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Dr. Sani Kabir, président du Conseil Supérieur de la Communication (CSC) : «Au Niger, la liberté a été souverainement érigée en liberté constitutionnelle»

Publié le samedi 4 mai 2019  |  NigerDiaspora
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© Le Sahel par DR
Dr Sani Kabir, président du Conseil supérieur de la Communication (CSC)
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Monsieur le Président, voilà un an que vous êtes à la tête du Conseil Supérieur de la Communication (CSC). Pouvez-vous nous donner un aperçu sur les principales actions que vous avez entreprises durant cette année ?

Il est très tôt pour tirer un bilan, mais nous pouvons tout de même relater quelques actions qui ont été engagées depuis lors. Je voudrais d’abord préciser que la nouvelle équipe du Conseil supérieur de la communication a pris fonction dans un contexte de rareté de ressources financières de l’Etat. Cette contrainte a été aggravée par l’inexistence de ressources complémentaires en provenance des partenaires en raison de la fin de tous les projets mis en œuvre par le CSC. En dépit de cette situation, la nouvelle équipe s’est vite engagée dans sa mission, grâce à un appui exceptionnel de S.E.M le Président de la République qui a été attentif et compréhensif face à nos difficultés. Je profite de cette occasion pour remercier encore une fois le Chef de l’Etat pour cette bienveillance à l’endroit du CSC.

Dès notre prise de fonction, nous avons poursuivi l’adoption des textes réglementaires, notamment des délibérations pour se conformer aux modifications liées à la nouvelle loi portant composition, attributions, organisation et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Communication, ainsi que celles liées à l’adoption de la nouvelle loi sur la communication audiovisuelle.

C’est ainsi qu’une dizaine de délibérations ont été examinées et adoptés portant notamment sur le règlement intérieur et le règlement administratif, les montants des redevances et des autres frais connexes pour l’exploitation d’un service de radiodiffusion ou de télévision national et international, les modalités de la saisine d’office et la procédure de traitement des plaintes et recours soumis au CSC, les conditions d’attribution, d’annulation et de retrait de la carte de presse de journaliste professionnel, les conditions d’éligibilité au fonds d’aide à la presse et les modalités de son attribution, etc.

Par ailleurs, le CSC a mis en place un groupe de travail qui a élaboré un avant-projet de loi portant principes fondamentaux de la liberté de la presse. C’est le lieu ici de rappeler que plusieurs autres textes importants sur la communication ont été élaborés par le CSC et proposé au gouvernement pour adoption depuis bientôt trois ou quatre ans.

De son installation en avril 2018 à la date d’aujourd’hui, le Conseil a régulièrement tenu ses sessions mensuelles. Au total, ce sont 13 sessions ordinaires et deux (2) sessions extraordinaires qui ont été tenues pour discuter sur plusieurs questions relatives à la régulation de la communication au Niger.

En outre, il faut noter que le CSC a élaboré trois (3) propositions d’avant-projets de textes et émis quatre (4) avis sur des projets de textes soumis par le gouvernement. Cette activité a été faite en application de l’article 9 de la loi sur la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement du CSC et les textes modificatifs subséquents qui disposent que « le Conseil Supérieur de la Communication peut formuler à l’attention des pouvoirs exécutifs et législatifs, des propositions, des avis et des recommandations sur les questions relevant de sa compétence ».

Le Conseil Supérieur de la Communication délibère sur toutes les questions intéressant la communication, notamment la qualité des activités des médias des secteurs public et privé de la communication. Le Conseil Supérieur de la Communication est consulté par les pouvoirs exécutif et législatif avant toute prise de décision dans les matières relevant de sa compétence, en particulier les textes relatifs au secteur de la communication ».

Parmi les avis émis par le CSC sur saisine du gouvernement, on peut noter entre autre, l’avis sur le projet de décret portant approbation des statuts de l’Etablissement public à caractère administratif dénommé «Agence Nigérienne de Diffusion» (AND), l’avis sur le projet de loi modifiant et complétant la loi n°2012-34 du 07 juin 2012 portant composition, attributions, organisation et fonctionnement du CSC, l’avis d’accréditation des journalistes étrangers…etc.

Sur le plan de la délivrance des autorisations de création, d’installation et d’exploitation d’un service de communication audiovisuelle, le CSC a accordé un total de 25 autorisations de création de radios dont 13 radios privées et 12 radios communautaires. Le Conseil a en outre accordé des cartes de journalistes professionnels à une centaine de journalistes de la presse publique et privée.

Une autre activité du CSC qu’il faut également relever, c’est le traitement des plaintes et saisines d’office par rapport aux manquements observés sur le plan de l’éthique et de la déontologie. Car, comme vous le savez, de par les textes, le CSC reçoit et statue sur les plaintes et recours qui lui sont soumis. Il prend les sanctions appropriées aux manquements à l’éthique et à la déontologie par les journalistes professionnels après avis de la Commission compétente saisie au fond. A ce titre, il peut être saisi par toute personne ou structure, d’une plainte pour non-respect de la déontologie. Il peut également se saisir d’office. Aussi, par rapport à cette question, le CSC a statué sur une vingtaine de plaintes et saisines d’office.

Le fait marquant des activités du nouveau CSC concerne surtout la répartition du Fonds d’aide à la presse au titre des années 2016 et 2017. Depuis 2015 en effet, ce fonds n’a pas été réparti à la presse pour plusieurs raisons dont la principale est liée à l’indisponibilité des fonds à cet effet. Pour les deux années (2016-2017), le CSC a réceptionné 75 dossiers pour une enveloppe globale à distribuer de 290.500.000 FCFA (88.000.000 pour l’année 2016 et 202.500.000 FCFA au titre de l’année 2017).

Pour aller dans le détail, et s’agissant de l’année 2016, 35 dossiers ont été réceptionnés dont dix-huit (18) dossiers de journaux, huit (8) dossiers de radios et neuf (9) de télévisions. Un montant de 88 millions a été réparti dont 24 millions pour la presse écrite, 24 millions pour les radios, et 40 millions pour les télévisions.

Pour le compte de l’année 2017, 40 dossiers ont été réceptionnés parmi lesquels vingt-deux (22) dossiers de journaux, neuf (9) dossiers de radios, et neuf (9) dossiers de télévisions. Un montant de 202 millions 500 milles a été réparti aux différents organes de presse, dont 42 millions 500 000 pour les journaux, 60 millions pour les radios et 100 millions pour les télévisions.

Sur le plan de renforcement des capacités, le nouveau Conseil a effectué trois activités, dont un atelier de formation de ses membres sur « la gestion du pluralisme hors période électorale », un séminaire de formation de ces mêmes membres sur la Télévision Numérique Terrestre (TNT).

Un effort important a également été fait dans le domaine de l’information et de la sensibilisation des partenaires (médias, organisation de la société civile) sur les nouveaux textes de la communication au Niger à travers une tournée à l’intérieur du pays, notamment dans les régions de Dosso, Zinder et Tahoua. Au cours de cette mission des journées d’échanges ont été organisées ayant regroupé environ 140 journalistes, agents des forces de défense et de sécurité et acteurs de la société civile.

L’on notera que, malgré ses difficultés financières, le CSC a fait des efforts pour être présent dans différentes rencontres des instances internationales de régulation de la communication dont il est membre. Je peux citer par exemple, le Réseau des instances africaines de régulation de la communication (RIARC), la Plateforme des Régulateurs de l’Audiovisuel des pays membres de l’UEMOA, le réseau des régulateurs des pays francophones (REFRAM)…

Il y a un an, juste à votre prise de fonction, vous déclariez que pour réussir votre mission, vous entendez mettre en place un véritable cadre d’échange et de concertation entre tous les acteurs de l’information et de la communication, où en sommes-nous par rapport à cette question ?

Depuis notre installation, nous nous sommes d’abord attelés à produire suffisamment de textes règlementaires qui manquaient dans l’arsenal de régulation de la communication. Dans la foulée, il nous fallait nous adapter aux nouvelles lois sur la composition, organisation et fonctionnent du CSC, la nouvelle loi sur la communication audiovisuelle, prenant en compte la TNT.

Pour répondre précisément à votre question, je rappelle que nous avions effectué une mission à l’intérieur du pays pour rencontrer et discuter avec les acteurs médias sur le CSC et les nouveaux textes qui régissent la communication au Niger. Nous allons poursuivre ces rencontres, que nous souhaitons être périodiques avec les acteurs concernés, notamment les promoteurs des organes de presse et les journalistes.

Monsieur le Président, la convention collective, impatiemment attendue par les hommes de médias, reste toujours comme un mirage. Peut-on espérer une avancée durant votre mandat ?

Par rapport à cette question, il faut rappeler que le CSC a mis en place un Conseil de publicité qui est présentement en train de réfléchir sur les modalités de l’accès de la presse privée au marché publicitaire en général et , en particulier de celui de l’Etat et de ses démembrements. Puisque une des conditions de la signature de la convention posée par les promoteurs c’est l’accès au marché publicitaire. Il faut rappeler que le CSC n’est pas le seul acteur pour accélérer la signature de la convention collective. Il y’a le gouvernement et les promoteurs des médias privés. Donc, nous devons travailler ensemble et conjuguer tous nos efforts dans ce sens.

Après avoir occupé la 43ème place sur les 180 pays classés par le rapport de Reporters Sans Frontière (RSF) en 2013, le Niger se retrouve à la 66ème place en 2019. Ainsi, en cinq (5) ans, notre pays a reculé de vingt-trois (23) points et de trois (3) points de 2018 à 2019. En tant que président du CSC, que vous inspire ce recule et ce classement 2019 du Niger, par le RSF ?

Je dois d’abord vous rappeler qu’au Niger la liberté a été souverainement érigée en liberté constitutionnelle à l’occasion de la conférence nationale de juillet 1991. Aussi, la Conférence Nationale souveraine a mis en place une autorité administrative indépendante Constitutionnelle chargée d’assurer la régulation des médias. Depuis, du chemin a été parcouru, puisque nous avons un des paysages médiatiques le plus dynamique de la sous-région (plusieurs radios, TV et journaux privés actifs).

Nous avons un texte qui dépénalise les délits de presse, alors que certains pays de la sous-région n’en disposent pas. Il y a aussi et surtout la Déclaration de la Table de la Montagne dont le Président de la République du Niger, S.E.M Issoufou Mahamadou, était le premier chef d’Etat en exercice à la signer. RSF a trouvé que tous ces acquis juridiques et institutionnels du Niger en matière de garantie de la liberté de la presse sont insuffisants. Elle a ses critères que je trouve personnellement discutables. La situation de la liberté de la presse est un processus dynamique au Niger, nous devons plutôt nous concentrer sur les voies et moyens pour renforcer ce processus, sans précipitation et sans aucune pression.

Lors de l’ouverture de la session ordinaire du CSC du mois d’avril 2019, vous avez annoncé, dans l’ordre du jour, l’examen et l’adoption du projet de délibération sur l’accès équitable de la presse privée au marché publicitaire. Qu’entendez-vous par accès de la presse privée au marché publicitaire et que comptez-vous concrètement y faire le CSC?

L’accès de la presse au marché publicitaire est une exigence de la loi n° 2018-23 du 27 avril 2018 portant sur la communication audiovisuelle et du décret n° 2017-52/PRN/MC du 25 janvier 2017, régissant la publicité par voie de presse.

Le premier texte dispose, en son article 8, que « Les services d’édition de communication audiovisuelle, publics, privés, associatifs et communautaires, ont accès au marché publicitaire dans des conditions définies par une délibération du Conseil Supérieur de la Communication », et le second crée, à son article 26, auprès du Conseil Supérieur de la Communication, un organe consultatif dénommé « Conseil de Publicité», chargé , entre autres, de proposer au CSC les modalités d’accès de la presse au marché publicitaire de façon générale, et, de façon spécifique, de l’accès équitable et effectif de la presse privée au marché publicitaire de l’Etat et de ses démembrement. C’est en application des deux textes susvisés que ce projet de délibération dont vous faites allusion est inscrit à l’ordre du jour de la session du Conseil du mois d’avril 2018. Malheureusement ce projet de délibération est reporté pour la prochaine session du mois de mai pour mieux l’étudier. Le moment venu, le CSC va réfléchir sur les conditions et modalités d’accès de la presse publique, privée, associative et communautaire au marché publicitaire par voie de presse, quel que soit l’intervenant. C’est du reste une exigence des promoteurs des organes de presse avant la signature de la convention collective.

Enfin, monsieur le Président, en ce jour 3 mai, Journée Mondiale de la Liberté de la Presse, quel appel avez-vous à l’endroit des hommes et femmes des médias nigériens ?

Je souhaite une bonne fête de la liberté de la presse à toutes et à tous les acteurs des médias au Niger. Je profite de cette occasion pour les inviter à plus de rigueur et de responsabilité dans leurs activités quotidiennes.

Propos recueillis par Mahamadou Diallo
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