Fichier biométrique électoral : en attendant l’improbable enrôlement de la diaspora, un consensus politique est nécessaire pour éviter un éventuel blocage
L’enrôlement biométrique des nigériens a pris fin, en principe, depuis le lundi 8 juin 2020 pour les électeurs de l’intérieur. Il ne reste plus que celui des nigériens de l’extérieur qui aurait dû également prendre fin depuis quelques semaines. Sauf que la pandémie du Covid-19 est passée par là et en attendant la réouverture des frontières et la reprise des vols, il va falloir trouver une solution politique afin que le fichier électoral biométrique soit prêt à temps pour les prochaines échéances électorales.
C’est la grande équation électorale du moment : les nigériens de l’extérieur auront-ils l’occasion de s’enrôler à temps pour la confection du fichier électoral biométrique qui doit être disponible en septembre prochain en prélude aux prochaines échéances électorales qui débuteront avec les locales prévues le 1er novembre 2020? A priori, la réponse est non car le recensement de la diaspora devrait en principe débuter 1er février et finir le 30 avril 2020 selon le chronogramme initial de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Sauf qu’entre temps, la pandémie du Covid-19 a imposé la fermeture des frontières aériennes et terrestres ainsi que la suspension des vols. Dans beaucoup de pays, le confinement est toujours de mise de même que les restrictions en matière pour ce qui des déplacements notamment entre les villes.
Bien que depuis quelques temps, les mesures restrictives commencent à s’alléger dans certains pays, il est fort improbable que d’ici le mois prochain, toutes les frontières soient ré-ouvertes et que les dessertes aériennes redeviennent à la normale. En un mot comme en mille, l’enrôlement des nigériens de la diaspora reste pour le moment en suspens et il va falloir trouver une solution pour cette équation à multiples inconnues. En dépit de la bonne foi dont fait montre, malgré les doutes de l’opposition, la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le problème la dépasse et si solution il y a, elle doit se trouver normalement dans les mains des partis politiques. Le hic, encore à ce niveau, c’est que le dialogue politique qui aurait pu permettre de parvenir à une solution consensuelle est depuis belle lurette en panne, ce qui n’arrange pas les choses.
Rapport des forces
Il va falloir pourtant, particulièrement pour la classe politique, arrêter de se voiler la face. Cette situation induite par un facteur qu’on peut qualifier d’exogène à la préparation du processus électoral, est un sérieux obstacle qui risque d’avoir de fâcheuses répercussions sur l’agenda des prochaines élections. A l’allure où vont les choses, le statu quo ne peut plus perdurer et le contexte impose de réfléchir aux alternatives les plus plausibles qui permettront de sauver un processus qui bute encore à plusieurs autres difficultés, en particulier, le risque sécuritaire. Le pouvoir en place, tout comme la CENI d’ailleurs, continue de soutenir mordicus que les élections se tiendront aux dates prévues. De son coté, l’opposition continue son boycott de la CENI avec des inquiétudes, pour ne pas dire des certitudes, que le processus électoral est irrégulier et qu’il va forcément finir par s’enrayer. C’est le cas de le dire, chaque partie espère tourner le rapport des forces en sa faveur pour espérer le tirer le plus grand profit du processus en cours. C’est pourtant une pure illusion que de continuer à s’arc-bouter sur ces postures qui risqueront de n’arranger au final mais qui auront forcément des conséquences fâcheuses sur le déroulement des prochains scrutins. A juste titre, le président de la CENI, Me Issaka Sounna est particulièrement interpellé au regard du contexte actuel et des perspectives : il doit impérativement sortir publiquement expliquer la situation et ainsi renvoyer la balle dans le camp des partis politiques pour que tout le monde puisse s’assumer. Déjà que le chronogramme initiale de l’institution accuse un sérieux retard, le temps n’est plus aux salmigondis et autres appels de pieds voilés.
A quelques mois des premières élections, les locales qui donneront le top départ des élections générales, il y a urgence en la matière. Pour l’heure, on ne peut que spéculer sur à qui, des deux cotés, profitera le blocage. Ce qui est certain, c’est que le pays en sortira grandement perdant d’une éventuelle crise pré ou postélectorale. D’autant qu’au stade actuel, elle peut encore être évitée à condition que du coté du pouvoir comme de l’opposition, l’intérêt de la nation soit mis au devant de toute considération partisane. C’est connu d’avance, ce n’est pas la tasse de thé de notre classe politique mais après toutes ces années d’expérience démocratique sans lendemains, il est temps pour cette dernière de faire son baroud d’honneur en évitant au pays un saut dans l’inconnu ou tout au moins un nouveau retour en arrière. Simple avis !