Hama Mamoudou, maire de la commune urbaine de Téra : « Les distributions gratuites des vivres ont contribué à atténuer les souffrances des populations pendant la période de soudure »
Dans le cadre de la célébration de la fête tournante du 18 décembre 2019, votre journal a effectué une mission de terrain dans le département de Téra où, l’équipe a eu un entretien avec le Maire de la commune urbaine. Dans cette interview, il parle des activités de sa commune, des actions prioritaires et des sources de provenance des financements.
Monsieur le Maire, pouvez-vous nous présenter brièvement la commune urbaine de Téra ?
La commune urbaine de Téra a une superficie de 2 300 km2. Elle est composée de plusieurs groupes communautaires en majorité les Sonraï, les Peulh, les Touareg. Mais on trouve aussi des Haoussa, des Mossi et des Yorouba. Elle est située au Sud-Est par la Commune de Dargol, au Nord-Est par la commune de Kokorou, au Nord-Ouest par la commune de Bankilaré et au Sud-Est par la commune de Diagourou. La population pratique l’agriculture, l’élevage et le petit commerce, un peu développé dans la zone. O note également la pêche, l’artisanat et d’autres activités.
Quelles sont les secteurs prioritaires et les actions que vous menez dans votre commune pour son émergence?
A Téra, le secteur prioritaire est l’hydraulique en un mot l’eau potable. La commune est sur le socle du Liptako Gourma où le problème d’eau se pose très souvent. Les eaux de surface ne sont pas retenues et les eaux de nappe. Téra ville qui connaissait avant ce problème, ne vit plus de cette préoccupation à cause des actions de la renaissance 2 et du gouvernement. Ensuite avec nos partenaires, nous sommes en train de faire des forages et des mini- AEP (Adduction d’Eau Potable) multi villages. C’est ce qui peut nous aider à régler ce problème dans les villages environnant qui sont des milieux de bétail. Notre deuxième action constitue, la sécurité alimentaire où le gouvernement fait de son mieux avec ses 5 phases de vente à prix modéré dont chaque phase est composée de 70 tonnes pour la commune. Cela a empêché la flambée des prix des céréales sur le marché. Nous avons des sites de production de tomates. Les producteurs gagnent leur vie dans ce travail. Nous avons aussi initié la production du Moringa. C’est une plante qui a plusieurs vertus médicinales. Dans ce domaine, un site de deux hectares est attribué aux femmes et deux autres hectares aux jeunes. Ce sont des cibles mieux indiqués où ça peut profiter. En ce qui concerne les femmes productrices, elles sont rentrées dans la phase de sa transformation en sirop. Cela leur a valu un prix au SAHEL-Niger 2018. Elles font également d’autres transformations dans l’agro-alimentaire qui leur apportent beaucoup de revenus.
Il faut aussi noter que le gouvernement a toujours appuyé les communautés par les semences améliorées. Donc en ce qui concerne la sécurité alimentaire, beaucoup de choses sont réalisées. La seule inquiétude, dans trois ou quatre mois, nous n’aurons pas d’eau dans plusieurs contrées c’est pourquoi, nous cultivons des semences améliorées et précoces.
Dans le secteur de l’éducation, nous nous battons pour améliorer les conditions d’étude et de travail des enseignants pour assurer la construction des classes, des latrines, et de fourniture des tables-bancs. Ces financements sont assurés par le budget participatif qui dicte les priorités des communautés. Dans le secteur de la santé, la commune dispose de plusieurs Centres Intégrés et de cases de santé où nous avons des agents. La commune appuie ces établissements sanitaires selon sa capacité et le besoin du centre de santé. Nous avons aussi des pistes latéritiques au niveau de la ville pour faciliter la mobilité et autour duquel, il y a des caniveaux permettant de faire l’assainissement des drainages des eaux pendant la saison pluvieuse. Nous avons aussi acheté une chargeuse pour lutter contre la masse des déchets que nous évacuons sur un site provisoire de décharge situé à cinq kilomètres de Téra.
D’où proviennent vos principaux financements pour mener les activités de la municipalité ?
Notre principale ressource vient de la collecte des taxes de marchés. Nous avons un marché hebdomadaire assez important qui nous procure beaucoup de choses et un marché à bétail sous régional dont les principaux clients viennent du Nigeria et du Bénin à part les nationaux. Les partenaires nous aident aussi à travers la coopération décentralisée. En effet depuis 1996 avec Bonneville en France nous soutient dans le domaine de la santé, de l’éducation, du maraîchage et de l’assainissement. Nous avons également le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) qui dans le domaine de l’hydraulique a réalisé des mini AEP multi villages dans les zones où, on ne pensait pas avoir de l’eau. Il y a la coopération Suisse qui est en train de nous construire un marché. Cette même coopération a réalisé un mini AEP multi village à Foneko. Dans le secteur de l’enseignant, l’ONG vision mondial, la coopération allemande à travers la GIZ nous soutiennent dans plusieurs secteurs. Il faut aussi préciser qu’au niveau de la taxe municipale, nous avons malheureusement de l’incivisme fiscal. Avant les populations ne voulaient pas acheter les taxes, mais aujourd’hui, comme c’est le budget participatif où les populations définissent les priorités que la commune doit financer. Le fonctionnement de la mairie n’est pas un investissement on nous juge sur nos investissements. Nous avons des agents qui sont au niveau de l’hôpital et des écoles que nous payons sur le budget. Malgré nos maigres ressources, nous n’avons jamais fait des arriérés.
Les partenaires nous soutiennent à financer notre plan d’action sur le terrain par exemple la canalisation de l’eau, le réseau californien et sur le plan de semence. Le reste c’est la mairie qui s’en occupe. Aujourd’hui, les femmes sont autonomisées dans le domaine de culture maraîchère.
Dites-nous les principaux défis qui vous attendent pour le développement de votre commune
Les défis à relever sont nombreux surtout dans une commune où l’incivisme existe encore. Nous avons beaucoup d’ambitions, mais parfois nous sommes bloqués. Parce que, c’est la réalité du terrain qui commande. Par exemple nous disposons de 90 écoles dans la commune, quelques-unes ont besoin de classes à matériaux définitifs et de tables-bancs. Cela constitue un défi à relever pour que nos enfants puissent étudier dans un cadre acceptable. Dans le cadre sanitaire, les évacuations des malades nous causent beaucoup de problèmes, mais avec le plan d’action, nous arrivons à nous en sortir. Notre appui pour l’hôpital de district est soit en carburant ou parfois nos véhicules quand les ambulances ne sont pas sur place. Il faut doter également ces centres sanitaires en produits pharmaceutiques. Nous avons mis des outils pour montrer aux citoyens que la mairie est là pour eux. Il est important que le citoyen contrôle et surveille tout ce qui se passe dans la commune. Le conseil municipal s’investit pour la communauté, c’est pourquoi, nous sommes rentrés dans un groupe de coopération transfrontalière avec les communes du Burkina Faso, du Mali, des partenaires comme l’Autorité du Liptako Gourma qui nous aident dans plusieurs domaines.
Quel était la contribution de la commune dans le cadre l’organisation de Tillabéri Tchandalo ?
Dans le cadre de la fête de Tillabéri Tchandalo, la commune accompagne les artistes et les sportifs dans leur acheminement et le matériel qu’ils utilisent pendant les compétitions. Récemment notre équipe de Karaté que nous accompagnons a ramené 9 médailles sur les douze mis en compétition à la coupe du Président de la République. Parmi les récipiendaires, deux ont été sélectionnés dans l’équipe nationale du Niger. C’est une fierté pour notre département et nous allons nous battre pour les aider. Il y a également l’équipe du football de Téra ‘’Askia’’ qui était en première division au niveau de la région à la campagne passée. La troupe artistique de Téra s’impose aussi sur le plan culturel.
Comment se présente la situation sécuritaire dans votre commune ?
Au niveau de la commune urbaine de Téra, la situation sécuritaire est calme. Nos écoles et marchés fonctionnent normalement. Mais comme nous sommes voisin de certaines communes de du Burkina Faso et de la zone de Goroual, la psychose reste. Mais si non le calme est totalement revenu dans la commune urbaine de Téra.
Comment avez-vous gérer le soutien du gouvernement au sujet de la distribution gratuite des vivres pendant la période de soudure au niveau de votre commune ?
Nous avons eu cinq (5) phases mensuelles de distributions gratuites. Nous avons des centres secondaires qui vont prendre les 75% à l’intérieur et les 25% au niveau urbain. Ce sont les mêmes phases qui reviennent. Parfois, nous avons du mil, du maïs ou du sorgho. Mieux, à part cette phase de vente à prix modéré, nous avons trois phases de distributions gratuites d’environ 210 tonnes pendant les mois les plus critiques de juillet, août et septembre. Cela a fait que les prix de vente des céréales sur les marchés n’ont pas connu de fluctuation cette année. Ces actions du gouvernement sont à saluer. Elles ont contribué à atténuer les souffrances des populations en cette période de soudure. Actuellement, les producteurs commencent les travaux maraîchers que nous faisons tous pour les accompagner avec le soutien de l’Etat et de ses partenaires.
Je profite des colonnes de votre journal pour appeler les populations de notre département, que personne ne vient à notre place développer la commune. Nous devrons travailler pour faire avancer notre commune. Il faut souligner que, nous avons besoin des partenaires au développement et pour ça, nous devrons manifester notre engagement à travailler. Pour ce faire, j’ai lancé un appel à la diaspora de venir investir dans la commune et s’acquitter de leurs taxes. La mairie a fait un lotissement dénommé ‘’diaspora’’ pour que nos concitoyens qui sont à l’étranger puissent se procurer de parcelles et faire des constructions belles et modernes.