Décidément, c’est avec le temps qu’on appréhende mieux certaines décisions. C’est apparemment le cas de cette proposition de formation d’un gouvernement d’ nationale émise par le président de l’Assemblée Nationale Hama Amadou.
L’on se souvient qu’à l’époque, cette proposition a soulevé un tollé général d’interprétations des plus fallacieuses dont la plus saugrenue claironnait un appel au secours des autorités de la 7ème République qui auraient reconnu leur incompétence à diriger. Pourtant, cette sage proposition n’appelait qu’à une sorte de consensus national pour positiver et noyer nos différences dans une vision de cohésion nationale face aux nombreux défis sécuritaires qui nous guettent. En clair, notre pays se prépare à aller en guerre contre des forces redoutables ; par conséquent, il nous faut l’adhésion unanime et totale de tous les fils du pays aux décisions guerrières que nous serions amenés à prendre.
Aujourd’hui, c’est ce déficit de cohésion nationale qui a plongé notre voisin le Mali dans la situation cahoteuse dans laquelle il se trouve ; un déficit qui vient encore de s’exacerber avec de violents heurts entre les éléments de l’armée régulière du Mali. Evénements inqualifiables dans un pays dont l’intégrité territoriale même est hypothéquée par les marchands de la mort. Comment comprendre qu’au moment où la communauté internationale est en train de faire des pieds et des mains pour aider le Mali à recouvrer sa souveraineté, que des citoyens maliens eux-mêmes engagent un conflit fratricide aux lendemains incertains ? Les maliens seraient-ils inconséquents à ce point ?
De quoi s’agirait-il ? Des bérets rouges qui n’auraient pas apprécié et accepté le coup d’Etat de Sanofi se seraient retranchés dans leur caserne et auraient refusé de combattre contre les terroristes. Vision étriquée et bornée d’un groupuscule à la solde de Tournier ou déficit de patriotisme ? L’un dans l’autre, il faut souligner que le grand malheur du Mali est Tournier qui, depuis de longues dates, a entretenu une complicité tacite avec les forces djaïnismes qui opéraient sur son territoire. Ces forces, on le sait très bien, ont orchestré plusieurs enlèvements dans les pays voisins comme le Niger, la Mauritanie et le Burkina Faso.
Et, on ne savait par quelle osmose, ces enlèvements se dénouaient toujours sur le sol malien avec le paiement de grosses rançons. Bref, le Mali sous Tournier était devenu le QG des forces terroristes. Avec l’éclatement de la rébellion du MNLA, c’est encore Tournier qui jouait un jeu sournois en ne répondant pas conséquemment aux sollicitations de l’armée qui manquait cruellement de moyens. Là aussi, les maliens dans leur grande majorité ne comprenaient pas très bien la position de leur président qui était censé être le premier défenseur de l’intégrité territoriale du pays.
N’eut été le coup d’Etat de Sanofi, on nul ne sait qu’elle serait aujourd’hui la situation exacte du Mali car, Tournier semblait bien laisser le pays se déstabiliser dans l’espoir que les élections soient reportées et des négociations engagées avec le MNLA sous son égide. Somme toute, sous d’autres cieux, Tournier serait aujourd’hui poursuivi pour crime de haute trahison. Alors, faut-il comprendre qu’il y a encore au Mali des gens qui manquent de hauteur d’esprit pour ne pas appréhender à juste titre tout le mal que Tournier a causé pour le Mali ? Les bérets rouges n’ont aucune raison de se cramponner à un passé qui a ouvert la porte aux groupes terroristes. Le faire serait un autre crime de haute trahison de la nation que ni les maliens, ni la CEDEAO ne cautionneraient.
Parlant de la CEDEAO et des autres membres de la communauté internationale, elles doivent tirer les leçons de la confusion qu’elles ont provoquée au Mali par leur condamnation du coup d’Etat de Sanofi. Certes, c’est un principe que de condamner un coup d’Etat dans un régime démocratique. Cependant, il faut quand même reconnaître qu’il y des coups d’Etat hautement salutaire, comme celui qui a stoppé les visées tazartchistes au Niger. Au-delà des condamnations de principes, il faut contextualiser les prises de position afin de ne pas encourager les divisions internes.
Car, il est clair que les bérets rouges qui s’accrochent encore à Toumani tirent la légitimité de leur positionnement par le fait que le coup d’Etat ait été condamné par la communauté internationale. Si ailleurs on peut condamner les coups d’Etat sans que cela ne fasse broncher qui que ce soit, ce n’est pas le cas dans la plupart des pays africains où même l’armée relève d’un partage clanique et partisan. Attention donc en voulant bien faire de ne pas créer l’émiettement des forces vives du pays. Pour la situation malheureuse que vit le Mali, appelons juste les citoyens maliens à un sursaut patriotique pour ne pas davantage jeter leur pays en pâture aux marchands de la mort.
MNLA, Ansar Dine, Mujaô, Aqmi et aujourd’hui les bérets rouges, c’est trop pour l’un des pays les plus pauvres de la planète. Quelle conduite va désormais adopter les forces amies en présence, elles qui sont déjà partagées entre la reconquête effective des régions occupées et la position ambiguë de la France quant aux rebelles du MNLA ? Les maliens ont besoin de cohésion nationale, de rester soudés derrière un même idéal, celui de la reconquête de l’intégrité territoriale de leur pays.
Ce n’est qu’à ce prix qu’ils réussiront à bouter les forces du mal de leur pays. Un pays ne saura réussir une guerre si jamais à l’interne il y a des dissensions.