais l’embarras du choix pour faire leur shoping. Infrastructures modernes, ils contribuent aussi à donner une belle image à la capitale. Pour toutes ces raisons et bien d’autres, la création des marchés privés est à encouragée. C’est dans cet esprit que travaille le Ministère du Commerce et de la Promotion du Secteur Privé qui est responsabilisé pour la mise en œuvre des politiques publiques du Niger en matière de Commerce et de Promotion du Secteur Privé, a ajouté M. Abdou Ibrahim. Il précise que le Projet Annuel de Performance (PAP) de son ministère porte sur trois programmes et apporte, conformément à la vision du gouvernement, des réponses adéquates aux besoins des populations de nos villes et campagnes. Ce notamment à travers la lutte contre la vie chère ; l’amélioration des conditions d’accès aux marchés ; la disponibilité et l’accessibilité en quantité et en qualité des produits de première nécessité ; le développement des exportations des produits agro-sylvo-pastoraux et halieutiques ; le développement des initiatives privées et des Petites et Moyennes Entreprises compétitives ; le développement des investissements dans le domaine agrosylvo-pastoral et halieutique ; etc. Pour une bonne création et gestion des marchés, M. Abdou Ibrahim exhorte les promoteurs à respecter les dispositions légales et réglementaires des procédures de création et de gestion des marchés ; créer les conditions d’une meilleur mobilisation des ressources à travers des services de perception performants ; restaurer les conditions d’une meilleur hygiène à travers un entretien permanent du marché (nettoyage quotidien, lavage du marché et curage des caniveaux) ; sécuriser les biens et les personnes (poste de police et de sécurité, infirmerie, assurance des infrastructures, matériel d’incendie, vidéo surveillance, station d’épuration etc).
C’est dire que les difficultés dans la gestion actuelle de certains marchés privés semblent freiner les ambitions de nombre de promoteurs.
Idé Fatouma
Les autorités nigériennes ont fait de la promotion du secteur privé, une des priorités du programme de développement national. Le but est de faire du secteur privé nigérien, un levier important pour le développement socioéconomique du pays. Beaucoup de compatriotes ont compris et saisi cette opportunité. C’est pourquoi, le pays enregistre de plus en plus la création et l’ouverture de nouvelles entreprises et sociétés. C’est le cas des marchés privés dans la ville de Niamey. Ces marchés sont dotés d’infrastructures modernes, adéquates et des dispositifs sécuritaires conformes aux normes et standards en la matière. Une belle et excellente opportunité offerte aux nigériens, que beaucoup n’ont pas hésité à saisir.
Mais après quelques années, ces marchés font face à de sérieux problèmes. Les gérants de certains marchés évoquent comme difficultés la non occupation des boutiques par les commerçants et le départ progressif d’autres commerçants qui vident le marché pour non-paiement des frais de location des boutiques.
Au Marché Assalam
Créé en 2010 par M. Ibrahim Adamou, le Marché Assalam a une capacité d’environ 500 boutiques. Aujourd’hui plus de 200 boutiques sont fermées, dont certaines depuis 2014, pour manque de locateurs. Depuis 2016, ce marché a été racheté par la ville de Niamey. Mais à cette date la gestion du marché reste toujours dans les mains de son promoteur car, la mairie n’a pas versé l’argent. « On attend que la Mairie verse l’argent et on lui livre le marché. Le processus est en cours. Nous avons reçu la visite de plusieurs responsables de la Mairie, mais jusqu’à présent, il n’y a aucun signe. Si aujourd’hui même on m’annonce le versement de cet argent je cède la gérance à celui que la Mairie aura désigné », a indiqué M. Alkassoum Amadou gérant dudit marché.
Il a indiqué que c’est un marché construit dans le respect de toutes les normes surtout de sécurité. Au début de son ouverture, le marché était bien animé. « Les commerçants se bousculaient même pour avoir des boutiques il n’y en avait pas. Parce que les frais de locations sont très abordables (3000 à 12000 FCFA selon la catégorie de boutiques)», a-t-il souligné.
Se prononçant sur la désertion du marché par les commerçants, M. Alkassoum Amadou dit ne pas comprendre cette attitude. Il n’y a aucune raison valable. Mais il a indiqué que selon sa compré- hension, les gens préfèrent aller s’installer aux abords des routes sur les territoires.
Aujourd’hui, dans le marché, il y a moins de 100 locataires dont la plupart sont des déguerpis de l’année dernière.
Mais à la question de savoir pourquoi avec même avec le déguerpissement, le marché compte encore des centaines de boutiques fermées, M. Alkassoum Amadou dit encore ne pas connaitre les raisons, alors que d’avance les autorités régionales ont demandé aux proprié- taires des marchés privés d’accorder des facilités d’hébergement à ces commerçants déguerpis, « chose que nous avons fait, mais c’est seulement quelques-uns qui ont accepté de venir », a-t-il précisé. M. Alkassoum Amadou n’a pas manqué de lancer un appel à tous ceux qui sont intéressés par le marché Assalam, de venir il y a des boutiques libres et abordables.
Selon certains commerçants les raisons du non-retour des déguerpis sont autres. M. Rabani Syna, un des premiers habitants de ce marché depuis son ouverture, a précisé que les conditions qui ont été fixées ne permettront aux commerçants de venir s’installer dans ce marché. « On a appris qu’il leur a été demandé de payer les arriérés des anciens occupants avant de s’installer. Sur certaines boutiques ces arriérés s’élèvent à150 000 ; 200 000 FCFA voir plus. Et les gens ont renoncé, parce que ce n’est pas normal qu’on demande à quelqu’un de payer une dette qu’il n’a pas contractée », a-t-il dit.
Entre temps, M. Rabani Syna a indiqué qu’il y a des boutiques qui ont connu 5 à 10 locataires en l’espace de moins d’un an. Les raisons, souligne-t-il, sont liées au manque de la clientèle. « Depuis que les commerçants ont commencé à quitter le marché, certaines marchandises se font rares. Un client qui fait deux à trois tours dans un marché sans satisfaction ne reviendra pas pour une quatrième fois. Voilà la situation qui caractérise ce marché », dit M. Rabani Syna.
Il y a des commerçants qui font des semaines sans rien vendre parce qu’il n’y a pas de clients. « Nous, nous avons choisi de rester dans ce marché malgré le manque de clients, parce que nous savons que la place d’un commerçant se trouve dans un marché et non sur la route. Beaucoup de personnes sont venues me proposer des emplacements dans la ville, mais je savais que tôt ou tard, les commerçants qui occupent ces trottoirs seront déguerpis », souligne-t-il. Il a indiqué enfin qu’il y a des commerçants qui prennent des boutiques mais qui ne les occupent pas.
Moustapha Koka un des commerçants victimes du déguerpissement de l’année passée, se réjouit quant à lui de son emplacement dans ce marché Assalam, qu’il trouve impeccable et sécurisé. Lui aussi se plaint du manque de la clientèle, qui selon lui est dû au manque de certaines marchandises dans le marché. Il a lancé un appel au commerçants qui n’ont pas encore trouvé d’emplacement de venir au marché Assalam.
Marché Doubaï
Situé aux abords du grand marché de Niamey, le marché Doubaï a ouvert ses portes en avril 2015. Il a une capacité d’une cinquantaine de boutiques. Ce marché est géré par M. Hamadou Idé. Présentant la situation de son marché, le gérant a indiqué qu’il n’a pas de boutiques non occupées. « Mais, cela ne veut pas dire que nous n’avons pas de problèmes », dit-il.
La principale difficulté, a indiqué M. Hamadou Idé est liée au paiement des frais de location des boutiques. « Nous avons beaucoup de commerçants qui ont des impayés. Certains ont une dizaine de mois d’impayés. On ne peut pas les chasser parce que nous avons pris un engagement avec les autorités, mais aussi, même s’ils sont chassés ils n’ont pas là où aller», déplore M. Hamadou Idé. Il a souligné qu’avant les déguerpissements, le gouverneur de Niamey a réunis tous les promoteurs des marchés privés autour de lui et leur a demandé de trouver de la place pour les commerçants déguerpis. Tous les gérants ont répondu favorablement à cette demande du gouverneur et ont donné des possibilités à ces commerçants pour qu’ils s’installent. M. Hamadou Idé a souligné que si les gérants ne recouvrent pas les frais des locations des boutiques, ils ne seront pas aussi à mesure de payer les impôts et autres taxes à l’Etat. Pour le gérant cette situation, selon certains commerçants, est liée à la mévente ou au manque de clientèle, du fait de la cherté des produits, tributaire des taxes et frais d’exploitation. Face à cette situation, M. Hamadou Idé a lancé un appel à toutes les parties, Etat et commerçants, pour qu’une solution, durable soit trouvée afin de donner des possibilités à l’émergence des activités économiques et commerciales dans le pays.
M. Hamadou Idé a indiqué que « même si pour des raisons sociales nous ne voulons pas faire partir ceux qui ne sont pas en règle, le promoteur est obligé de le faire et cela conduira à la fermeture du marché. Il n’est pas facile que nous continuons à payer des taxes que nous nous ne percevons pas ».
M. Hamadou Idé a indiqué aussi que ce problème de difficulté à régler les loyers est dû au fait que, certains commerçants ont pris des boutiques qui dépassent leur capacité. Aujourd’hui, ce marché va lui aussi connaitre l’abandon des boutiques.
Le marché Madina
Un nouveau marché qui n’est pas encore ouvert, et le gérant n’a pas voulu se prononcé sur la situation de son marché. Un tour dans le marché nous a permis de constater une forte disponibilité des boutiques mais fermés.
Ce reportage a permis de comprendre que, il y a encore des boutiques dans plusieurs marchés, publics et privés de la capitale. Par conséquent, beaucoup de commerçants et gérants des marchés, trouvent incompréhensible la présence encore des commerçants sur certains trottoirs et certains lieux non réglementaire.