A l’occasion de la réédition, chez L’Harmattan, du livre d’entretiens que lui a consacré son compatriote, le journaliste Seidik Abba, nous vous proposons de découvrir la trajectoire du mathématicien nigérien Boubakar Ba, décédé le 19 avril 2013, à Paris. Premier Africain à entrer à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm, le professeur Ba en avait profité aussi pour évoquer « l’Etat postcolonial, la conscience africaine ou encore les défis des universités du continent.»
C’est une centaine de pages qui se dévorent avec délectation. Deux raisons à cela : d’une part, le récit captivant d’une trajectoire qui commence durant la colonisation pour se terminer à l’aube du XXIème siècle, et d’autre part le choix d’une forme, l’entretien, qui rend la lecture aisée.
Naissance en Afrique Occidentale Française
Tout part d’une rencontre, en 1999 à Paris, entre l’auteur du livre, Seidik Abba, ancien rédacteur en chef central de l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique (aujourd’hui journaliste indépendant), et le professeur Boubakar Ba. Une initiative qu’ils doivent à Abdou Kimba, leur compatriote et ami commun.
Très vite, les échanges entre les deux hommes se transforment « en enseignements sur l’histoire des indépendances africaines, sur le régime de Hamani Diori, premier président du Niger, sur la genèse de la création du Centre d’enseignement supérieur de Niamey – l’ancêtre de l’Université de Niamey – et d’autres sujets tout aussi importants
Boubakar Ba naît le 29 décembre 1935, à Say, dans l’actuel Niger, l’une des huit colonies de ce que l’on appelle alors l'AOF, l’Afrique Occidentale Française. A l’époque, outre le Niger, ce vaste territoire regroupe la Mauritanie, le Sénégal, le Soudan français – devenu Mali –, la Guinée, la Côte d’Ivoire, la Haute-Volta – devenue Burkina Faso –, le Togo et le Dahomey – devenu Bénin.
Un enfant précoce
A cinq ans, et alors qu'il n'a pas encore atteint l’âge requis, huit ans, le petit Boubakar est inscrit à l’école élémentaire de Diapaga, la bourgade où son père était employé comme fonctionnaire. Quatre ans plus tard, à la fin de son CE2, il quitte cet établissement qui ne pouvait pas lui permettre de poursuivre ses études, pour rejoindre l’école régionale de Fada-Ngourma, alors distante de 210 km. Un véritable voyage « initiatique » qu’il effectue à pied, à cheval et à dos d’âne.
Après le CM2, Boubakar Ba intègre le Collège moderne de Niamey, qui venait d’ouvrir ses portes. Nous sommes en 1946, il a onze ans. A la fin de son année de seconde, ils sont trois élèves à être sélectionnés pour poursuivre leurs études comme internes au lycée Van Vollenhoven de Dakar, au Sénégal.