Assemblé nationale : L’opposition parlementaire boycotte l’examen du projet de loi portant sur l’interception de certaines communications par voie électronique au Niger
Prévu pour être examiné en séance plénière de l'Assemblée nationale le 19 mai 2020, le controversé projet de loi sur l'interception de certaines communications par voie électronique au Niger, décrié par bien de nigériens, l'a finalement été le vendredi 29 mai 2020. Mais, sans les députés de l'opposition parlementaire qui, après une brève communication que le président de l'institution a tout fait pour contrer, y compris en coupant les micros, s'est retirée dans la salle de la Commission Affaires économique et Plan, pour un point de presse, devant les journalistes. Pour les députés de l'opposition, le pouvoir en place, en soumettant ce projet de loi que " sa majorité godillot " ne va pas hésiter à adopter, veut " priver les nigériens et ceux qui vivent au Niger de toute vie privée dans leurs communication ". Bien que reconnaissant la nécessité d'établir des lois pour organiser la société humaine, les députés de l'opposition s'interrogent sur l'opportunité d'une telle loi à quelques mois de la fin du dernier mandat de la législature, et à la veille d'une période électorale. C'est tout simplement suspect. Car si c'est pour lutter contre le terrorisme et renforcer la cohésion nationale, il y a déjà une batterie de lois, prévues par le code de procédure pénale, qu'il suffit tout simplement d'appliquer. Tout le monde sait l'utilisation détournée que le pouvoir en place fait de la récente loi sur la cybercriminalité. Pour la moindre publication, pour peu qu'elle soit critique envers le gouvernement, les internautes sont harcelés et interpellés par les services de police sur ordre. Pendant que d'autres nigériens sont autorisés à diffamer, insulter, par la voie des mêmes canaux, sans être nullement inquiétés. C'est cet usage ciblé qu'Amnesty international a dénoncé récemment. Cette loi sur la cybercriminalité est tout simple ment un instrument de répression contre les voies discordantes, aux yeux d'Amnesty. La sécurité, l'unité nationale et la lutte antiterroriste ne sont que de fallacieux prétextes avancés par le gouvernement pour faire adopter une loi liberticide, une loi qui annonce l'instauration d'un régime qui viole allégrement la vie privée des citoyens. Le ministre de la justice l'a annoncé, les nigériens étaient déjà sur écoute, donc illégalement. Dans la composition de la Commission nationale de contrôle des interceptions, il n'y a que le président de la République et ceux à qui il délègue ses pouvoirs ou désigne. Que l'exécutif (article 16). La lutte contre le terrorisme n'est qu'un prétexte pour filer les citoyens, même ceux sur qui ne pèse aucune présomption. Au demeurant l'on sait où se trouvent les terroristes. Les terroristes ne se cachent pas, ils se déplacent en colonnes de dizaines le plus souvent, au vu et a su de tout le monde. Il y a des zones où ils lèvent l'impôt et prélèvent les taxes. Il suffit de les trouver et les mettre hors d'état de nuire là où ils sont.
La lutte contre le terrorisme, ne peut réussir selon les députés de l'opposition que si les trafiquants de drogue et d'armes, dont certains sont connus de tous, sont mis à la disposition de la justice. Car " les sources de financement du terrorisme sont, en grande partie, le trafic de drogue et d'armes ". Il faut également doter les forces de défense et de sécurité de moyens. Et surtout rendre justice aux centaines de militaires massacrés par les terroristes et au peuple nigérien en sanctionnant, conformément aux lois et règlements de la République " ceux dont les actes prédateurs et ignobles ont occasionné les massacres de Karamga, Bosso, Inatès et Chinagoder, entre autres ". Et au président du groupe parlementaire de donner la vision du Niger que souhaitent tous les citoyens nigériens, épris de paix et de justice. Un Niger paisible, où l'Etat de droit et la démocratie sont une réalité vivante et vécue. Un Niger où la liberté et la sécurité sont toutes deux garanties par l'Etat. Pour les députés de l'opposition, le caractère inviolable de la correspondance est sacré, conformément à l'article 29 de la Constitution qui stipule que " le secret de la correspondance est inviolable ".
C'est pourquoi " l'opposition parlementaire, fidèle à son rôle républicain, ne saurait s'associer à une telle mascarade qui consiste à adopter une loi simple pour violer la loi fondamentale ". Il faut relever que lors de l'examen de ce projet de loi en plénière, l'ensemble des députés ont été invités à l'hémicycle, pour que le pouvoir puisse s'assurer qu'il sera favorablement voté. La mesure interdisant le rassemblement de plus de 50 personnes, parmi tant d'autres, a été levée la veille. Avec la formule des 45 députés (36 pour la majorité, 9 pour l'opposition) avec chacun une procuration, les 18 voix de l'opposition constituent une minorité de blocage.
Le projet de loi ne passerait alors pas. C'est pourquoi son examen a été reporté le 19 mai, date à laquelle il devrait initialement être examiné. Et non pas à cause du décès d'un député, selon certains observateurs. De la même manière, le retour de tous les députés à l'hémicycle permettra le lundi 8 juin 2020, l'adoption du projet de loi de finance rectificative, avec une majorité probablement confortable, " godillot " selon les termes de l'opposition parlementaire. Ceci explique-t-il cela ?