Monsieur le Président de la Commission Européenne ;
Mesdames et Messieurs.
Je voudrais, Monsieur le Président, vous remercier et vous exprimer toute la gratitude du Gouvernement et des populations nigériennes pour l’honneur que vous faites au Niger, en m’invitant à la douzième édition des Journées Européennes du Développement.
Les thèmes retenus pour cette édition et qui portent sur la nécessaire, entière et égale participation des femmes et des jeunes filles au processus du développement socio-économique et politique de nos pays sont très pertinents. Ces thèmes cadrent parfaitement avec les objectifs de développement durable fixé par les Nations Unis pour l’horizon 2030.
La participation des femmes, qui représentent la moitié de la population mondiale, reste toujours en deçà de ce qu’elle devrait être malgré un engagement international fort, dont la conférence de Beijing constitue un repère important, et cela du fait des difficultés à donner plein effet aux décisions qui sont prises.
Je voudrais partager avec vous la situation du Niger, ses expériences en matière de promotion de la participation des femmes et des jeunes filles au développement ainsi que les perspectives du pays dans ce domaine.
Mesdames et Messieurs,
Au Niger, les femmes représentent 50,3% de la population. Elles sont donc légèrement plus nombreuses que les hommes. Les défis de l’égalité de genre, de l’autonomisation et de l’implication des femmes et des filles dans le processus du développement durable se posent aujourd’hui encore avec beaucoup d’acuité.
Ainsi en matière d’accès à l’éducation et à l’alphabétisation, les inégalités de genre persistent. En 2015-2016, il existe un écart de plus de 12 points entre le taux brut de scolarisation des garçons et celui des filles dans le primaire et le secondaire.
En ce qui concerne la santé notamment la santé de la reproduction, l’entrée en union chez les femmes reste extrêmement précoce par rapport à leurs collègues hommes du même groupe d’âge, engendrant des grossesses précoces et un indice synthétique de fécondité des plus élevés du monde.
S’agissant de la participation des femmes dans le secteur économique, il ressort clairement une inégale répartition des rôles et des responsabilités dans la division du travail, ainsi que des difficultés dans l’accès, la gestion et le contrôle des ressources. Le taux d’activité est d’environ 40% pour les femmes contre 90% pour les hommes. Ainsi 60% de femmes n’ont aucune activité professionnelle, aucun emploi et n’en recherchent pas, ce qui justifie leur forte proportion dans les personnes vivant sous le seuil de pauvreté car trois pauvres sur quatre sont des femmes.
En ce qui concerne la participation de la femme au niveau de la prise de décision, il est à noter une disparité hommes-femmes dans toutes les structures de prise de décision. Le pourcentage de femmes de la catégorie « cadres supérieurs » est nettement plus faible que celui des hommes.
L’inégalité de genre et la pleine participation des femmes et des jeunes filles au développement sont par conséquent des sujets de préoccupation pour le Niger et n’ont pas échappé à l’attention de notre gouvernement dans la formulation des politiques publiques. Les réformes qui ont été mises en œuvre et celles qui sont prévues dans les différents programmes visent à un changement positif et radical de la situation socioéconomique des filles et des femmes relativement à l’éducation, à la santé, à leur rôle dans l’économie et à la prise de décisions. Ces quatre secteurs sont en effet ceux dans lesquels existent les défis les plus persistants pour réaliser l’objectif d’une participation adéquate des femmes au développement.
La mise en œuvre de ces politiques et programmes a permis de contribuer fortement à une amélioration des conditions de vie des femmes, comme l’indiquent les principaux indicateurs sociodémographiques du Niger en 2017. Nous avons à cet égard enregistré une baisse importante de la mortalité des enfants de moins de cinq (5) ans, une amélioration du taux de fréquentation scolaire des jeunes filles et une baisse de l’indice synthétique de fécondité. Cet Indice, qui était resté stable depuis plus de 20 ans, a baissé de manière considérable ces dernières années, passant de 7,6 enfants par femme en 2012, à 6 enfants en 2017.
Mesdames et Messieurs
Les efforts entrepris par le gouvernement nigérien durant la période 2011-2016 seront poursuivis dans le cadre de la mise en œuvre de notre Plan de Développement Economique et social, PDES 2017-2021.
En matière d’éducation, l’objectif est double : relever le niveau global d’éducation de la population et réduire les écarts de fréquentation scolaire entre les garçons et les filles. Pour cela tout en renforçant la qualité de l’éducation, le PDES met un accent particulier sur l’éducation des jeunes filles et leur accès à la formation professionnelle et technique. A travers des mesures législatives, règlementaires et les incitations diverses, les filles seront maintenues à l’école jusqu’à l’âge de 16 ans (loi d’orientation du secteur éducatif, décret relatif à la protection de la jeune fille scolarisée, bourses d’études, internats et soutien alimentaire etc..). Elles seront ainsi mieux préparées pour des emplois dans le secteur moderne. Le maintien des jeunes filles à l’école jusqu’à l’âge de 16 ans, permet de mettre fin aux mariages et aux grosses précoces. Selon une étude de la Banque Mondiale, l’élimination du mariage et la maternité précoces engendrerait un bénéfice annuel estimé à 5 point du PIB d’ici 2030 soit 1,7 milliards de dollars.
Compte tenu de la forte proportion de femmes analphabètes et déscolarisées, un programme d’alphabétisation fonctionnelle a été conçu spécifiquement pour elles afin de rattraper le retard accumulé.
En matière de santé, les programmes du PDES mettent l’accent sur l’accès des populations aux centres de soins primaires, la couverture vaccinale généralisée pour les nourrissons, la santé maternelle et reproductive. L’objectif visé est d’amorcer rapidement la transition démographique à travers une baisse du taux de fécondité et du taux de natalité. Dans ce cadre, des actions de sensibilisation et de formation en direction des femmes, de leurs époux, des leaders religieux et des chefs traditionnels et qui ont déjà démontré leur efficacité seront généralisées et renforcées. C’est le cas pour l’école des maris, un des programme pilote du Niger qui connait beaucoup de succès.
En matière d’hydraulique villageoise et urbaine, le programme vise à favoriser l’accès à l’eau potable pour tous, non seulement pour contribuer à l’amélioration de la santé des populations mais aussi pour libérer les femmes de la corvée que représente la quête de l’eau potable. Ainsi des mini adductions d’eau potable inter-villages remplaceront progressivement les puits et les mares comme source d’approvisionnement en eau.
En matière d’électrification rurale, les programmes du PDES visent à l’électrification des villes de moyenne importance et des principaux villages grâce à leur connexion au réseau existant, ou au moyen de l’énergie solaire et thermique. L’objectif est de libérer les femmes des corvées ménagères à travers la généralisation des plateformes multifonctionnelles pour la préparation des farines et autres denrées alimentaires qui occupent actuellement une bonne partie des journées des femmes ménagères.
En matière de promotion économique, les femmes et les jeunes filles, libérées des tâches ménagères, dotées d’une éducation de bon niveau et de qualifications professionnelles seront encouragées à s’investir dans des emplois rémunérés, l’auto entreprise et autres activités génératrices de revenus. Les programmes spécifiques de promotion de l’emploi, de l’entreprenariat féminin, d’autonomisation des femmes, ainsi que le programme national d’inclusion financière seront d’un apport considérable dans ce domaine.
Par ailleurs, l’Etat encourage les femmes à participer aux processus de décision de manière proactive en imposant des quotas dans les postes électifs et dans les nominations a des postes de responsabilité dans l’administration publique.
Un autre aspect de la politique du gouvernement porteur d’espoir pour les femmes et les jeunes filles est la lutte contre les terrorismes et l’extrémise dont elles sont les principales victimes.
Nous sommes convaincus que la mise en œuvre de ces différentes initiatives contribuera à l’atteinte de l’ODD Numéro 5, qui est de parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.
Nos objectifs sont du reste articulés dans le Programme de Renaissance du Niger, qui fait de la justice sociale et de la lutte contre la pauvreté son credo, et qui est porteur de politiques publiques vertueuses qui ont radicalement amélioré la condition sociale des populations nigériennes durant ces dernières années.
Notre souhait, est que chaque nigérienne et chaque nigérien participe aux actions de développement économique et social et bénéficie de manière juste et équitable des fruits de la croissance dans notre pays. A ce titre le soutien exprimé par l’union européenne avec le lancement prochain du programme régional de lutte contre les violences basées sur le genre constitue pour nous un bon encouragement.