Le projet Mapping for Niger (Cartographions le Niger) est l'un des lauréats des mini-bourses de Rising Voices cette année. Cet article a été écrit par la chef du projet,Orsolya Jenei.
ici au Niger, à l'université Abdou Moumouni de Niamey, des choses très intéressantes se sont passées grâce à la bourse Rising Voice. On peut percevoir l'enthousiasme ambiant dans différentes activités : former les participants lors de sessions qui durent parfois toute la nuit dans l'atelier d'informatique du campus, en buvant du thé et en testant les nouveaux outils que les participants ont découvert..même lorsqu'ils s’impatientent si nous prévoyons de travailler ensemble uniquement quelques soirs par semaine, alors qu'ils souhaiteraient faire plus.
Des camarades étudiants, qui ne font pas partie de l'équipe initiale de ce projet, nous arrêtent et demande à participer aux activités, tandis que d'autres nous envoient des messages encourageants ; l’Université a bien compris l'opportunité et les bénéfices possibles pour les étudiants, et en dépit de ses moyens limités, nous a concédé le plein accès à l'atelier d'informatique. Dans un lieu où les occasions de formations pratiques sont rares, la bourse Rising Voices participe à l'animation du campus et donne aux étudiants une possibilité d'investir leur temps utilement tout en acquérant une expérience pratique qui leur sera utile dans leur future profession.
Le projet Mapping for Niger (Cartographions le Niger) est un projet de cartographie de communes du Niger réalisé par les étudiants en géographie de l'université de Niamey, au Niger. Ces étudiants élaborent des cartes à jour et virtuelles de leur village. Il font aussi connaitre leur village en partageant des informations locales sur les médias sociaux et lors de rencontres en face à face. Les étudiants sont formés à la collecte de données par GPS pour des lieux clés tels que écoles, hôpitaux, bureaux de l'administration locale, routes, pompes à eau, etc, et à les télécharger sur la plateforme de cartes en ligne gratuites et libres de droits OpenStreetMap (OSM). Pour animer et peupler ces cartes d'informations, les étudiants apprennent aussi à utiliser des appareils photos numériques et les réseaux sociaux. Ceci leur permet de faire connaitre via une carte les priorités et les problèmes des communes cartographiées, ainsi que la beauté et la diversité de leurs traditions.
On pourrait croire que former des étudiants d'université à la cartographie collaborative est aisé. Cependant, quelques informations sur le Niger peuvent aider à comprendre que les conditions de vie et de travail dans ce pays ne sont pas toujours faciles. Le Niger, dont une grande partie se trouve dans le Sahara, a une population de 17 millions d'habitants et affronte une série de problèmes, de l'insécurité alimentaire à des sécheresses répétées. Classé dans les derniers rangs de l’Indice de développement humain, moins d'un tiers de sa population sait lire et écrire et beaucoup de communes souffrent du manque d'électricité, rarement accessible, d'eau potable et d'infrastructures inexistantes ou très dégradées. Il n'est donc pas surprenant que le Niger soit aussi l'un des pays où la pénétration d'Internet est la plus faible, avec seulement environ 230 000 utilisateurs dans tout le pays (soit 2 pour cent de la population).
Comme tout projet lancé dans un contexte difficile, dès le début, les problèmes ont été multiples. Au quotidien, les coupures d'électricité, la connexion aléatoire à Internet, et le partage d'un écran d'ordinateur par deux ou trois étudiants ont rendu la formation difficile au début. Les pluies ont contribué à l'annulation de séances, les participants étaient fatigués durant le jeûne du Ramadan, et la malaria a frappé à peu près nous tous. Disons simplement que des solutions ingénieuses et spontanées sont toujours nécessaires, ainsi que de la patience et une attitude positive, pour maintenir le moral et pour que les activités se poursuivent. Mais nous ne nous plaignons pas, car nous avons tout cela en abondance.
De fait, la véritable beauté de ce projet est apparue grâce à ces problèmes dans l'enthousiasme, la détermination et la pugnacité dont ont fait preuve les étudiants. Ils représentent parfaitement la diversité du Niger. Le niveau de connaissances informatiques au début était très hétérogène : beaucoup n'avaient pas d'adresse mail, et ne connaissaient pas ou très peu Internet ou les fonctions de base d'un ordinateur. Mais ensemble, et chacun à son rythme, ils ont tiré parti des séances de formatios pour s'accoutumer aux outils en ligne. Leurs progrès sont époustouflants : beaucoup d'entre eux, qui n'avaient presque aucune pratique d'un ordinateur, forment maintenant les autres et de façon très sérieuse. Il est difficile d'imaginer des étudiants qui ont autant envie d'apprendre et de s'entraider.
Les bonne nouvelles arrivent : au bout de trois mois, les quinze étudiants travaillant ensemble ont appris la maîtrise des outils, ont collecté des données géographiques, et des photos de huit communes différentes (d'autres sont à venir). Le véritable travail doit encore débuter. Durant l'automne, nous éditerons les données collectées par les étudiants au cours de l'été, et compléterons les cartes des communes qu'ils ont visitées. Ensuite, à partir du groupe initial de quinze étudiants, nous formerons un groupe plus important d'étudiants afin de propager et compléter notre travail. Les étudiants contacteront différentes associations et les autorités locales pour qu'elles s'impliquent dans l'utilisation et le partage de données géographiques. Et chemin faisant, la cartographie se poursuivra. Tout en formant de nouveaux étudiants et en contactant des locaux, nous ajouterons différentes communes à la carte, en essayant aussi de transmettre les histoires des habitants par les médias sociaux. Post de blog après post, et photo après photo, nous espérons illustrer les histoires de lieux où entre rarement un appareil photo, et dont les voix ont rarement été entendues.
Nous remercions Rising Voices pour son généreux soutien, qui a permis à ce projet d'exister.