Le Président de la République Issoufou Mahamadou a procédé, lundi 27 juin 2020 dans la soirée, à un léger réaménagement technique du gouvernement de Brigi Rafini. Deux ministres ont ainsi quitté l’équipe, deux autres ont fait leur entrée et le reste a consisté en un jeu de chaises musicales avec deux ministres qui montent en grade.
Le départ du gouvernement de Bazoum Mohamed, ministre d’Etat en charge de l’Intérieur, de la sécurité publique, de la décentralisation et des affaires religieuses, est sans doute le fait saillant de ce réaménagement technique annoncé depuis des mois et attendu du reste après la disparition du ministre Ben Omar. Le président et candidat du PNDS Tarayya pour les prochaines élections présidentielles s’est ainsi déchargé de ses missions gouvernementales, pour se consacrer à sa campagne électorale « sur le terrain », selon les membres de son parti. L’occasion aussi pour Mohamed Bazoum de satisfaire à une revendication sans cesse réitérée par certains opposants et même des acteurs de la société civile pour qui, en restant à la tête de l’Intérieur, il est « juge et partie » dans le processus électoral. C’est « la mère des ministères », l’Intérieur, qui assure en effet la tutelle des partis politiques, et de ce fait, le ministre a une main ne serait-ce qu’indirectement, dans l’organisation des élections.
Le candidat Bazoum quitte le gouvernement mais laisse son portefeuille à un autre poids lourd du parti au pouvoir, Alkaché Alhada, qui était jusque-là son ministre délégué, et qui monte donc en grade même s’il n’est pas ministre d’Etat. Docteur en droit public de son état, le nouveau ministre de l’Intérieur est passé par le cabinet du président Issoufou comme directeur adjoint durant le premier mandat. Il a rejoint le ministère de l’Intérieur comme délégué à la Sécurité publique lors du remaniement ministériel du 20 septembre 2019, après un passage à la Cour d’Etat comme premier Président, de 2016 à 2019. Juriste, membre du PNDS Tarayya et déjà dans la « Maison », il va assurer la continuité et surtout veiller à gérer cette période délicate des élections qui s’annonce assez lourdes de risques au vu des forces en présence et des enjeux politiques.
Autre ministre qui monte en grande, c’est Mohamed Boucha. Celui qui était jusque-là ministre délégué auprès du ministre d’Etat en charge de l’Agriculture et de l’Elevage, a été nommé ministre de l’Emploi, du Travail et de la Protection Sociale. Il remplace le défunt Mohamed Ben Omar, décédé le 3 mai dernier. Arrivé au gouvernement sur la liste du MPR Jamhuriya, il a rejoint dernièrement le RPP Farilla, un parti nouvellement créé par des dissidents en guerre contre le président de son ancien parti, Albadé Abouba, qui n’est autre que son ministre de tutelle au département de l’Agriculture et de l’Elevage ! La cohabitation entre le ministre d’Etat et son ministre délégué n’étant visiblement plus possible, le régime a trouvé comme d’habitude la parade avec ce départ pour un autre portefeuille « coquille pleine ». Avant d’être ministre délégué à l’Elevage depuis 2016, Mohamed Boucha a été en effet ministre délégué au Budget, de 2013 à 2016.
Le réaménagement technique s’est aussi traduit par un jeu de chaises musicales avec Amina Moumouni, du PNDS Tarrayya, qui était en poste à l’Energie, qui a permuté son maroquin avec Amadou Aissata, du PPN RDA, au ministère de la Population. Au passage, il faut noter que c’est la seconde fois que la ministre Amadou Aissata échange son portefeuille avec un autre ministre sous ce second mandat de la Renaissance.
Nommé ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative en 2016, elle a échangé son portefeuille, lors du remaniement du 30 octobre 2017, avec Kaffa Rakiétou Christelle Jackou qui était alors la ministre de la population, suite à l’éclatement de « l’Affaire du projet SWEED ».
Deux nouveaux ministres font leur entrée dans le nouveau gouvernement. Il s’agit de Boureima Souleymane qui remplace Issifi Sadou Ibrahim, de l’ANDP Zaman Lahiya, au poste de ministre de l’Entrepreneuriat des Jeunes.
Le second entrant est Ali Gonki, du PSD Bassira. Inspecteur pédagogique de son état, cet ancien SGA de la région de Diffa, a été nommé ministre délégué à l’Elevage où il prend la place de Mohamed Boucha. Le PSD Bassira perd un peu au change puisqu’il détenait jusque-là un portefeuille plein et se retrouve actuellement avec un maroquin de ministre délégué, à quelques mois des élections.
Au sortir de ce nouveau réaménagement technique, pas de grand changement donc comme l’attendait une large frange de l’opinion qui s’attendait à un dégraissage d’une équipe plus que pléthorique. Il va falloir certainement attendre les derniers jours précédant l’ouverture de la campagne électorale pour les présidentielles et les législatives et ainsi voir les ministres qui se présenteront à la magistrature suprême ou qui brigueront un siège à l’Assemblée nationale, quitter le navire. A moins d’un bouleversement politique d’ici là, ce qui est loin d’être exclu en période pré-électorale.