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Tribune politique : Nous autres, les jeunes....

Publié le lundi 4 novembre 2019  |  Actuniger.com
Crise
© Autre presse par DR
Crise dans le secteur de l’éducation au Niger : Échauffourées entre élèves, étudiants et éléments des forces de l’ordre
Mercredi 4 octobre 2017. C’est aux environs de 11 heures locales que les élèves et étudiants des Instituts et Ecoles de formation Professionnelle et Technique du Niger (UIEPTN) ont investi les locaux du Ministère en charge des Enseignements Supérieurs.
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Les repères perdus

S’il existe un indice, qui puisse permettre, de jauger du bien-être d’une nation, c’est à coup sûr sa jeunesse, à condition qu’elle soit éduquée, responsable, et utilement productive. Au fil des siècles, chefs coutumiers et leaders religieux nous ont appris, pour toutes sortes de raison, que, la jeunesse a la préciosité d’un trésor, car elle est le temps des projets, l’âge de la force, le moment de l’action. Aussi, nous ont-ils enseigné que la jeunesse donne l’occasion de préparer sereinement ses vieux jours, et sa vie éternelle. Pour fixer cette conviction dans nos cœurs, de manière inébranlable, de sorte qu’elle nous accompagnât, et nous inspirât toute la vie, quelques récits historiques, quelques légendes ont suffit..., mais surtout, un adage : « la jeunesse est l’avenir de demain ».

Dans l’Histoire même de notre pays, cet adage est vérifié, et confirmé. Si, encore aujourd’hui, quelques figures, bien que largement méconnues, continuent de faire la fierté de notre nation et l’honneur de notre peuple, c’est incontestablement parce-que celles-ci surent, intelligemment et utilement, dépenser leur jeunesse. Conscients que, sur leurs épaules, pesait le destin d’une nation, plus que l’espoir d’une seule famille, elles ne se ménagerent aucunement. Citons-en quelques-unes, avec le risque d’être taxé de pédant. Ce n’est pas grave !

Commençons d’abord, par Abdou Moumouni Dioffo. Si nous savons tous qu’il donne son nom à l’Université de Niamey, il se trouve que nombre d’entre nous ignorent que, nigérien, il fut le premier agrégé de physique, de l’Afrique francophone. Intellectuel rigoureux, ayant flairé très tôt les problèmes auxquels seront exposées l’éducation et l’instruction des enfants en Afrique, il écrivit et laissa à la postérité un livre dont la pertinence n’égale que la nécessité " L’éducation en Afrique ", qui, depuis quelques temps, est librement consultable sur le Net. Ajoutons aussi que le sérieux et la qualité des travaux du Professeur Abdou Moumouni Dioffo lui valurent beaucoup de prix et de distinctions, au plan national comme international.

Évoquons ensuite, Boubou Hama. Il ne fut pas qu’Homme politique, mais aussi un écrivain à la plume belle et aux idées nobles. Soucieux de donner des repères aux enfants africains, en général, aux nigériens, en particulier, il nous livra " L’Aventure d’Albarka," et " Izé-Gani" entre autres. Également, et c’est là une preuve de sa hauteur de vue et de sa grandeur d’âme, dans ses livres " Kotia-Nima ", Boubou Hama invite la jeunesse à se battre pour la dignité de l’Afrique, tout en veillant à ne point verser dans le racisme. N’a-t-il pas écrit : « Le blanc en face du Noir ne sont-ils pas deux hommes qui peuvent s’habiller de noir et blanc ? Une tenue noire vaut bien une tenue blanche. Le reste est une banale question de goût ». ou encore « Pour que demain, aux générations futures, le passé ne soit entre les Hommes, que des fossiles mesurant les âges, des légendes merveilleuses, pensons, oublions que nous avons une couleur ! » ?...

Et puis, connaissons-nous, Shaïda Zarumey, cette poétesse de l’amour ? Avons nous déjà lu Fatouma Alassane, cette nouvelliste qui sait peindre les maux avec les mots, comme le peintre rend la beauté avec ses pinceaux ? Avons nous suffisamment rendu hommage à André Salifou ? à Léopold Kaziendé ? A Mariko Keletegui ? À Alfred Dogbé ? A Hawad ? À Abdoua Karanta etc..

Et, si la postérité, pour quelque raison que ce soit, n’a pas su faire connaître ces intelligences, vives et productives, ces raisons d’orgueil national, afin qu’elles purent servir de modèle aux générations suivantes, c’est qu’elle a causé un préjudice grave, comptable d’erreurs et d’errements, auxquels il nous faudrait collectivement remédier, concernés que nous sommes, tous.

Le constat

Par ces temps, il est devenu classique de dire que la jeunesse va mal. Effectivement, la jeunesse va mal. C’est moins un propos de mode, moins une opinion répandue, qu’une réalité à devoir constater et soigner, à moins que l’on ne soit frappé de cécité, ou que l’on manifestât une indifférence coupable, à l’égard de la nation. La jeunesse va mal, et dans la conscience de beaucoup, elle rime avec délinquance. Est-ce vrai ? Vérifions !

La justice pénale nous renseigne que, la population carcérale au Niger est fortement composée de jeunes, condamnés entre autres, pour des faits de viols, de vols, de recels, de meurtres, d’assassinats, d’avortement. Une réflexion poussée sur les profils des jeunes condamnés permet d’identifier aisément leurs mobiles... ( voir, entre autres, Situation des mineurs incarcérés au Niger synthese statistique (Etude réalisée du 27 novembre au 28 décembre 2011) Avec le soutien de l’UNICEF)

Les chaînes télévisées, en longueur de journée, la presse écrite, à lourdeurs de journaux, mettent en évidence la débauche à laquelle se livre une autre catégorie de jeunes. La consommation d’alcools, celle du cannabis, les rodéos de voiture, les spectacles obscènes et les propos grivois, hélas, relayés à grande échelle grâce aux réseaux sociaux, notamment, remettent gravement en cause nos mœurs autant qu’ils heurtent nos valeurs sociales, socle de notre identité plurielle. Le plus souvent, comme pour ne rien arranger, ce sont les établissements scolaires qui constituent le théâtre de cette débauche. Beaucoup de responsables académiques pourraient en témoigner.

De ce qui précède, l’on retient essentiellement que la jeunesse souffre de deux maux : la délinquance et la débauche, s’il est autorisé d’opérer une distinction entre celles-ci. Remarquons que, ceux des jeunes qui sont victimes de délinquance ou de débauche, ont des déterminismes sociaux qui ne sont pas pareils et des mobiles totalement différents, diamétralement opposés. Les uns fautent par nécessité, par jalousie sociale ou envie humaine, tandis que, les autres desaxent par vanité et sentiment d’impunité.

Nous affirmons, avec sûreté, que malgré ce sombre et inquiétant tableau, la jeunesse n’est pas coupable. Elle est victime. Voici pourquoi.

Les raisons

À maintes reprises, nous avons vu et appris que, des jeunes élèves, souvent dans la fleur de l’âge, ont perdu la vie, dans des rodéos. Nous avons aussi appris que, dans bien des cas, ce sont eux, qui, par cela, donnent la mort, ou causent des blessures physique et morale, à d’innocentes et indigentes personnes, sans en être inquiétés, ni judiciairement, ni moralement. Nous avons surtout, témoins horrifiés et scandalisés, vu que leurs parents se hâtaient, bien souvent, de remplacer leurs véhicules abîmées, par de nouvelles, le lendemain même : la loi est violée, la justice rompue, les victimes narguées. Tout ceci, quoi qu’on dise, jette dans le rang des « autres », une révolte, et dans leur coeur, un sentiment de frustration, une volonté de ressemblance ou de revanche. À qui la faute ?

À maintes reprises, nous avons vu des enseignants qui, moyennant quelques billets de banque, accepterent volontiers d’accorder des notes imméritées à des élèves, ou même de falsifier leur bulletins scolaires, pour leur permettre l’accès aux classes supérieures. La paresse est encouragée, car le mérite se monétise. À qui la faute ?

À maintes reprises, nous avons été témoins de ce que, à l’approche des élections, nombre de partis politiques visitent et mobilisent les jeunes, pour des meetings ou toute sorte de propagandes, avec pour seul leitmotiv : « Votez pour nous ! », accompagné de quelques craquants. À aucun moment, les idées ne sont énoncées, les projets expliqués. Sans doute que, les jeunes sont bons pour voter, mais pas pour comprendre ! À qui la faute ?

La liste est longue...

Les remèdes possibles

S’il est entendu que la jeunesse est victime, il ne faut point hésiter à lui venir en aide. Il importe, pour ceux qui veulent aider, d’abandonner toutes leurs condescendances, et anti valeurs qui maintiennent la jeunesse dans ses maux. Que nos parents nous imposent la vertu, nos enseignants, l’effort, et que les leaders politiques et associatifs cessent de nous considérer comme des faire-valoir, « des idiots utiles », ou encore, un simple capital - ou bétail - élecoral. Si nous sommes l’avenir de demain, il faudrait nous indiquer la voie de demain et surtout nous baliser le terrain..

Nous remarquons que, quelques structures étatiques, au plus haut niveau, proches en tous cas, encouragent l’effort scolaire en le récompensant. Nous disons que cela est bien. Si des actions sont menées au profit des jeunes, elles sont heureuses et bienvenues, naturellement. Si elles bénéficient à tous, sans distinction, elles sont nobles et égalisatrices. Si elles sont maintenues, durables et mises en perspective, avec le temps, tous les jeunes s’en sentiront concernés et, il n’est pas exclu que, des initiatives privées accompagnent l’État, ou s’inspirent de celui-ci. Dans les deux cas, la jeunesse est gagnante. Cela suffit.

Mais, disons ceci...

La République du Niger regorge de jeunes volontaires, amoureux du savoir et passionné des études, mais, qui en furent et sont encore brutalement séparés, par suite du décès d’un père, d’une mère, d’un être cher, autrefois pourvoyeur. Ceci est désolant et invite à la compassion. Et, comme la meilleure et efficace manière de compatir consiste moins à accompagner dans les larmes, qu’à tenter de les faire sécher, nous proposons ceci.

D’emblée, remarquons que, si les établissements scolaires et universités étatiques étaient réguliers, à l’abri de toute perturbation, ces jeunes auraient pu s’y inscrire. Mais, comme l’État-providence, partout au monde, est vraiment plus un but, qu’un impératif, il serait de bon ton que la République sauvât ces jeunes, valeurs sûres. Le moyen est très simple et facile pour l’État, en tant qu’autorité souveraine, maître de son territoire, choisisseur de ses lois et juge de ses politiques. Il lui reviendrait dorénavant, par voie décrétale, de fixer pour les établissements scolaires, instituts académiques ou universités privés, le devoir d’accueillir en leur sein, sans bourse délier, suivant quelques conditions vraiment nécessaires, et en nombre raisonnable, ceux des jeunes qui, justifiant de bon résultats scolaires ou académiques, se retrouvent, pour accéder aux classes ou cycles supérieures, sans le sous. Une telle mesure, légitime et profondément utile, n’aurait rien d’arbitraire ou d’illégal. Il suffirait à l’État de faire de son respect une obligation pour les établissements déjà établis, et une condition, pour ceux qui aspireraient à l’être.


On pourrait objecter que l’école privée constitue un luxe, et que s’y rend qui en a les moyens. C’est ignorer que, par ces temps qui courent, en vérité l’école privée constitue moins le signe d’une bourgeoisie qu’une nécessité, compte tenu de tout ce que nous savons de l’école publique. Ensuite, qu’on ne soupçonne point la mesure que nous proposons d’être un moyen d’injustice sociale. Elle devra être ouverte à tous les enfants de la République, et seulement basée sur des critères sociaux. Un auteur a écrit que « la justice est la première dette de la souveraineté ». Soit ! Mais, la formation de ses enfants pour un État constitue le palladium de sa dignité, peut-on ajouter. C’est aussi le lieu pour nous d’interpeller tous les acteurs académiques pour trouver des solutions définitives à ce qu’on pourrait qualifier d’enlisement au sein de certaines facultés où il est à la fois drôle et triste d’entendre qu’une licence s’obtient après cinq années

Interpeller, c’est tout ce qui, ici, est de notre ressort. L’auteur de ces lignes prie son lecteur non-averti de n’y voir aucun cynisme, mais de reconnaitre qu’il y a beaucoup de prudence et de sagesse à ne point s’aventurer sur des terres qu’on ignore, dans des domaines où l’on se passerait de toute divination.

Un mea-culpa nécessaire

Également, comme la guérison est aussi et surtout l’affaire du malade, nous, jeunes, avons à consentir des efforts nécessaires et sacrificiels. Remettons-nous en cause ! Quittons les sentiers battus ! Désertons nos conforts personnels ! Abandonnons nos immobilismes infertiles ! Envahissons les bibliothèques, et droguons-nous aux livres. Ils valent mieux que le cannabis ! Cultivons-nous! Engageons-nous ! Prenons la place qui est la notre ! Investissons les partis politiques et/ou les associations de société civiles ! Car, c’est bien en ces cadres que la possibilité est offerte de se faire une conscience politique, une éducation civique. Exigeons des leaders politiques et associatifs, qu’ils nous expliquent leurs visions avant de solliciter notre adhésion. Soyons critiques, sévèrement, mais sincèrement. Ne fuyons pas la politique, au motif qu’elle serait pourrie ou l’affaire des autres. En réalité, tout jeune qui se désintéresse de la politique, se désintéresse de sa nation, implicitement. C’est par la politique qu’on accède ou contribue à la décision publique, laquelle régit tous les pans de la société, de la vie privée jusqu’aux lieux de cultes. En clair, se désintéresser de la politique, c’est se denier le droit de dénoncer lorsqu’une gouvernance ne satisfait pas. C’est aussi laisser le pourrissement que nous dénonçons, s’enraciner au fil de l’eau, et s’installer définitivement.

Prenons la plume ! Sachons l’histoire de notre pays, elle nous donnera des clés de compréhension et des outils d’anticipation. Elle nous permettra surtout de prendre conscience que notre responsabilité est grande dans ce que doit devenir notre pays. Si nous sommes forts et travailleurs, il sera prospère et respecté. Autrement, il restera toujours inaudible dans le concert des nations, tendant toujours la main, empruntant toujours des idées...

Nous autres, jeunes, avons une place dans la République. Elle a besoin de nous. C’est sûr.

Quel est notre rôle ?....

Abdouk Malik Issoufa,

Étudiant en Droit, Homme de Lettres


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