Selon des sources dignes de foi, l’enquête entreprise par le ministre Issoufou Katamabé en vue de démêler l’écheveau et situer les responsabilités dans la dilapidation de plus 1000 milliards destinés à l’armement et à l’équipement des forces armées nigériennes, semble tourner en rond. Les enquêteurs, qui seraient toujours en Russie alors que le ministre Katambé est rentré depuis quelques jours, buteraient à des obstacles sérieux.
Outre le refus catégorique du général Wally Karingama de répondre à leurs questions, les choses semblent se compliquer à plusieurs niveaux. C’est pratiquement l’omerta. Si l’écriture comptable a bien laissé les traces de ceux qui sont impliqués dans ce dossier sulfureux, il reste que ce sont des gens qui relèvent d’une catégorie de Nigériens dit «intouchables». Pourtant, a appris le Courrier, la volonté d’aller jusqu’au bout et de faire payer les coupables n’a jamais été aussi résolue. Une volonté soutenue par le Président Issoufou qui ne compte pas faire ombrage aux enquêteurs dans leurs enquêtes. Selon des confidences, tous ceux qui sont liés à cette affaire, de près ou de loin, seront livrés à la justice.
Les vérifications se poursuivent en Russie, sous la conduite de l’armée
En Russie, alors que les vérifications sont loin d’être bouclées, le ministre Katambé est, dit-on, rentré à Niamey avec une bonne quantité d’éclairages qui font froid dans le dos. Les budgets de l’armée ont été utilisés, selon toute vraisemblance, à enrichir des individus plutôt qu’à servir à doter les Forces de défense et de sécurité de moyens et matériels militaires adéquats et en quantité. Des dénonciations de Maman Abou, fondateur du journal Le Républicain et proche des milieux du Pnds, aux auditions des chefs militaires par la commission Défense et sécurité de l’Assemblée nationale, en passant par les révélations de la presse quant aux contours de l’affaire, tout a été dit. Des commandes fictives pour des entreprises fictives, des surfacturations de très grande ampleur, des avions achetés que l’on ne voit nulle part, ce sont plus de 1700 milliards, rapporte-t-on, qui ont été dissipés.
L’armée est dans un dénuement regrettable, les morts s’accumulent tandis que ceux qui gèrent les ressources budgétaires affectées à son armement s’enrichissent
En ville, le débat fait fureur. Comment des gens ont pu s’enrichir sur des morts, s’interroge- t-on un peu partout. Personne ne sait exactement combien de Nigériens sont tombés sous les balles d’hommes non identifiés mais qui sont désignés sous le vocable de «terroristes». Rien que dans le cas d’Inatès, de Sanam et de Chinagoder, le Niger a officiellement perdu quelques 174 soldats. Des soldats que le Niger n’aurait, peut-être, pas perdus s’ils avaient disposé d’armements adéquats et en quantité. Il y a, d’une part, tous ces milliards dont le ministre Katambé cherche à connaître la destination et tous ces morts qui s’enchaînent, qui s’entassent sans aucune perspective notable d’envisager la fin, d’autre part. Au milieu de ces deux tableaux qui s’excluent catégoriquement, il y a tout ce que l’ancien chef d’État major général des armées, Ahmed Mohamed, a dit devant les parlementaires : manque de carburant suffisant, insuffisance de pièces détachées et de pneumatiques, commandes d’armements et d’équipements non conformes aux besoins et aux attentes de l’armée, insuffisance de gilets pare-balles, de casques, de couchages, de tenues et de chaussures, non-respect de la périodicité de la maintenance des aéronefs réduction du budget du Service central de lutte contre le terrorisme (CCLCT), etc.
Kalla Moutari, Wally Karingama et les autres seront bientôt devant la justice
Si les Nigériens ont perçu une lueur d’espoir dans l’aboutissement des enquêtes en cours, ils risquent de déchanter; Selon des sources très crédibles, les plus puissants des mis en cause refusent de se prêter au jeu des interrogatoires des enquêteurs. Mais ils finiront, a-t-on confié au Courrier, par se plier aux exigences de la justice tôt ou tard. Si des rumeurs prétendent que le ministre Katambé est déjà essoufflé, bloqué dans sa volonté d’aller jusqu’au bout, des sources sérieuses indiquent qu’il n’y aura pas de retour en arrière dans cette affaire. Et que, Kalla Moutari, Wally Karingama et tous ceux qui sont soupçonnés d’avoir partie liée avec cette scabreuse affaire vont être mis à la disposition de la justice. S’ils refusent de répondre aux enquêteurs, précisent-elles, ils vont le faire devant le juge d’instruction et dans des conditions de détention. L’institution militaire, selon ces mêmes sources, n’est pas prête à laisser passer une telle incurie qui a coûté la vie à des centaines de soldats nigériens.