Deuxième épicentre de la maladie du coronavirus au Niger, la région de Zinder enregistre ces derniers jours une hausse notable de cas. Face à cette situation, les autorités régionales et municipales alertent sur la gravité de la situation et annoncent le renforcement des mesures de lutte contre la pandémie édictées par le gouvernement. Il s’agit notamment du port obligatoire des bavettes des les lieux publics.
C’est un véritable cri d’alarme que viennent de lancer les autorités régionales et sanitaires de Zinder, deuxième ville du pays, face la propagation exponentielle constatée ces derniers jours, des cas de patients atteints de coronavirus. Face à la gravité de la situation qui suscite des inquiétudes depuis quelques jours, les autorités ont convoqué une réunion d’urgence ce jeudi 7 mai sous la présidence du gouverneur de la région Issa Moussa. A cette occasion, le gouverneur a alerté sur la gravité de la situation qui prévaut actuellement dans la région avec à la date d’hier, 47 cas enregistrés dont 4 décès, ce qui fait de Zinder, le second épicentre de la pandémie au Niger. « Nous avons tenu à convoquer cette réunion élargie parce que l'heure est grave dans la région de Zinder. Je dis bien que la situation est grave » a martelé le gouverneur Issa Moussa qui s’est étonné de « ce sombre tableau ». En effet, a-t-il rappelé, depuis l’apparition de la pandémie au Niger, la région est l'une des premières du pays à avoir organisé des réunions avec les différentes couches socioprofessionnelles ainsi que la mise en place d'un comité de suivi de la situation. Cependant, a déploré le gouverneur, « le constat est aujourd’hui amer car nous assistons à un relâchement du respect des mesures édictées par le gouvernement ». Il a en ce sens expliqué que les dispositifs de lavage des mains installés ne sont plus utilisés par la population et les rassemblements populaires notamment les cérémonies de mariages, de baptêmes et lors des décès se poursuivent. « C'est pourquoi nous avons enregistré ces contre-performances, et pire encore, jusqu'à présent, certains ne croient pas à l'existence de cette maladie » a poursuivi le gouverneur pour qui, « c’est ce qui nous a amené à cette situation catastrophique ».
Renforcement des mesures de lutte
Après avoir remercié les équipes sanitaires pour le travail qu’ils abattent au quotidien afin de donner le nombre des cas réels de la maladie, le gouverneur a annoncé de nouvelles mesures qui seront applicables avec un suivi régulier. Selon les explications du premier responsable de la région, un arrêté a été d'ores et déjà pris portant port obligatoire des masques pour tout agent de l'État et tout usager des services publics et privés. Il a été aussi demandé aux directeurs des services de veiller à ce que ces mesures soient appliquées partout et, afin d’en assurer l’effectivité, des visites inopinées seront effectuées dans les services concernés. Dans la même lancée, ces mesures concerneront également les marchés, les autogares ainsi que les banques et autres lieux publics.
Sur la situation qui prévaut dans la région et particulièrement dans la ville, le gouverneur a annoncé qu’il a été demandé à l'Université de Zinder d’enquêter sur les raisons du refus d'acceptation de la maladie par la population. « Des séances de sensibilisation vont continuer tout en accélérant l'arrivée des bavettes du ministère de la Santé » a promis le gouverneur Issa Moussa qui a lancé un appel pour qu’on cesse aussi de diaboliser cette maladie afin de permettre à la population de fréquenter les centres. En terminant son intervention, le gouverneur de Zinder n’a pas manqué d’appeler au sens de responsabilité des uns et des autres pour que soient bannis, les comportements pouvant contribuer à la propagation du Covid-19.
Le président du Conseil de ville de Zinder, Bachir Sabo, a également abondé dans le même sens en rappelant à l'assistance, tous les efforts déployés par la mairie centrale depuis le début de la pandémie à ce jour. Des efforts qui ont permis de doter les services rattachés, les marchés, les autogares et autres lieux publics en dispositifs de lavage des mains. Il a aussi fait cas de la campagne de communication de masse à travers les médias de la place qui a été déployé pour sensibiliser la population. Poursuivant son intervention, le maire Bachir Sabo a par la suite saisi l’occasion pour proposer des pistes de solution pour freiner la propagation de la maladie, tout en reconnaissant que « pour le moment, les mesures contraignantes ne sont pas les bienvenues pendant cette période de Ramadan ». Il a insisté sur l’importance d’accélérer l’acheminement des bavettes subventionnées par l’Etat afin que la population puisse en bénéficier dans les meilleurs délais. Enfin, le maire Bachir Sabo a proposé « d’exposer le nombre des décès lié au Corona pour que la population prenne conscience de cet état de fait », tout en promettant que la ville va continuer la sensibilisation.
En prenant la parole, le Directeur régional de la santé publique de Zinder (DRSP) Dr Abou Yahaya a fait le point de la maladie à la date du Mercredi 06 mai 2020 : 47 cas positifs ont été enregistrés dont 15 guéris et 4 décès. Selon le DRSP, les référents ainsi que les leaders politiques et religieux doivent multiplier les messages de sensibilisation à travers les médias afin d’atteindre la population. Quant au Président du Conseil Régional, Moutari Ousmane, il a indiqué qu’un véritable travail a été effectué et les chiffres sont réels. « Les gens doivent comprendre que nous avons deux sources de provenance des cas: le Nigéria et la capitale Niamey » a souligné le président du Conseil régional qui a plaidé pour « relativiser les choses » pour répondre efficacement avec des moyens afin de sensibiliser la population et les amener à adhérer au combat contre le Covid-19. Dans ce cadre, le Conseil Régional a dégagé une somme de 40 millions FCFA comme contribution dans la lutte et a émis le souhait que les bavettes soient mises à la disposition des populations dans les zones rurales.
Pour sa part, le Directeur général de l’Hôpital national de Zinder (HNZ), Dr Moussa Habibou Oumani, il a fait savoir que dans les 47 cas enregistrés, 9 sont des agents de santé. Ce qui est inquiétant, selon lui car plusieurs personnes pourraient être contaminées après contact avec ces agents atteints. Il a aussi évoqué le déficit de restitution des mesures prises ainsi que de l'évaluation de l'application de ces mesures. « Le combat est de deux formes », a-t-il poursuivi, citant notamment les moyens qui font aussi défaut pour la prise en charge sanitaire des cas. A titre illustratif, la réanimation d'un patient coûte 25000F CFA par bouteille d'oxygène et il faut 3 combinaisons pour les malades atteints. Selon les explications du DG de l’HNZ, la région doit aussi s’atteler à renforcer l’approvisionnement de la population en bavette pour au moins 20% des citoyens et les contraindre à les porter. La ville de Zinder à elle seule enregistre en effet 43 cas parmi les 47, « ce qui suppose une circulation rapide de ce virus, d'où la nécessité de la poursuite de la sensibilisation » selon Dr Moussa Habibou Oumani.