Cela fait un bon bout temps qu’on ne l’avait pas entendu sur les médias. Et quand il décide de le faire, cela crée forcément l’évènement. Lui, c’est Hassoumi Massaoudou, le ministre des Finances mais aussi secrétaire général du PNDS Tarrayya. Au lendemain du 7e congrès ordinaire du parti au pouvoir, les 24 et 25 mars à Niamey, Hassoumi Massaoudou a animé un point de presse à son cabinet en présence des journalistes de la presse nationale et internationale. Et comme à son habitude, il n’a rien perdu de la verve qu’on lui connait et qui fait sa marque de fabrique c'est-à-dire toujours direct, à l’occasion agressif et parfois arrogant. Du Massaoudou donc durant tout le point de presse, « une conversation à bâtons rompus » selon ses propres mots, et au cours duquel il a passé en revu plusieurs sujets brulants de l’actualité nationale, jonglant entre son statut de ministre et sa casquette de dirigeant politique.
C’est à travers les questions des journalistes que Hassoumi Massaoudou a passé en revue la situation politique et socioéconomique du pays. De la vie de son parti, à l’affaire Asusu (voir Actuniger) en passant par la loi des finances 2018, les prochaines échéances électorales, les défis et les enjeux du mandat ainsi que les derniers faits de l’actualité notamment la manif réprimée du dimanche dernier, il n’a occulté aucun sujet. Droit dans ses habitudes comme à son habitude, le ministre Massaoudou s’est livré à un exercice qui lui aurait visiblement manqué tant il semblait avoir des choses à dire !
Bien que le point de presse n’ait duré qu’une bonne heure, Massaoudou a beaucoup dit ! Dans le compte-rendu que nous vous proposons à travers cet article, assez long il faut l’avouer, nous avons essayé de reproduire fidèlement les grands axes des faits majeurs développés par le ministre et secrétaire général des camarades roses. Nous avons pris la latitude d’ajouter notre propre analyse, laquelle a été agrémentée d’un chouia d’ironie pour en facilité « la digestion » et surtout en fixé le contexte car toutes les déclarations et explications du ministre étaient des réponses aux questions de nos confrères.
Du 7e Congrès du PNDS, du président Bazoum et des alliés
Le 7e Congrès du PNDS Tarrayya s’est achevé sous de bons auspices avec la réelection de Bazoum Mohamed, candidat unique qui a fait donc consensus. Rien donc des tensions annoncées par ce qu’il considère comme «les illusions des cassandres » mais qui pour Hassoumi Massaoudou, n’a pourtant rien d’une surprise mais traduit plutôt le respect des valeurs sur lesquelles le parti a été fondé et qui ont depuis fait sa force. « Chez nous au PNDS, notre culture est basée sur les valeurs de confiance, de loyauté et de consensus » a mis en avant le secrétaire général du parti rose qui a fait savoir que ce sont ces mêmes principes qui prévalu lors du dernier Congrès. « C’est un processus longtemps préparé à l’avance. Le résultat que vous voyez n’est que l’aboutissement d’une démarche » a-t-il poursuivi et estimant par la même occasion que « le président Bazoum mérite toute la confiance des camarades du PNDS ».
« Ceux qui attendent des bouleversements peuvent toujours attendre, ils auront pour leurs frais » s’était même permis de mettre au défi le ministre Massaoudou qui annonce les couleurs pour les prochaines années et surtout échéances électorales. « Nous allons nous battre pour que nos prochains résultats soient encore meilleurs » a ajouté le SG du PNDS. Avec toutefois une touche de prudence afin certainement de ne pas insulter l’avenir mais aussi et surtout de ménager les alliés. « Nous vaincrons avec nos alliés avec qui nous allons renforcer nos relations et cela a d’ailleurs été une des résolutions de notre dernier congrès » a jugé utile d’ajouter Hassoumi Massaoudou.
En parlant justement des prochaines élections, Hassoumi Massaoudou est largement revenu sur les ambitions de son parti. Autant le dire, c’est plutôt des prétentions même des camarades roses si l’on en juge par le degré d’optimisme avec lequel il a évoqué les prochaines échéances. « Nous travaillons pour réussir l’alternance démocratique et nous nous battrons pour que le prochain président élu soit des nôtres, de notre parti » a résumé Massaoudou. Il en donnera les détails par la suite comme vous allez le voir, mais cette déclaration en est le condensé par excellence. Les mots sont pesés, les groupes de mots réfléchis.
Il fallait s’y attendre aussi et il ne l’a pas échappé, en parlant des prochaines élections générales, Massaoudou savait qu’il devrait évoquer la question de la succession du président Issoufou et donc forcément de son probable successeur. Sur ce dernier, et tout ce qu’il a dit, c’est « qu’il sortira des rangs du PNDS » puisque le parti va se battre pour la réussite de ce scénario déjà tracé d’avance puisque, chez les roses, et c’est lui qui l’a dit, « tout est préparer à l’avance ! ». On serait tenté d’ajouter que ce qu’on verra ne sera que « l’aboutissement d’une démarche » mais passons puisqu’on ne peut faire le reproche à un parti de vouloir gagner une élection ! Au passage, on aura compris que, comme l’a dit le président Issoufou Mahamadou lui-même et à plusieurs reprises, dans le scénario du PNDS, il y aura un passage de témoin et donc Issoufou ne se représentera pas pour un 3e mandat. C’est bon à rappeler même si cela ne va pas convaincre les sceptiques les plus avérés qui font pourtant preuve sur cet aspect, d’un réalisme des plus sages car « chat échaudé craint l’eau froide ». Ce n’est de toute façon pas la tasse de thé des camarades qui, à en croire Massaoudou, se préparent d’autant qu’ils ont un bilan à défendre. Il va falloir donc réussir celui qui est en cours et pour cela, le PNDS en a fixé trois priorités. La première et la plus importante, c’est « la stabilisation de l’Etat à travers la consolidation des institutions dans le respect des libertés publiques ». C’est Hassoumi Massaoudou qui le dit et s’en explique : « c’est pour que pour la première fois dans l’histoire de notre pays, qu’il y’ai une alternance démocratique c’est-à-dire qu’un président élu passe le témoin à un autre président élu ». A en croire Massaoudou, c’est même « le grand challenge du président Issoufou Mahamadou et le PNDS Tarayya se battra pour que cela soit possible». En français facile cela veut dire que : le PNDS va se battre pour réaliser le vœu le plus cher du président, celui de quitter le fauteuil à la fin de son second et dernier mandat ! Il est vrai que cela fait « LOL » mais ce n’était pas sur Facebook, Massaoudou l’a bien dit!
La seconde priorité selon Massaoudou, c’est la question sécuritaire. Il s’agira selon lui, de poursuivre le combat contre toutes les menaces sécuritaires qui planent sur notre pays en renforçant les capacités opérationnelles des Forces de défense et de sécurité (FDS) conformément à l’engagement des autorités qui a permis à ce jour, d’enregistrer « des succès éclatants » dans la lutte contre les groupes terroristes et les trafiquants de tout acabit. « C’est trop cher et ça nous coûtera beaucoup mais ce prix-là, on le payera quel qu’il soit et au détriment de quoi que ça soit mais on le payera parce que pour vivre il faut survivre » devrait poursuivre l’ancien ministre de l’Intérieur et de la Défense qui est actuellement à la tête des finances. Autant dire un fin connaisseur du dossier…
La troisième et dernière priorité des priorités c’est « de renforcer la résilience de notre pays face aux chocs climatiques c'est-à-dire poursuivre les efforts pour assurer la sécurité alimentaire conformément au vœu du président de la République.
Pour ceux qui retrouveraient à dire sur les résultats enregistrés sur les 7 dernières années, Hassoumi Massaoudou a la réponse toute prête : « nous sommes à l’aise avec le bilan du président, pour le défendre et le soutenir encore ».
Loi des finances et contestation de la société civile
Le ministre des Finances l’avait auparavant dit : « il n’est pas question pour le gouvernement de revenir sur les dispositions de la finances 2018 ». Lors de son point de presse du lundi, Hassoumi Massaoudou est allé encore plus loin : il n y a rien à négocier ! « Je ne vois pas quoi négocier ou avec qui » s’est défendu le ministre pour qui « la loi a déjà été adoptée par le Parlement et en amont des discussions ont eu lieu avec la Chambre de commerce et les centrales syndicales ». D’ailleurs, a fait remarquer Massaoudou, « depuis l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi des finances, il n y a pas eu de pression inflationniste ». « De toute les façons, ce n’est pas la loi des finances qui est en cause dans ces manifestations mais la légitimité mêmes des autorités actuelles dans la logique des adversaires de dégager des détracteurs du régime et ça ce n’est pas négociable » a réitéré le ministre Massaoudou. Il nous parait inutile de préciser ici l’identité des adversaires en question auxquels a fait régulièrement cas le ministre et surtout pour le compte de qui puisque pour une fois il n’a pas cité de nom !
La sortie médiatique du ministre des Finances et secrétaire général du PNDS Tarrayya est intervenu le lendemain de la manifestation interdite de la société civile du dimanche 25 mars qui a été fortement réprimée par les forces de l’ordre avec à la clé, l’interpellation d’une vingtaine de manifestants dont les principaux acteurs du mouvement. Pour Massaoudou, « le gouvernement n’a fait que respecter la loi». Selon le ministre, « que des gens contestent la loi des finances comme toutes les autres lois, c’est leurs droits. Mais de là à ce que les gens aillent à l’encontre d’une décision des autorités, ce n’est pas acceptable ». Par conséquent, pour Massaoudou, « le gouvernement n’a fait que son devoir de garantir l’ordre public car force doit rester à la loi ». Donc, « si une manifestation est interdite, il faut respecter cette décision ». Le ministre va jusqu’à faire savoir même qu’aucune mesure exceptionnelle n’a été prise pour la marche du dimanche dernier, « ce ne sont que des mesures naturelles donc normales de maintien de l’ordre public ».
Sur la liberté de presse et malgré la fermeture du groupe de presse Labari, le ministre Massaoudou est catégorique : on ne peut pas faire à leur régime un procès d’intentions en la matière. « Je ne pense pas qu’il y ait dans la sous-région, un pays où la liberté d’expression est aussi consacrée qu’au Niger » a estimé le ministre qui en plus des l’argument sur le foisonnement des organes de presse au pays a surtout insisté sur « le ton outrancier » de certains médias et surtout le « caractère parfois impertinent de la presse écrite ». Les journalistes présents au point de presse auront certainement apprécié ! Pour rappel, même si les médias sont venus en masse pour la couverture de l’évènement, une partie de la presse nationale a décidé de boycotter depuis un certain temps les activités du ministre pour justement ce qu’il en pense du 4e pouvoir. Ce qui n’a pas empêché le secrétaire général du PNDS de rappeler ses appréciations qui sonnent plus comme des convictions pour lui. Du Massaoudou on vous a dit !