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Pandémie du coronavirus et processus électoral au Niger : La constitution va-t-elle être mise entre parenthèses ?

Publié le mercredi 29 avril 2020  |  nigerdiaspora.com
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© Autre presse par DR
Pandémie du coronavirus et processus électoral au Niger : La constitution va-t-elle être mise entre parenthèses ?
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Dans deux mois exactement, soit le 17 juin 2020, la DIFEB (direction du fichier électoral biométrique) remettra le fichier électoral biométrique au président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Une échéance qui semble approcher au galop sans que le processus d’enrôlement ait connu une avancée rassurante. Dans l’aire 2 où il a démarré il y a quelques semaines, il reste encore beaucoup à faire. À Zinder, Maradi et Diffa, le processus bute à de sérieuses difficultés. Parmi les plus récurrentes, celle de la démission d’agents d’enrôlement à qui il faut sans cesse trouver des remplaçants. À Niamey, il a été carrément suspendu dans le cadre de la lutte contre le coronavirus. Or, il reste encore les arrondissements communaux 4 et 5 à faire. Une situation qui vient aggraver davantage le retard déjà accusé dans la mise en oeuvre du chronogramme de la Ceni. Me Souna Issaka, le président de la Ceni, a du pain sur la planche. Car, bien avant la remise officielle du fichier électoral biométrique, il devra franchir une étape cruciale ; celle de l’affichage et de la réclamation. Selon la loi électorale nigérienne, les listes électorales biométriques provisoires sont affichées dans toutes les communes, les quartiers et villages du pays, en clair sur les lieux d’enrôlement durant deux semaines. Durant cette période, les électeurs sont appelés à vérifier et à faire éventuellement des réclamations. L’électeur régulièrement enrôlé mais qui ne voit pas son nom sur la listes électorale est fondé à réclamer correction afin d’être pris en compte. Cette période, selon toute vraisemblance, risque d’arriver en plein état d’urgence.

Au stade actuel déjà, l’on voit mal la Ceni remplir son contrat à terme.

La pandémie du coronavirus, qui s’étend progressivement sur le reste du pays, avec des cas officiellement déclarés, apprendon, dont six cas à Dosso, six cas à Zinder, deux cas à Maradi, 11 cas à Tahoua, et deux cas à Tillabéry, va durement impacter sur le processus. La lutte contre le coronavirus étant la raison qui a occasionné la suspension de l’enrôlement à Niamey, il est fort probable que la Ceni arrête également les activités dans les trois autres régions de l’aire 2. Au stade actuel déjà, l’on voit mal la Ceni remplir son contrat à terme. Même sans le coronavirus, le retard est incompressible. La Ceni est extrêmement à la traîne. Au 28 janvier 2020, en principe, la phase d’affichage, de réclamation, de recours, de contentieux et de la correction des listes électorales de l’aire (Tillabéry, Dosso, Agadez, Tahoua) devrait avoir été bouclée. Pourtant, ça n’a pas été le cas. En fait, tout le monde sait que la Ceni ne pourra pas remettra le fichier électoral à date.

L’article 47 de la constitution indique que « en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels ou proroger le mandat pour quelque motif que ce soit »

On peut dire que le coronavirus est une sérieuse aubaine. Aussi bien pour la Ceni qui trouve ainsi un formidable alibi pour justifier son retard, mais également pour les autorités nationales qui ont constitutionnellement le devoir d’organiser les élections de fin de mandat. Mais les choses ne sont pas aussi simples que ça. Car, si la pandémie du coronavirus est un fait indépendant de la volonté des autorités actuelles, il reste que la Constitution nigérienne n’offre aucune excuse pour ne pas tenir les élections à date. L’article 47 de la constitution indique que « en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels ou proroger le mandat pour quelque motif que ce soit ». Une Disposition qui, selon l’article 175 de la même constitution, ne peut être susceptible de révision. « Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie, entre autres, lorsqu’il est porté atteinte aux dispositions des alinéas 1 et 2 de l’article 47. Juridiquement, il n’existe, donc, aucune parade possible pour ne pas organiser les élections à date.

La constitution va-t-elle être mise entre parenthèses ?

La situation est confuse. Pour un gouvernement habitué à faire les choses, non pas selon les prescriptions constitutionnelles mais selon son bon vouloir et son agenda politique, il est fort à parier qu’il peut se permettre cette permission du coronavirus. L’opposition, pourtant, est aux aguets. Depuis des années, elle est persuadée que le régime en place veut délibérément traîner les pieds afin de ne pas organiser les élections à date. Avec cette histoire de coronavirus, elle a bien senti un alibi qui pourrait être mis en avant par le pouvoir. Elle a alors tiré la sonnette d’alarme en déclarant qu’elle n’admettrait aucune exploitation politicienne de la lutte contre la pandémie. Que va-t-il se passer ? C’est la grande question à laquelle tout le monde songe et à laquelle, pour le moment, il n’y a pas de réponse. La constitution va-t-elle être mise entre parenthèses ? Pour un pays qui a connu, il n’y a pas longtemps, une expérience douloureuse de dépassement de mandat présidentiel, les risques d’une déflagration sociale sont grands. Déjà, pas de bisbilles à caractère politique ou social pourrissent le climat national.

Au Mali voisin, malgré la pandémie, les autorités nationales ont maintenu la date des scrutins

Le processus électoral ne fait pas bon ménage avec le coronavirus, c’est certain. Et pourtant, il va falloir trouver une solution avant terme. Le bigbang serait déplorable. Au Mali voisin, malgré la pandémie, les autorités nationales ont maintenu la date des scrutins. Au Niger, les suspicions sont encore plus prononcées, mais rien de rassurant ne se dessine à l’horizon. C’est comme si les acteurs ont décidé de se fier au destin et laissent faire, en attendant de découvrir, du jour au lendemain, ce qu’il y a au bout du chemin. S’il est clair que la classe politique, dans son ensemble, n’a accordé aucune carte blanche au Président Issoufou Mahamadou, en fin de second et dernier mandat, il reste que tout semble l’être. Chacun attend et tout le monde a peur de ce qui pourrait arriver. Au sein du pouvoir, comme ailleurs, l’angoisse est grande. Les appétits s’aiguisent et personne n’est sûre de quoi que ce soit. Dans les rangs du Pnds, qui a dû investir son candidat officiel à l’élection présidentielle deux ans avant le terme pour couper court aux ragots et courants d’ambition multiples, le climat est aussi à l’expectative. Mohamed Bazoum, laisse-t-on entendre, aurait de plus en plus de doutes quant à la sincérité de certains de ses soutiens. Quant au chef de file de l’opposition et président du Moden Fa Lumana Africa, il vient récemment de sortir de prison par grâce présidentielle. Toutes les portes sont, donc, ouvertes. Quelle est celle qui s’ouvrira pour le Niger ? That is the question, comme disent les Anglais.
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