NIAMEY - Le Niger, 4e producteur mondial d’uranium, le 2e fournisseur du groupe nucléaire français Areva, reste paradoxalement l’Etat le plus pauvre du monde.
Le contrat qui lie le Niger et Areva depuis plusieurs décennies arrive à terme à partir du 31 décembre 2013 et des négociations sont en cours entre les deux parties pour la conclusion d’un autre que Niamey souhaite "meilleur".
A au-delà de la volonté des autorités et des exigences du peuple nigériens, la pression internationale en faveur de conditions plus avantageuses dans les nouvelles conventions en négociations avec Areva commence à faire écho.
Le 24 octobre 2012, le ministre nigérien des Mines, Omar Hamidou Tchana, avait donné le ton, dénonçant ce partenariat qu’il avait jugé plus avantageux pour Areva.
"Les bénéfices tirés de l’exploitation de l’uranium ne profitent pas au peuple nigérien car ne contribuant qu’à hauteur de 5% au budget général du pays", avait-il martelé.
"Nous voulons nous asseoir avec AREVA pour qu’ensemble nous trouvions les voies et moyens, pour que l’exploitation des ressources de notre sous-sol profite au développement de notre pays. Nous voulons que notre partenariat avec AREVA soit gagnant- gagnant", avait précisé Omar Hamidou Tchana.
Par la suite, des déclarations et des marches en soutien au gouvernement dans le cadre de ces négociations sur le prix de l’ uranium avec Areva avaient été organisées courant octobre passé par les organisations de la société civile, notamment dans la ville minière d’Arlit (nord) et à Niamey.
Ce vendredi, autour du Réseau des organisations pour la Transparence et l’Analyse budgétaire (ROTAB) du Niger et de la Confédération internationale Oxfam France, un réseau de 17 organisations de solidarité internationale, montent au créneau.
Ils ont dénoncé avec force la "véritable arnaque" du groupe nucléaire français Areva sur le Niger pendant 40 ans d’ exploitation de son uranium et exigent que le nouveau partenariat que le Niger s’apprête à signer avec Areva soit "plus équilibré".
Dans un rapport publié, le ROTAB demande au gouvernement de permettre que les termes des nouvelles conventions de la SOMAÏR et la COMINAK, les deux filiales du groupe Areva exploitant les gisements d’uranium d’Arlit, dans la région d’Agadez (extrême nord) , fassent l’objet d’un débat au Parlement nigérien, avant leur signature, et d’exiger, en tant qu’actionnaire de la SOMAÏR et de la COMINAK, la publication de l’audit des sociétés afin d’assurer que tous les éléments de la négociation sont transparents et accessibles.
En outre, le réseau des organisations de la société civile nigérienne demande aux autorités nigériennes d’"impliquer les services techniques du ministère des Mines, de la Direction Géné rale des Impôts et de la Direction Grandes Entreprises, des services de douanes et du ministère de l’Environnement dans toutes les phases de la négociation et de faire respecter les dispositions du Code minier de 2006 et toutes les législations en vigueur au Niger".
De son côté, Oxfam France demande au gouvernement français de "n’exercer aucune pression sur le gouvernement du Niger pour obtenir des dérogations à la loi minière de 2006, des exemptions fiscales, ou toute dérogation à la législation nigérienne en faveur d’AREVA, qui réduiraient les retombées financières pour le Niger, de s’assurer que les négociations, à toutes les étapes, se déroulent dans la plus grande transparence".
Selon Oxfam, "en France, une ampoule sur trois est éclairée grâce à l’uranium nigérien".
Par contre, au Niger où la matière première est extraite depuis plus de 40 ans par Areva et la France, "près de 90% de la population n’a pas accès à l’électricité" et le pays se compte parmi les plus pauvres de la planète comme en atteste le dernier classement sur l’indice de développement humain.
Par ailleurs, avec l’exploitation de la nouvelle mine d’Immouraren (toujours dans le département d’Arlit), initialement prévue à partir de 2014, le Niger se hisserait au premier rang en Afrique, et second au niveau mondial, de producteur d’uranium, apr ès le Canada, avec une production annuelle qui passerait de 3.000 à 8.000 tonnes, d’après les études techniques d’Areva.
Mais depuis, la promesse est loin d’être tenue.
Le projet semble avoir du plomb dans l’aile. Il ne serait plus rentable pour le groupe français, qui Il traine les pieds.
De sources bien informées, d’autres opérateurs, notamment des chinois, se sont déjà annoncés pour l’exploitation de ces minerais d’uranium dans le nord du Niger.