La mendicité est traditionnellement reconnue aux personnes vivant avec un handicap, qui ne peuvent exercer des activités génératrices de revenu. Cependant, la plupart des catégories ne sont pas, pour autant contraintes à cette fatalité. Au Niger, la fédération des personnes en situation de handicap (FNPH) reconnue officiellement en 1998 fait du défi de la lutte contre la mendicité son cheval de bataille. Elle se bat pour l'inclusion de cette population dans les actions de développement.
Pour les représentants de cette structure, la problématique de la mendicité est vue sur deux angles. D'une part, la condamnation de la société, qui se base sur des perceptions de longues dates, selon lesquelles, les personnes handicapées sont des nécessiteuses. « On peut dire que la société exploite ces personnes. Quand vous regardez dans les villages, lorsqu'il y'a un enfant en situation de handicap dans une famille, à l'âge de 7ans où il devrait être inscrit à l'école, on lui donne une tasse, et on le traine dans la rue. Parfois, il en est obligé même. Alors, il continue à faire la mendicité jusqu'à l'âge adulte. Il n'a appris que ça, donc c'est très difficile de le déconnecter. Sachant que le cerveau de l'être humain agit sur la base de son vécu » a affirmé le président de la fédération, M. Nouhou Siddo Oumarou, mal voyant, kinési-thérapeute à l'hôpital national de Niamey. D'autre part, la préoccupation de la fédération est liée au moyen mis à leur disposition pour éradiquer ce fléau. Ces appuis au fonctionnement font crucialement défaut à la structure. D'après lui, cela fait trois ans qu'ils n'ont pas reçu de soutien financier pour conduire leurs programmes. Les personnes en situation de handicap qui mendient, viennent des localités lointaines, dans les grandes villes. La sensibilisation doit viser cette source, pour produire des impacts durables. Les enfants doivent être inscrits et maintenus à l'école, pour éviter ce sort, qu'est la mendicité. Alors, comment pouvions-nous sensibiliser la population des différentes localités ? s'interroge le président de la FNPH.
Un fonds national de soutien aux personnes en situation de handicap a été créé en 1999, pendant qu'ils étaient à 80 037 personnes, à hauteur 50 000 000 FCFA. Selon M. Nouhou Siddo, ce fonds est réduit à 34 000 000 FCFA. Or, en référence des statistiques de 2012, l'effectif s'est multiplié par 9, soit 715 497 personnes. « Le gouvernement avait pris l'engagement de rehausser ce fonds à 150 000 000 FCFA. Mais, il y'a lieu de se demander si, cet engagement important, de lutte contre la mendicité est d'une véritable volonté. Je voudrais lancer un appel à SEM Issoufou Mahamadou, Président de la République, qui, était le premier à nous comprendre. Lorsqu'on cherchait à parler au gouvernement, on a eu des difficultés. Il nous a dit de venir vers lui. Il nous a écoutés, et a commencé à nous ouvrir des voies. Je voudrais que cet engagement soit plus fort, pour l'amélioration durable des conditions de vie des personnes en situation de handicap », a-t-il affirmé.
Des alternatives adéquates
La FNPH a participé à l'élaboration de plusieurs politiques de développement, notamment: les PDES 2011-2015, 2017-2021 et la politique de la population (en cours de finalisation). La facilitation de l'accès à l'éducation aux enfants handicapés, sans quoi il leur sera difficile d'exercer des métiers, contrairement aux enfants non handicapés est une priorité urgente, pour un changement à long terme. « Sur cet aspect, le gouvernement a travaillé le plus, ces cinq dernières années. Il a été débloqué plus d'un milliard pour l'achat des matériels spécialisés », a précisé le président de la fédération. La FNHP préconise par ailleurs, la formation des personnes adultes en situation de handicap, la création des conditions d'une marge de préférence des produits fabriqués par des personnes handicapées ; une sorte de quotas dans les marchés publics et garantir un revenu minimum pour des personnes qui vivent avec un grand handicap. C'est le cas de certains malades mentaux ou des personnes handicapées âgées et sans soutien qui ne peuvent exercer d'activité pour leur autonomie. Pour M. Nouhou Siddo, il faut en plus, un cadre juridique pour relever le défi lié à la mendicité. En ce sens, le Niger a ratifié la convention internationale relative à la situation des personnes handicapées, depuis le 24 Juin 2008, et l'article 4 de ladite convention dit que les pays doivent harmoniser leurs législations avec la convention. Dans cette logique, il a été mené une étude, qui a abouti à l'avant-projet de loi sur l'égalité de chance des personnes handicapées. « Le document est actuellement au niveau du secrétariat général du gouvernement. Et nous plaçons notre espoir sur l'engagement du Président de la République, pour l'avancée et l'adoption de ce projet », a dit M. Nouhou.
En attendant, la Fédération Nigérienne des Personnes Handicapées fait essentiellement des activités de sensibilisation. Au niveau international, la fédération est réputée fièrement en termes d'expertise et maitrise des droits des personnes en situation de handicap. En effet, le Niger préside le forum africain des personnes handicapées et celui de l'Afrique de l'ouest, selon le président de l'organisation, M. Nouhou Siddo Oumarou.
Le sud-africain ancien rapporteur des Nations Unis pour les personnes en situation de handicap, est témoin de ce leadership, lorsqu'il disait à la Première dame, Dr Lalla Malika Issoufou, que la FNPH a modifié la carte du monde des personnes handicapées et a hissé très haut le nom du Niger, lors de sa visite au Niger.
« En décembre passé, sur recommandation du PNUD, la fédération djiboutienne a sollicité notre expertise en matière des droits des personnes en situation de handicap. Et, c'est rare que passent deux mois sans qu'un pays ne nous sollicite. Nous leur proposons des solutions, et ils sont en train d'avancer. Mais nous, on a l'expertise et on n'avance pas, seulement par faute de moyens. L'issue judicieuse de la lutte contre le phénomène de la mendicité passe par le rehaussement du fonds national d'appui aux personnes en situation de handicap », a conclu le président de la fédération.