La pandémie la plus médiatisée de tous les temps, le Coronavirus ou COVID-19, qui est d’ailleurs très loin d’être la plus meurtrière, a développé une peur, une angoisse exagérée dans le monde entier. Les raisons avancées seraient le fait qu’il n’existe pas encore de traitement ni de vaccin, ni de prise en charge médicale rapide pour contenir le COVID-19 et que la maladie se propagerait à une vitesse exponentielle et ferait des millions morts. Les pays occidentaux, fortement secoués après la Chine, et qui continuent de dicter la loi dans le monde, vont alors prendre des mesures draconiennes de prévention en vue de ralentir la propagation de la maladie, dans l’attente de trouver des traitements thérapeutiques ou vaccins pour sauver des vies humaines.
Au Niger, dix premières mesures d'urgence sont prises à l’issue du Conseil des Ministres du vendredi 13 mars, et des mesures complémentaires le 17 mars 2020.
Les mesures phares consistaient en la fermeture des établissements scolaires et universitaires, la fermeture des frontières terrestres et des aéroports, la fermeture des bars, des boites de nuit, salles de cinéma et des lieux de spectacle, l’interdiction des rassemblements de plus de 50 personnes, l’institution des mesures d’hygiène obligatoires, le respect d’une distance d’au moins un mètre entre les personnes qui parlent ou travaillent ensemble, la fermeture des lieux de culte et enfin l’instauration d’un couvre-feu et le confinement de Niamey. L’observance de ces mesures serait déjà un grand pas pour gagner la bataille contre le Covid-19 en limitant et en freinant la propagation.
Chemin faisant et compte tenu de « l’amélioration de la situation de la pandémie du COVID-19 » le gouvernement desserre l’étau avec plusieurs mesures d’assouplissement :
- le 11 mai 2020, Le Ministre de l’enseignement supérieur Mr YAHOUZA SADISSOU coordinateur des ministères en charge de l’éducation nationale confirme la reprise des cours dans les établissements scolaires à compter du 1 er juin ;
-le 13 mai le ministre ZAKARIA ABDOURAHAMANE, porte-parole du gouvernement annonce la réouverture des lieux de culte et la levée du couvre-feu à Niamey ;
- le 15 mai, le conseil des ministres a levé l’isolement de la ville Niamey et conséquemment la libération des activités de transport interurbain de passagers.
Toutefois, le gouvernement précise qu’en cas de détérioration de la situation en lien avec la réouverture des lieux de culte, il se réserve le droit de reconsidérer cette décision.
Ainsi, il est évident que la maladie est mieux connue et que le plan de riposte est bien opérationnel mais pour autant la situation n’est pas maitrisée et la prudence doit être toujours de mise.
On peut se féliciter du dynamisme et du courage avec lesquels le gouvernement gère la situation, ainsi que de la réouverture envisagée pour le 1er juin des établissements scolaires et universitaires, mais cela doit se faire dans le respect strict du protocole sanitaire et donc des mesures barrières mises en place par le gouvernement lui-même.
Pour éviter la contamination, les actions quotidiennes à respecter par tous sont le lavage régulier des mains à l’eau et au savon ou au gel hydro-alcoolique, le port obligatoire du masque, tousser ou éternuer dans son coude ou dans un mouchoir jetable, la distanciation physique d’au moins un mètre dans tous les établissements (arrivée et sortie, cour de l’école, couloirs, salle de classe...).
Ces gestes barrières doivent être obligatoirement appliqués en permanence, et par tous les élèves et enseignants, que ce soit à l'école ou à la maison. En conséquence, le retour à l’école pour l’ensemble des apprenants comporte énormément de risques car les dimensions et effectifs de nos classes ne permettent pas de respecter la distanciation sociale d'au moins un mètre entre les élèves. Dans ces conditions même si ces derniers porterons chacun son masque, le risque de contamination reste réel. Le virus est toujours là et il faut être très prudent.
Dans ces conditions, ce qui nous semble être dans la logique et le bon sens est une reprise des cours qui ne concerne pas l’ensemble des apprenants et s’il faut faire un choix, c’est évidemment les élèves en classe d’examen qui devraient reprendre le chemin des classes le 1er juin. Dans nos écoles, notamment dans tous les grands centres, il y a des classes pléthoriques, où les effectifs d’élèves par classe sont nettement au-delà des normes, dans le public et surtout dans le privé. Ces classes d’examen doivent donc être éclatées selon la taille et la nature de la classe en raison de 20 à 30 élèves au maximum dans le but se respecter la distanciation sociale d'au moins un mètre et d’avoir des effectifs réduits pour progresser plus rapidement et faire les rattrapages nécessaires. Il va sans dire que cette situation nécessitera plus de classes et d’enseignants, et conséquemment il faut libérer les élèves des autres niveaux. Les élèves des classes d’examen seront alors pris en charge par l’ensemble des enseignants de leurs établissements. Les enseignants prépareront les cours en UP afin de faciliter la tâche à ceux qui n’ont pas l’habitude d’enseigner dans les classes d’examen et qui se verraient alors confier des classes pour l’occasion. Ce serait d’ailleurs très difficile, sinon impossible de pouvoir achever le programme en un mois et demi, dans les établissements n’ayant réalisé que 50% du travail annuel, de la rentrée de septembre ou d’octobre à la veille des congés de mars, (soit en une période d’environ six mois de cours), moment où est intervenue la fermeture des établissements scolaires et universitaires, suite à la pandémie du coronavirus.
Aussi pour la période de reprise, fixée du 1er juin au 15 juillet 2020, on pourrait augmenter une heure de cours supplémentaire par jour, soit de 8h à 14 h et ne pas observer la récréation, pour disposer de plus de temps. Il faut éviter tout rassemblement dans la cour de l’école, donc pas de récréation, les élèves resteront dans leurs différentes salles mais pourront observer des pauses de 5 minutes après chaque heure de cours ou 10 minutes après un cours de 2h d’affilé.
Pour les élèves des classes intermédiaires, il faut tout simplement valider l’année en assouplissant exceptionnellement les conditions de passages, redoublement et exclusion. Pour l’enseignement secondaire et professionnel, on pourrait additionner la moyenne de la composition du premier semestre et la moyenne des notes de classe du second semestre, diviser par deux pour déterminer la moyenne annuelle. On pourrait considérer toute moyenne strictement inférieure à 6 (˂6) pour l’exclusion, toute moyenne supérieure ou égale à 6 mais strictement inférieure à 8,5 (6≤M˂8,5) pour le redoublement et toute moyenne supérieure ou égale à 8,5 (M ≥ 8,5) pour le passage. Ainsi, il faut consacrer un mois et demi de cours de rattrapage , dès la rentrée prochaine pour les élèves de ces classes intermédiaires qui passeraient en classes supérieures en vue d’achever le programme de l’année précédente, avant d’entamer le programme de la nouvelle année de promotion.
Pour l’enseignement supérieur et les grandes écoles, il faut oublier le découpage des cours en semestres et privilégier les contenus, compétences, les stages et travaux pratiques, les soutenances pour faire le maximum de travail, avant la prochaine rentrée.
L’école ne laisse personne indifférent et le développement de tout pays passe nécessairement par une politique éducative transparente et consensuelle. La relance de l’école nigérienne nécessite au moins deux points fondamentaux : la recréation d’un cadre de concertation dynamique de l’école et la mise en place d’un fonds spécial de l’éducation.
Moustapha Liman Tinguiri Planificateur de l’Éducation à Zinder