Au Niger, l'opposition se prépare à la présidentielle de 2021. Le député Soumana Sanda explique ce que fera le Moden Lumana si son leader, Hama Amadou, est empêché d'être candidat.
RFI: Le week-end dernier, votre congrès a désigné Hama Amadou candidat de votre parti en 2021. Mais depuis sa condamnation à un an de prison pour « bébés importés », Hama Amadou n’est-il pas inéligible ?
Soumana Sanda: Je pense que le fondement de cette sordide affaire étant politique, son traitement également le sera. Je pense aussi que notre chère Nation a d’autres chats à fouetter. Elle a d’énormes défis à relever, notamment sur le plan sécuritaire, pour s’offrir le luxe d’une crise sur le plan électoral. Oui, je pense que Hama Amadou sera au rendez-vous de 2021.
Dans une interview à Rfi et France 24, il y a un mois, le président Issoufou affirme que les règles d’inéligibilité sont fixées par le code électoral et que la règle qui empêche Hama Amadou d’être candidat a été adoptée par Hama Amadou lui-même quand il était Premier ministre...
Voyez-vous, nous avons cessé - au niveau du Moden Fa Lumana Africa - de faire de la polémique autour de cette question. Dès le départ, nous avons dit à qui voulait nous entendre que cette question n’était pas judiciaire ou juridique ; elle était politique. Il s’agit donc d’une action politique qui amènera Hama Amadou à être candidat aux élections de 2021.
Malgré le code électoral qui l’en empêche actuellement ?
Le code électoral ne l’empêche pas formellement. Je rappelle que le code électoral, sciemment révisé pour tenir compte de la condamnation de Hama Amadou, n’est pas le seul moyen pour permettre l’éligibilité d’un candidat mais tout un ensemble d’actions et également une procédure qui, aujourd’hui, je le rappelle, est encore pendante devant les juridictions, au-delà du Niger. Donc, c’est un feuilleton qui n’est pas terminé en ce sens que nous ne pouvons pas, aujourd’hui, dire qu’au Niger, du fait du code électoral actuel, Hama Amadou ne peut pas être candidat.
Je rappelle aussi que le code électoral a toujours été le fruit d’un consensus intégral dans notre pays. Il a déjà été révisé à deux reprises. Je ne désespère pas qu’une troisième révision vienne à être opérée, si jamais toute la classe politique était d’accord pour aller vers un consensus.
Vous refusez de siéger à la Commission électorale et vous contestez le code électoral adopté il y a deux mois par le Parlement. Si ce code n’est pas modifié, est-ce que vous irez quand même à la présidentielle de 2021 ?
Nous avons bon espoir que ce code sera modifié car c’est un processus qui a toujours prévalu dans le cadre de l’organisation des élections au Niger, à savoir le consensus. Aujourd’hui, notre pays, avec tout ce que nous connaissons comme difficultés sur le plan sécuritaire et comme difficultés tout court, ne peut pas s’offrir le luxe de créer d’autres situations qui pourraient nous amener dans le précipice. Donc, vraiment, j’ai bon espoir que le code électoral sera révisé, que tout le monde mettra balle à terre et que nous puissions aller vers des élections inclusives, transparentes et régulières.
Imaginons alors que vous ne boycottez pas le scrutin mais la candidature de Hama Amadou est quand même invalidée. Qu’est-ce que vous faites, à ce moment-là ?
Nous aviserons le moment venu mais pour l’heure, je vous dis que la question étant politique, nous allons mener toutes les actions politiques nécessaires, dans la légalité, afin qu’Hama Amadou puisse être candidat. Vous savez, Hama Amadou jouit incontestablement d’un fort soutien de la population nigérienne à travers notre vaste pays. Il n’y a aucune raison qu’il soit absent en 2021.
Mais faut-il envisager un candidat de remplacement, au cas où ?
Nous avons un seul plan, le plan A, avec Hama Amadou et c’est pour cela que nous allons continuer à nous battre.
Et si par nécessité il faut envisager un plan B ?
Le seul plan auquel nous pensons, que nous avons conçu, c’est le plan A avec Hama Amadou.
Pas de plan B ?
Il n’y a pas de plan B. Le seul plan est A et c’est avec Hama Amadou.
Mahamadou Issoufou affirme qu’avec la prochaine présidentielle aura lieu la première transition pacifique au Niger, depuis 1960. Est-ce que ce n’est pas un fait dont vous prenez acte, vous aussi ?
Mais nous attendons de voir. Il reste encore dix-sept mois. C’est au bout de ces dix-sept mois, une fois que le processus électoral est engagé où toutes les bonnes pratiques sont mises en place et respectées, que nous, les Nigériens, allons effectivement nous dire « enfin, il y a eu une transition démocratique pacifique » mais en attendant, nous veillons au grain. Nous allons observer la situation pour que toutes les bonnes options soient sur la table. Je pense que nous pouvons effectivement nous acheminer vers cet état de fait.
Vous acheminer vers des batailles, à la loyale, face au candidat du PNDS, Mohamed Bazoum ?
Absolument. Je pense qu’aujourd’hui les Nigériens ont soif d’élections loyales, d’élections libres, d’élections inclusives. Si toutes ces conditions sont réunies, c’est ensemble que nous irons à ces élections et le meilleur gagnera qui, je l’espère, sera de notre camp.
Et qui sera, vous l’espérez, Hama Amadou ?
Bien sûr… qui sera Hama Amadou.
Ou un autre candidat éventuel de votre parti Modem FA Lumana ?
Pour cela, je vous ai dit qu’il n’y a pas de plan B. Le candidat, ce sera donc Hama Amadou et c’est lui que nous espérons voir à la tête du pays, au lendemain des élections de 2021.