La signature de l'Accord sur la Zone le Libre-Échange Continentale (ZLEC), a suscité de grands espoirs sur le continent africain. Mais pour récolter le dividende économique tant espéré, nous devrons pacifier le continent. L'instabilité est en effet une puissante entrave aux échanges commerciaux.
D'une certaine façon, le continent est en cours de pacification. D'après le Centre pour la Paix Systémique, le niveau d'intensité des conflits et des guerres est aujourd'hui plus faible que dans les années 1990. En clair, lorsqu'ils se produisent, les conflits sont en moyenne moins meurtriers - il faut s'en réjouir.
En réalité le grand changement réside dans le nouveau visage de la violence sur le continent : les conflits armés tendent à se réduire (aujourd'hui ils se concentrent essentiellement dans quatre régions : le Sahel et l'Afrique du Nord, l'Afrique Centrale, la Corne de l'Afrique et les Grands-Lacs) au profit d'émeutes populaires, de contestations politiques, de violences associées au crime organisé.
"La Force Conjointe G-5 Sahel, créée pour répondre aux défis sécuritaires dans la région du Sahel, progresse. Cette Force Conjointe est maintenant opérationnelle, avec le soutien de l'UE, de la France, de l'Arabie Saoudite, des EAU, de l'ONU et des États-Unis."
La prolifération de groupes terroristes pose un risque particulier au continent. Extrêmement déterminés, mobiles, souvent aguerris, correctement financés et suffisamment armés, ils fragilisent les États, déstabilisent des régions entières, perturbent la vie économique. Face à cette menace d'un nouveau type, les gouvernements africains ont été contraints de joindre leurs forces. Malgré d'innombrables difficultés et défaillances, certaines alliances ont porté des fruits : la Force Multinationale Mixte (FMM), constituée de soldats du Cameroun, du Nigeria, du Tchad et du Niger a ainsi considérablement affaibli la secte islamiste Boko Haram - au passage elle a prouvé la capacité des pays africains à assurer leur défense. Pour autant, les défis demeurent La Force Conjointe G-5 Sahel (FC-GSS), créée en 2017 dans le cadre du G-5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad), pour répondre aux défis sécuritaires dans la région du Sahel, progresse. Cette Force Conjointe est maintenant opérationnelle, avec le soutien de l'Union Européenne, de la France, de l'Arabie Saoudite, des Émirats Arabes Unis, des Nations Unies et des États-Unis. Mais son succès dépendra de la disponibilité de fonds durables et prévisibles pour la Force Conjointe et les pays du G-5 Sahel impliqués dans cette initiative. Les efforts militaires et sécuritaires devraient également être accompagnés d'activités de développement et de mobilisation afin de s'assurer que la radicalisation soit combattue en profondeur. La voie d'une meilleure sécurisation du continent passe par l'appropriation des questions de sécurité par nos états. Bien sûr, toute collaboration est bienvenue en la matière, mais les pays africains doivent être les principaux financiers de leur défense — pour l'instant, c'est trop rarement le cas. Ils doivent également être à l'initiative des projets visant à restaurer l'ordre dans nos pays. Enfin, de meilleures politiques publiques et une gouvernance à la fois plus inclusive et plus rigoureuse, permettraient à terme de réduire les tensions de nature politique. Le retour sur investissement serait considérable.
Maman S. Sidikou, Secrétaire permanent du G-5 Sahel