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Réformes dans l’obtention du titre foncier au Niger : «Il y a nécessité absolue de moderniser la façon dont nous faisons le titre foncier» estime M. Mahamane Ousmane directeur de la fiscalité foncière et cadastrale

Publié le mercredi 25 septembre 2019  |  Le Sahel
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Dans un pays où la population augmente fortement d’année en année, le foncier apparait comme «une fin en soi. Mais la connaissance des modalités d’obtention du titre foncier est plus que nécessaire aussi bien pour les propriétaires terriens que pour les acquéreurs. Autant dire que les enjeux liés à la question foncière deviennent de plus en plus cruciaux au regard de la multitude d’acteurs qui spéculent tout autour. Il y a donc urgence d’opérer des reformes à même d’apporter des changements qualitatifs dans la gouvernance foncière au Niger. Ce chantier qui est fort heureusement inscrit au programme de renaissance du Niger connait d’ailleurs une évolution remarquable ces dernières années.

Le foncier participe de façon générale au développement socio-économique d’un pays. Au Niger, il existe toute une procédure d’obtention du titre foncier. Mais concrètement qu’est-ce qu’un titre foncier?

Comme son nom l’indique, un titre foncier est un document administratif délivré par l’administration de la conservation foncière qui atteste qu’une personne est propriétaire d’un terrain ou d’un immeuble bien donné. Selon M. Mahamane Ousmane, directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale à la Direction Générale des Impôts, le titre foncier est différent de l’acte de cession ; du permis urbain d’habiter ; de la détention coutumière. Le titre foncier est un acte délivré à la suite d’un long processus qui consiste d’abord à s’assurer de l’identité du requérant ; à s’assurer de la réalité du terrain ou de l’immeuble en question et surtout à purger le droit des tiers. « C’est tous ces éléments que l’administration prend, qui font en sorte que le titre foncier est différent des autres actes administratifs par lesquels on peut exercer un droit sur un terrain ou une propriété», précise M. Mahamane Ousmane.

Comment obtenir alors un titre foncier ?

Quand on se réfère à l’historique de la question du titre foncier au Niger, on se rend compte qu’avant 2006, il faut faire ce qu’on appelle l’inscription des droits de superficie. Cela veut qu’avant 2006, il est impossible d’immatriculer un terrain nu. A partir de 2006, l’Etat a constaté qu’il y a très peu de titres fonciers qui sont établis parce que la procédure est lourde. En plus, toutes les conditionnalités qui sont posées pour obtenir un titre foncier font que beaucoup de personnes n’en font pas la demande. «Il ne suffisait pas d’avoir un terrain, mais il faut le mettre en valeur. En outre, à partir de cette mise en valeur, il faut faire une évaluation des investissements et payer un pourcentage de la valeur du terrain et des investissements pour avoir le titre foncier. Voilà ce qui rendait l’obtention du titre foncier difficile », a expliqué le directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale. Toutefois, à partir de 2006, la procédure a été simplifiée pour dire que la mise en valeur et l’inscription de la valeur du terrain ne sont plus des préalables. « On peut désormais demander aisément l’immatriculation d’un terrain nu. Cette procédure simplifiée dans l’obtention du titre foncier est appelée ‘’Cheda’’ », a souligné M. Mahamane Ousmane.

Qui a qualité pour demander un titre foncier ?

Là aussi, le directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale précise que la loi a autorisé trois catégories de personnes à formuler la demande de l’immatriculation d’un terrain. Il s’agit soit du propriétaire du terrain ou les ayants droit ou encore le créancier du propriétaire. Lorsque le conservateur de la propriété foncière reçoit une demande, il essaye de vérifier l’identité de la personne ayant formulé la demande. Mieux, le conservateur doit s’assurer de la réalité de l’existence du terrain ou de la parcelle. « Bien évidemment, on regarde aussi les actes juridiques qui sont présentés, c’est-à-dire un acte de cession ou une détention coutumière ou un permis urbain d’habiter. Ces actes sont délivrés soit par la mairie, soit par les commissions foncières. Une fois que toutes les vérifications ont été faites, on estime que le dossier est recevable », a expliqué M. Mahamane Ousmane.

La composition du dossier

En plus de la demande, le requérant doit présenter une pièce d’identité en cours de validité et légalisée si c’est une copie ; l’original de l’acte de cession ou de la détention coutumière parce que lorsque le titre foncier va être établi, tous les actes de propriété antérieurs à celui-ci sont considérés comme nuls et de nuls effets. C’est dire que le titre foncier a pour effet de rendre inexistant ou d’anéantir les autres actes. Le requérant recevra à la fin du processus une copie originale de son titre foncier. En résumé, le dossier doit comporter la demande ; la copie légalisée de la carte d’identité en cours de validité ; l’original de l’acte de cession et enfin le plan de situation qui est un document délivré par le service de la documentation du Cadastre. Ainsi, chaque terrain est dans une commune et dans un lotissement qui a toujours un plan. On fait une extraction de ce plan afin de permettre en exergue la position géographique de la parcelle.

Face à l’escroquerie qui entoure ce marché du foncier, l’Etat a introduit un certain nombre de réformes pour une gouvernance foncière saine. Il s’est agi pour la Direction Générale des Impôts (DGI) de moderniser le système à travers une numérisation des bases de données existantes. Une fois que ce travail est fait, a dit le directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale, il faut s’attaquer à la mise en place d’un système de gestion informatisé. La source d’insécurité au niveau du foncier réside dans le fait que les documents administratifs sont souvent obtenus de manière facile surtout les détentions coutumières. « Depuis l’avènement de ces détentions coutumières comme acte de propriété, l’insécurité foncière s’est accrue », a relevé M. Mahamane Ousmane. « Nous devons nous attaquer à ces documents qui sont la source de l’insécurité. La détention coutumière, tout comme l’acte de cession permet depuis 2006, d’acquérir un titre foncier. Mais l’obtention d’une détention coutumière est un acte quasiment banal parce qu’il suffit de la signature d’un Chef de village ou d’un Chef de canton qui va être appuyé par un maire pour en être propriétaire. Généralement dans la pratique, les documents sont délivrés sans précautions minimales. Il y a eu beaucoup de cas d’escroqueries pareilles pour lesquels la justice a eu connaissance », ajoute-t-il. Malheureusement, déplore-t-il, les prétoires de la justice sont inondés d’affaires liées à des conflits fonciers parce que ceux qui détiennent traditionnellement les terres se voient souvent opposer une détention coutumière. «Cette dernière est utilisée pour faire un titre foncier. Or, les populations se voient souvent opposer un titre foncier par le détenteur sur leur propriété alors même que la procédure de purge de droit n’a pas été faite. C’est dire qu’il y a nécessité absolue de moderniser la façon dont nous faisons le titre foncier. Nous devons corriger les mécanismes par lesquels nous portons l’information pour éviter les litiges. Mais la question de la spéculation foncière est un problème d’ordre général. Le problème est réel ; il se pose avec acuité parce que la terre prend de la valeur», a indiqué le directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale.

Pour y parvenir, le directeur de la Fiscalité Foncière et Cadastrale estime qu’il faut impérativement, à l’image de ce qui ce fait dans certains pays, diminuer le nombre d’interlocuteurs et moderniser les outils de gestion pour pouvoir minimiser les risques liés à la spéculation foncière. Dans ce sens, la Direction Générale des Impôts (DGI) s’est inscrite dans un processus d’échange d’expérience des meilleures pratiques relatives à la gestion foncière. « Nous sommes dans un espace d’intégration qu’est l’UEMOA. La gestion du foncier urbain est très complexe tout comme celle du foncier rural. Mais l’élément fondamental pour maitriser le foncier est incontestablement le cadastre. Sur chaque mètre carré du territoire national, on doit savoir ce qui relève du domaine public de l’Etat ; du domaine privé de l’Etat ou encore ce qui est sous le régime de la propriété individuelle. Et cela, seul un bon cadastre permettra de maitriser tous les paramètres», souligne Mahamane Ousmane précisant toutefois que la modernisation du cadastre nécessite énormément des moyens sophistiqués modernes.

En effet, plusieurs techniques existent-t-elles que les levées aériennes ; satellitaires etc. «Notre territoire étant immense en termes de superficie, il faut absolument des moyens conséquents. L’administration fiscale donnera les moyens sur le long terme pour pouvoir maitriser le processus de maillage du territoire national à travers la modernisation du cadastre. D’ores et déjà, au niveau du cadastre, nous avons entamé ce qu’il est convenu d’appeler le cadastre numérique qui consiste à disposer en données informatisées l’ensemble des parcelles du territoire national. C’est un projet ambitieux qui vient de commencer. L’autre élément tout aussi fondamental est aujourd’hui les lacunes que le Niger a en matière d’état civil. Là aussi, il existe un projet qui est mis en place pour corriger ses lacunes. Lorsque ce projet de maitrise de l’état civil atteindra ces objectifs, nous aurons d’un côté un cadastre modernisé et de l’autre un état civil modernisé afin de prétendre à la maitrise de la question foncière au Niger», explique M. Mahamane Ousmane.

Hassane Daouda
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