Le verdict du procès des acteurs de la société civile est tombé ce mardi 24 juillet. Selon le délibéré prononcé par le juge du Tribunal de grande instance hors classe de Niamey, les principaux leaders du mouvement de contestation (Ali Idrissa Nani, Nouhou Arzika, Moussa Tchangari et Lirwana Abdourahmane) ont été reconnus coupables des faits qui leur sont reprochés et ont été condamnés à trois (3) mois de prison avec sursis.
Sept (7) autres coaccusés ont été pour leur part condamnés à 12 mois de prison dont six (6) mois fermes et le reste assorti de sursis alors que deux (2) ont été libérés pour insuffisance de preuves et tous les autres ont bénéficié de la relaxe.
Détenus depuis le 25 mars dernier dans plusieurs prisons du pays, leur procès pour « organisation et participation à une manifestation interdite », les principaux leaders de la société civile pourront donc sortir de prison à moins que le procureur ne fasse appel de cette décision et à l’exception de l’avocat Lirwana Abdourahmane qui a été condamné la veille par le même tribunal à deux (2) ans de prison dont un (1) avec sursis pour « outrage à magistrat par voie de parole ».
Tchangari, Nouhou et Ali Idrissa bientôt libres
C’est donc un verdict assez clément pour Tchangari, Nouhou Arzika, Me Lirwana et Ali Idrissa, au regard des charges retenues ainsi que des peines requises par le ministère public lors de l’audience du procès, que la justice a prononcé dans ce procès très médiatisé qui a été ouvert le 10 juillet dernier, et qui a connu une importante mobilisation tant au plan national qu’international. A l’issue du procès, le ministre public avait en effet requis une peine de trois ans de prison ferme et une amende de 100.000 F. CFA contre Ali Idrissa Nani, Nouhou Arzika, et Moussa Tchangari, un an ferme contre Lirwana Abdourahamane et une amende de 100.000 F. CFA, et la relaxe pour Ousseini Maïga, Mamoudou Seyni ainsi que les autres. En plus du chef d’accusation qui a été principalement retenu contre eux, organisation et participation à une marche interdite », le procureur avait également ajouté d’autres griefs qui auraient pu aggraver la sentence notamment le motif de « complicité de dégradations de biens publics et privés ». Durant toute la phase d’instruction et au cours du procès, la défense des inculpés a plaidé l’abandon pure et simple des charges tout en dénonçant à maintes reprises, « des interférences politiques inadmissibles » ainsi que « des procédures irrégulières » notamment lors du report du premier procès du 3 juillet lorsque les prévenus n’ont pas été présentés à l’audience pourtant prévue initialement ce jour-là.
En attendant le procès des autres détenus
La clémence de la justice à l’égard des principaux activistes pourrait s’expliquer par le fait qu’ils ont été interpellés en marge de la manifestation alors que pour le cas des condamnés à de la peine de prison ferme, ils ont été arrêtés lors de la manifestation interdite ainsi que des violentes échauffourées avec les forces de l’ordre qui ont été enregistrées le dimanche 25 mars à Niamey. Les 7 condamnés à de la prison ferme, qui vont devoir passer un peu moins de deux mois avant d’être libérés, ont d’ailleurs été aussitôt le délibéré prononcé, répartis dans diverses prisons du pays. Il s’agit d’Abdoulaziz Issaka et Moctar Oumarou (Tillabéry), Abdoul Jamal Alassane et Aminou Tsayabou (Téra), Abdoulkader Haroun Hamza et Hamey Abdou (Ouallam), et enfin Halarou Abdou (Filingué).
Des organisations de la société civile nigérienne ainsi que des ONG internationales se sont particulièrement mobilisés au cours du procès qui s’est tenu au Palais de justice de Niamey sous importante surveillance policière. C’était aussi le cas ce mardi au prononcé du délibéré qui s’est soldé par un ouf de soulagement auprès des proches des prévenus ainsi que les autres militants de la société civile. « Au Niger, nous pouvons dire qu’il y a aujourd’hui une justice indépendante, qu’il existe des magistrats indépendants contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays comme au Sénégal» s’est ainsi exprimé à chaud, Alioune Toune d’Amnesty International qui a fait spécialement le déplacement de Niamey et pour qui « cette décision est juste ». Il ne s’agit toutefois et pourtant que d’une première manche, certes la plus attendue, mais d’autres acteurs de la société civile (Ibrahim Diroi, Maikoul Zodi et Tanko Ibrahim) attendent leur tour à Niamey pour les mêmes motifs de « participation et organisation d’une manifestation interdite). A Zinder un autre activiste et aussi coordinateur de la société civile régionale, Saddat Illia Dan Malam, est toujours détenu en attendant son procès sur plainte de la branche locale du parti au pouvoir qui l’accuse d’avoir tenu certains propos diffamatoires à l’occasion des manifestations contre la loi des finances et la mauvaise gouvernance.