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Communication sur le Coronavirus : Issoufou Mahamadou et Bazoum Mohamed, deux hommes, deux visions

Publié le lundi 6 avril 2020  |  nigerdiaspora.com
Issoufou
© Autre presse par DR
Issoufou tente difficilement de rassurer Bazoum Mohamed
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La pandémie du coronavirus est arrivée au Niger, avançant à petits pas sournois, et poussant le gouvernement à prendre des mesures draconiennes qui impactent la vie paisible des citoyens. En l’absence de tout remède et de tout vaccin, la prévention qui dicte des directives comportementales, reste, hélas, la seule solution. Et les Nigériens, comme ailleurs, doivent prendre leur mal en patience, pour comprendre l’urgence des mesures prises. Dans le pays, les uns et les autres doivent comprendre que c’est d’un problème réel que l’on parle, des ravages d’une maladie encore peu cernée par la science que l’on parle sans trop comprendre souvent grand-chose. Le coronavirus de la Chine, a fini par investir le monde entier, poussant les hommes à se cacher dans les maisons afin d’amoindrir les risques de rentrer en contact avec le Covid 19. Et nous sommes blottis, craintifs, derrière le paravent de notre confinement tardif.

C’est dans un contexte de crises politique, universitaire et financière qu’intervient l’enregistrement des premiers cas du coronavirus dans le pays, réveillant le peuple de ses malaises, et obligeant le gouvernement à communiquer avec un peuple avec lequel, pourtant, le contact n’est pas évident. Mais la situation donnait tellement d’appréhensions que le gouvernement, apeuré, ne pouvait s’offrir le luxe d’ignorer le peuple et de ne pas communier avec lui, même si jusqu’ici, par rapport à d’autres questions tout aussi préoccupantes, il s’est refusé à avoir la sagesse indispensable à ramener la quiétude et à pousser un peuple à la tolérance, au pardon, à la communion surtout. en des temps faits d’incertitude et de menaces multiples, potentielles. La pandémie qui a mis en déroute les systèmes de santé des puissances du monde, et défié sa science devenue impuissante et poussé au doute et au tâtonnement, logiquement, ne pouvait que donner plus frayeur sous nos tropiques surtout quand on peut savoir pour le cas du Covid 19, qu’avant le petit peuple, ce sont les princes qui avaient les privilèges du voyage qui étaient les plus exposés pour venir souvent le propager dans le pays. Personne, théoriquement, ne pouvait donc supposer qu’il n’est pas concerné pour être réfracteurs aux mesures qui peuvent préserver chacun et tous. On peut d’ailleurs se réjouir que depuis des jours les Nigériens sont devenus scrupuleux.

Les premières communications du gouvernement ont peu passé dans le peuple car la Renaissance est d’autant plus en rupture avec son peuple qu’elle a perdu la crédibilité qui pouvait laisser les Nigériens lui devoir de l’écoute et de l’estime. Aussi, s’était-elle agacée que les Nigériens ne respectent pas ses directives, attitude rebelle pour laquelle, Bazoum Mohamed, le ministère de l’intérieur et candidat du pouvoir, ne voit de solution que la brutalité et la prison, ainsi qu’il l’a fait comprendre à travers une vidéo qui a circulé sur les médias sociaux. Or, cette situation ne rend compte que des malaises d’un pays gravement divisé, vivant les douleurs de ses fractures nombreuses pour lesquelles ce gouvernement est incapable de suture réparatrices. Lorsqu’un peuple ne peut plus se retrouver à travers ses princes et leurs manières de gouverner, le comportement de celui-ci ne peut qu’être celui-ci, fait d’indifférence, d’incurie et souvent aussi de mépris à son endroit. Comment pouvait-il en être autrement quand on sait que jamais ce régime n’a montré quelques soucis pour son peuple, ne pouvant avoir pour lui que du mépris et de la brutalité ? Ses relations avec le peuple n’ont jamais été civilisés car pour tout, se cachant derrière une majorité, il a pensé que son opinion s’impose à tous, croyant par sa conception étriquée de la démocratie, ainsi que l’a conceptualisé son ministre porte-parole, non sans caricature, que la démocratie serait la dictature de la majorité sur la minorité sachant pourtant que l’on est dans une situation où ces notions ne pouvaient avoir sens car tout le monde sait la qualité discutable des élections qui les définissent. Mais très vite, à l’intérieur du pouvoir, sans doute ayant compris que le Niger est aujourd’hui une bombe sociale et politique, certains ont compris que le choix des Bazoumistes qui ne voient partout que la brutalité, ne pouvait être la réponse et ont été ingénieux à appeler les leaders d’opinion, les chefs religieux, les artistes, les hommes de médias, à s’inviter dans la campagne pour appeler les Nigériens à plus de responsabilité pour s’approprier les mesures qui leur sont conseillées afin qu’ensemble, nous nous en sortions, avec moins de dégâts. N’a-t-on d’ailleurs pas entendu quelques détonations lointaines ici et là, à la suite de l’interdiction des prières collectives ? Oui, c’est cela le Niger d’aujourd’hui, grignoté par des malaises, des malentendus profonds qui font qu’aujourd’hui nombre d’entre eux se vouent des animosités irréductibles, mais bien inutiles. Alors que le premier ministre, et le président de la République peuvent avoir un discours mesuré ces derniers jours, pour attendre des Nigériens des comportements qui nous préservent du Covid 19, et que l’ensemble de la classe politique, les acteurs de la société civile, les artistes chanteurs et comédiens, les journalistes, et les sportifs de haut niveau peuvent mêler leurs voix à celles des autres pour tenir une parole qui rassemble, l’on a été surpris d’entendre un autre dans un tout autre registre en déphasage avec l’élan national et nationaliste que l’on peut entendre ici et là depuis quelques jours.

Bazoum, le gaffeur…

L’on est tenté de dire, « »Gaasa» coronavirus ! » quand on peut voir Télé Sahel offrir une plage au représentant de Mamane Ousmane et à Ladan Tchana pour parler aussi tranquillement, posément, pendant des minutes gratuites, et passer un appel aux Nigériens par rapport au coronavirus, sans doute que l’on aura compris que l’heure est grave et qu’enfin l’on aura compris la nécessité de taire nos rancoeurs et nos divisions pour nous atteler à faire un front commun contre la pandémie, toute chose qu’on n’aura été capable de réussir contre le terrorisme, faut-il le regretter. Le Niger, à vrai dire, a besoin de cette paix, notamment de cette paix des coeurs pour humaniser nos rapports et sauver une nation de sa désagrégation.

D’autres comme Hamissou, comme Sala Habi se sont prêtés au même jeu, appelant sagement les Nigériens à plus de responsabilité face à la menace «coronavirale». Mais qui n’a pas été choqué par l’intervention du ministre de l’Intérieur, le sieur Bazoum qui nourrit pourtant des ambitions présidentielles pour espérer gouverner le pays après Issoufou Mahamadou et qui, engagé dans la même campagne de communication à l’endroit des Nigériens, très maladroitement, s’est borné à ne demander qu’aux seuls militants de son parti, le PNDS, de ne pas organiser de manifestations de réjouissance et de ne même pas aller chez celles des autres. Faut-il comprendre qu’il n’a que faire de la santé des autres Nigériens et notamment de ceux de l’APR et des autres membres de la MRN qui soutiennent le régime ? Sans doute que les uns et les autres ont bien enregistré et lui rendront sa monnaie le moment venu. Par de telles maladresses, le président pourrait bien avoir compris qu’il avait à ne pas interférer dans le débat du parti pour le trancher et lui choisir un tel candidat dont les gaffes d’un point de vue de la communication politique sont notoires, car incapable d’affiner ses communications. Peut-on avoir un tel esprit gravement sectaire dans des situations aussi graves et justifier ses projets présidentiels ? C’est maintenant seulement qu’on peut comprendre son attitude à faire ces remontrances à Jean Olivier de Sardan qui écrivait à ses « amis » pour leur dire que leur gouvernance pèche par son défaut de qualité, reproche qu’il n’avait pas aimé et qu’il dénonçait, allant jusqu’à réfuter l’amitié. Faut-il dès lors comprendre que dans cette aventure présidentielle forcenée, le problème de Bazoum reste Bazoum luimême ? Quand on peut voir les débats que cette maladresse communicationnelle a enflammés sur les réseaux sociaux, l’on ne peut que se rendre compte à quel point cette candidature déjà mal partie s’enfonce avant l’heure et plaindre le président qui a opéré un tel choix pour le PNDS, contre le PNDS peut-on croire.

D’ailleurs, l’on peut avoir l’impression que malgré cette complicité, les deux hommes rament à contre-courant, n’étant pas sur la même longueur d’onde. Ayant la responsabilité du pays, Issoufou sait les comportements que l’Histoire attend de lui pour savoir gérer au mieux le sort de plus de vingt millions d’âme. Une telle responsabilité n’est pas mince. Comment donc comprendre, pendant que le gouvernement, le président et le premier ministre en tête, communique pour créer les conditions d’un apaisement et d’une cohésion sociale autour des défis qui sont les nôtres aujourd’hui, lui reste dans la périphérie, à défendre et à ne soucier que d’un clan ? Peut-il d’ailleurs savoir que le PNDS dont il parle ne lui est pas entièrement acquis pour compter sur lui pour son improbable aventure ? Peut-être faut-il croire que Bazoum est désormais isolé, et qu’il est seul à être dans cette posture dangereuse qui ne sied pas à l’homme d’Etat. Lorsqu’on sait que dans l’opinion, les Nigériens sont nombreux à douter de la fiabilité de sa candidature, et qu’au sein même du parti celuici est profondément divisée autour de son choix imposé, en communiquant si gauchement, c’est lui-même qui sape son projet, détruit son image et pousse davantage de militants du parti à douter de ce qu’il soit capable de mener à bon port la mission et à renforcer les Nigériens dans leur doute relativement à sa candidature.

Deux hommes, deux visions…

Faut-il croire ainsi que le rapportait un journal la semaine dernière, que le président sortant et son dauphin ne sont plus en harmonie ? Le dernier message à la nation du président de la République pourrait le corroborer lorsque dans son discours, entre autres mesures, il décide de sortir des prisons nigériennes surpeuplées, quelques 1540 détenus et qu’au même moment, circule cette vidéo du « toutpuissant » ministre de l’Intérieur qui menace d’arrêter les gens et de les envoyer en prison si jamais ils bravaient leurs indictions, notamment de prier dans les mosquées. Même si Issoufou ne peut pas avoir les mains blanches comme neige dans la gouvernance qu’on décrie dans le pays, il reste qu’il est très différent de son poulain. Avec tous les événements que l’on a connus dans le pays, le régime n’a pas bonne presse et il va sans dire qu’il en a conscience pour savoir qu’il ne peut plus continuer dans la même lancée à mépriser les autres. C’est peut-être ce moment du coronavirus et les défis qu’il pose – pour d’autres bien avant – qui a amené le président à mesurer l’ampleur de la dégradation de la situation d’un pays qu’il pouvait, s’il devait manquer de peu de précautions, laisser à la décrépitude la plus humiliante pour notre histoire. Les Nigériens veulent s’inscrire dans une dynamique nouvelle pour sauver le pays d’errements. Comment ne pas le croire, quand après le message du président Issoufou rendu public ce vendredi soir, le samedi, le pardi de Hama Amadou publie à son tour un communiqué de presse pour saluer le courage des mesures anciennes et nouvelles envisagées pour faire face à la pandémie au Niger ? Il rappelle notamment entre autres mesures, « les remises gracieuses de peines » annoncées qui semblent être les décisions courageuses et sages surtout quand on sait les raisons pour lesquelles certains nigériens sont en prison. Le Moden Fa Lumana, et sans doute toute l’opposition, partagent cette opinion, celle de la nécessité impérieuse pour ce pays de se retrouver, de faire enfin la paix, après une longue saison orageuse de politique faite d’agressivité, d’intolérance, de négation de l’autre. Dans son communiqué de presse, le parti de Hama Amadou, sous la signature de son président par intérim, M. Tahirou Saidou, « […] salue ces mesures et [dit être]disposé à soutenir toute action tendant à une mobilisation des Nigériens en vue d’une cohésion nationale forte pour faire face au fléau du Corona Virus, comme à tout autre fléau afin de consacrer nos énergies à la construction nationale ». Les Nigériens doivent retrouver leur humanité pour gérer avec tact leurs contradictions, leurs différends, tout en préservant leur cohésion, leur unité. Ceci ne saurait se faire avec la menace, encore moins avec la prison qu’un autre peut brandir comme un trophée de sa gloire pourtant en panne.

La classe politique n’a plus à jouer, par ses caprices, avec le destin de ce pays pour comprendre les charges dont l’Histoire l’investit, et plus qu’un autre, c’est le chef de l’Etat qui est le plus interpellé. Peut-il d’ailleurs se rappeler de ce cri de coeur de Mamane Ousmane : « Issoufou Mahamadou, disaitil en substance, devait faire attention pour que le Niger ne meurt pas dans ses bras ». Cette petite phrase dit tout.
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