On pensait que la grande tragédie qui l’avait durement frappé entre 2007 et 2008 l’avait amené à s’assagir, à s’amender d’un comportement exécrable et nombriliste qui fut sa marque distinctive dans le microcosme politique nigérien.
On avait pensé que la prison de haute sécurité de Koutoukalé devait être la remise en question de soi, comme une espèce de purgatoire. Hama lui-même, ne disait-il pas, sur un ton pathétique, qu’il avait changé, quelques jours après sa libération ? Oui on l’avait cru sincère quand, là-bas de son exil doré, il avait déclaré, péremptoirement, sur les ondes de RFI, que Tandja voulait le tuer. Oui beaucoup l’avaient cru sincère à cette époque. L’épreuve qu’il avait dû traverser pendant cette période ne pouvait laisser indifférente aucune âme sensible : Hama donnait l’indicible impression d’être le mouton sacrificiel pour asseoir une imposture politique qui s’appellera tazarché. L’aspiration à la justice étant une constance des masses, cette position victimaire de Hama va, sans doute, beaucoup contribuer à l’élan de sympathies populaires au profit de sa toute jeune formation politique qu’est le Lumana. Malheureusement, comme le confirme un proverbe du terroir, un tronc d’arbre a beau séjourner sous l’eau, il ne deviendra jamais un caïman, autrement dit, selon un proverbe français, l’habitude est une seconde nature.
En effet, Hama Amadou n’a jamais changé, sauf peut-être en âge, mais ni dans le comportement, ni dans la parole. Chassez le naturel, il revient toujours au galop, telle est l’incurie chez Hama ! Cette âme qui souffre d’un profond complexe de supériorité qui le conduit toujours à croire qu’il est le meilleur, le grand maître, bref le génie politique qui manque au Niger. Mais le problème fondamental des mythes vivants, c’est qu’ils doivent affronter l’épreuve de la réalité concrète, et c’est justement sur ce terrain que se fracassent les réputations ou que se construisent les gloires. Hama Amadou avait été Premier Ministre durant sept ans et demi, et son bilan est là : en un mandat et demi, Hama n’a jamais procédé à la pose de la moindre première pierre, il n’avait inauguré aucun chantier majeur, et en fin, il n’avait jamais eu le plaisir de réceptionner aucun ouvrage exécuté pendant sa gestion !
Par contre, Il avait montré qu’il avait le sens des affaires très développées à travers les fameuses LAP et autres PSOPP pour dilapider les ressources publiques au profit d’une camarilla à sa botte ! Voilà à quoi se résument les sept années et demie de Hama à la primature du Niger ! Rien de plus, mais rien de moins ! Signataire de l’APR (Alliance Pour la République), un pacte conclu en juillet 2010 par les partis membres de la CFDR, au terme duquel, si un des candidats de ce regroupement arrivait au second tour de l’élection présidentielle, il devait bénéficier, automatiquement, des voix des autres membres pour l’emporter, Hama Amadou, champion toutes catégories de la versatilité et de la double parole, rompit ce pacte historique en initiant la création de l’ARN (’Alliance pour la Réconciliation Nationale), à la veille du premier tour du scrutin présidentiel de 2011 !
En réalité, toujours se pensant plus malin que les autres, Hama avait un autre agenda en signant l’ARN, c’est-àdire au cas où il serait arrivé second à l’issue du premier tour pour pouvoir bénéficier du report de voix des partis membres de cette deuxième alliance ! Malheureusement pour lui, l’homme propose, Dieu dispose, le verdict des urnes fut sans pitié pour lui : Dieu dans son infinie sagesse avait décidé qu’il serait troisième et Seini Oumarou deuxième ! En principe, Seini pouvait, légitimement, espérer bénéficier du report de voix pour prétendre l’emporter devant Issoufou Mahamadou. Mais, déjà, en cercle restreint, il se racontait que pour Hama il était totalement hors de question de soutenir Seini Oumarou pour faire de lui Président de la République, ’’ce simple vendeur de cahiers scolaires que j’ai fabriqué hier’’, se glorifiait Hama ! Il but le calice de la trahison jusqu’à la lie en rejoignant, au second tour, Issoufou Mahamadou !
Pour rallier le camp de la CFDR, Hama Amadou ne manquait point d’arguments spécieux pour tenter de justifier sa posture de girouette politique en faisant répandre la rumeur selon laquelle il y aurait été contraint par … la junte militaire ! En fait, pour beaucoup d’observateurs de la chose politique, ce choix de rejoindre Issoufou était parfaitement clair et libre, car c’était-là le moindre mal pour lui qu’Issoufou devînt Président de la République au lieu de Seini. C’est cela le hamisme à l’état pur, cette espèce de cynisme mêlé à un égoïsme déconcertant. Il s’embarqua donc dans une alliance avec le PNDS sans jamais porter dans son coeur le souci de réussir ensemble pour le Niger. Pendant plus de deux ans, il aura fait simplement semblant d’accompagner le Président Issoufou tout en menant des manoeuvres sournoises pour déstabiliser un régime auquel son parti prenait largement part.
Durant les deux années qu’il aura passées dans la mouvance présidentielle, que de problèmes le Président Issoufou avait dû résoudre pour contenter un allié insatiable mais surtout instable comme un enfant gâté ! Pour préserver cette alliance à l’époque stratégique pour le Niger, que n’avait-on pas concédé à Hama pour que survécût cette alliance ? On était allé jusqu’à sacrifier l’assainissement et la moralisation de la vie publique nationale initiés par le Président dès l’entame de son mandat, en étouffant l’affaire des fausses factures du Trésor, pour contenter un allié. Mieux, à sa demande, un haut magistrat avait été remplacé de son poste, en dépit du principe de l’inamovibilité des magistrats ! Alors que voulait Hama de plus ? Est-ce le caractère ’’coquilles vides des ministères alloués au Lumana qui motivait le départ du Lumana de la mouvance ?
Apparemment non, car Hama aurait pu renégocier ses portefeuilles comme il l’avait toujours fait à chaque fois qu’il jugeait que les intérêts du Lumana n’étaient pas bien pris en compte dans la répartition des postes de responsabilité. En réalité, ce qui meut Hama dans toute cette affaire, c’est que son agenda politique ne correspond point aux échéances républicaines et pour lui le plutôt serait le mieux ! C’est-là l’alpha et l’oméga de toutes les gesticulations actuelles de Hama Amadou, ce qui le fait courir comme un décervelé dans tous les sens. Pour s’engager dans cette aventure malheureuse, Hama peut bien compter sur des troupes béni oui, oui, chauffées à blanc à l’aune des clivages réducteurs et autres atteintes à l’unité et la cohésion nationales. Il faut dire que le personnage affectionne beaucoup le populisme et ses travers et exploite à merveille la terrible candeur d’un électorat instrumentalisé à des fins politiciennes.
Quand il était au MNSD, pour ne pas être contrarié dans ses ambitions hégémoniques démesurées, il avait, méticuleusement, occis toute la nomenklatura traditionnelle du parti pour y placer ses cireurs de chaussures ; ainsi il mènera une guerre sans merci contre toute l’intelligentsia du MNSD qui ne pouvait s’accommoder des élans dictatoriaux du Seigneur de Youri prêt à tout pour arriver au pouvoir. Après le MNSD, aujourd’hui c’est le Lumana, un parti né de la reconquête démocratique contre le tazarché, de connaître cette crétinisation des militants pour satisfaire uniquement un égo en proie à un grand complexe du ’’sac au dos’’.