PARIS - Quatre ex-otages français d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sont rentrés à Paris mercredi, après plus de trois ans d'une détention éprouvante dans le désert sahélien, tandis que les questions sur les contreparties de leur libération se multipliaient.
Daniel Larribe, 62 ans, Thierry Dol, 32 ans, Pierre Legrand, 28 ans, et Marc Féret, 46 ans, ont été accueillis peu avant midi à l'aéroport militaire de Villacoublay, près de Paris, par leurs familles et le président, François Hollande.
Les ministres français des Affaires étrangères et de la Défense, Laurent Fabius et Jean-Yves Le Drian, étaient allés les récupérer la veille à Niamey au Niger.
Amaigris, très souriants pour deux d'entre eux et plus en retrait pour les deux autres, les anciens otages ont étreint leurs proches pendant de longs instants. Daniel Larribe, pull rouge et manteau noir, est tombé dans les bras de son épouse Françoise, qui avait été enlevée en même temps que lui le 16 septembre 2010 au Niger et libérée cinq mois plus tard.
Thierry Dol, tout sourire, lunettes de soleil et épaisse écharpe grise, dépassait d'une tête tout le groupe. Marc Féret, un chèche noir enroulé autour de la tête, et le benjamin Pierre Legrand, chèche vert autour du cou, semblaient plus fatigués.
Les quatre anciens otages, salariés des sociétés Areva et Satom, filiale de Vinci, ont été libérés mardi au Mali après plus de trois ans d'une captivité décrite sobrement comme une épreuve de la vie par Thierry Dol.
Jean-Yves Le Drian a révélé dans la soirée que certains d'entre eux avaient tenté de s'évader pendant leur détention. Ils le raconteront s'ils le veulent, a-t-il ajouté. Selon la chaîne de télévision France 2, Daniel Larribe et Thierry Dol se sont enfuis pendant 48 heures, avant d'être repris, au début de l'année.
Passés les premiers moments de retrouvailles, le président Hollande a pris la parole sur le tarmac de l'aéroport. C'est une immense joie, une bonne nouvelle pour la France, a déclaré le chef de l'Etat, en grande difficulté par ailleurs sur le plan politique et dont l'impopularité atteint des sommets.
Rançon, impunité pour un chef islamiste ?
Selon une source proche des négociateurs nigériens, entre 20 et 25 millions d'euros auraient été versés pour la libération des otages. Les autorités françaises démentent fermement depuis mardi tout paiement de rançon.
La France n'a pas changé sa politique, a insisté mercredi la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem. Depuis l'arrivée au pouvoir en 2012 du président socialiste, Paris affirme avoir arrêté une doctrine de non paiement de rançons aux preneurs d'otages.
Interrogé dans la soirée à la télévision TF1, le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a précisé qu'aucun argent public n'avait été versé.
Pour ce qui dépend de l'Etat français, il n'y a pas d'argent versé, a-t-il dit, alors que la question du versement d'une rançon par le groupe Areva a été évoquée.
Par ailleurs, une source touareg proche du dossier a affirmé à l'AFP que l'impunité avait été garantie au chef du groupe islamiste armé Ansar Dine (Défenseurs de l'islam) en échange de la libération des quatre otages. Ce qui a fondamentalement pesé, c'est le sort politique, ou disons le sort tout court, d'Iyad Ag Ghaly, qui veut qu'on le laisse tranquille, qu'il n'y ait pas de poursuites judiciaires contre lui et plusieurs autres de ses proches, a affirmé cette source.
Ancien rebelle touareg des années 1990 au Mali devenu islamiste, Iyad Ag Ghaly, leader d'Ansar Dine, un des mouvements armés ayant occupé le nord du Mali en 2012 avec Aqmi et le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'ouest (Mujao), n'a plus été vu au Mali depuis le début, en janvier, de l'intervention française dans ce pays contre les islamistes.
Les otages avaient été enlevés sur un site minier du géant nucléaire français Areva à Arlit (Niger) le 16 septembre 2010. Aqmi avait revendiqué leur enlèvement. Détenus ensemble puis séparément, ils avaient été regroupés ces derniers jours dans l'extrême nord malien.
Selon plusieurs sources, ils ont été ramenés mardi à Niamey en hélicoptère depuis la région d'Anefis, non loin de Kidal, fief des Touaregs, situé dans l'extrême nord-est du Mali, près de la frontière algérienne.
C'est dans cette région, selon une source sécuritaire nigérienne haut placée, que se sont déroulées les dernières négociations.
Après ces libérations, sept Français restent officiellement encore otages: Serge Lazarevic et Gilberto Rodriguez Leal au Sahel, Francis Collomp au Nigeria, et quatre journalistes en Syrie, Didier François, Edouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torrès.