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Interview de M. KALLA Ankaraou, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération, de l’Intégration Africaine et des Nigériens à l’Extérieur, à l’occasion de la Présidence du Niger au Conseil de Sécurité : «Le Président de la République présidera par visioconférence une Session du Conseil de Sécurité sur la gouvernance politique et économique mondiale post covid-19 »

Publié le lundi 7 septembre 2020  |  Le Sahel
Cinquantenaire
© Autre presse par DR
Cinquantenaire de la francophonie : les festivités réduites à cause du coronavirus (Ministre nigérien) Kalla Ankaraou
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Le Niger préside le Conseil de Sécurité de l’ONU depuis le début de ce mois de septembre : Quels sont les grands dossiers africains qui seront traités sous cette présidence ?

Les crises qui secouent le continent africain sont nombreuses et variées. Vous avez entre autres, la crise sécuritaire au Sahel avec la situation au Mali, les conflits en Libye, en République Démocratique du Congo, en Somalie, au Soudan entrainant les crises les crises humanitaires et migratoires qu’il faut gérer.

Il convient de noter que parmi les dossiers africains, qui seront examinés lors de la présidence figure la situation en Libye. Il s’agit d’une question qui mérite toute l’attention du Niger pour diverses raisons. La Libye est un pays frontalier de notre pays et sa déstabilisation a porté un coup dur à tout le reste de la région. La circulation des armes en Libye est une menace pour la Libye, la sous-région. Il faut le souligner, il y a une importante quantité d’armes dans les mains des civils. C’est pourquoi le Conseil de Sécurité par sa Résolution 1970 (2011) a jugé nécessaire de mettre un régime de sanctions en Libye qui se traduit par un embargo sur les armes, le gel des avoirs de certains hauts responsables et une interdiction de voyager pour des personnes listées.

A ce dossier, s’ajoute la question de la MINUSMA, qui fera l’objet d’un rapport général que présentera le Secrétariat Général des Nations Unies. Une occasion qui nous permettra de mesurer les améliorations intervenues depuis le renouvèlement de son mandat en juin dernier, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger par les parties prenantes, la stratégie de stabilisation du centre du Mali dans un cadre global afin de protéger les civils, la réduction des violences intercommunautaires et le rétablissement de la présence de l’État, ainsi que des services sociaux de base dans tout le pays. Le coup d’État intervenu le 18 aout dernier dans ce pays complexifie davantage une situation fortement dégradée. Cette nouvelle donne a déjà fait l’objet d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité.

Le dossier de la migration est une question qui concerne tous les pays africains et sera abordé sous l’angle du trafic illicite des migrants. Un phénomène qui constitue une vraie préoccupation pour les pays africains, dont les femmes et les enfants sont les victimes les plus touchées par les réseaux du crime international organisé. Notre pays qui dispose depuis cinq (05) ans d’une législation incriminant le trafic illicite des migrants et dont l’application donne des résultats probants. Le Niger a opté pour jouer un rôle de premier plan dans le traitement de cette thématique au niveau international. C’est pourquoi, nous avons fait un débat sur cette question.

Pour conclure sur ce point, je voudrais mentionner deux dossiers qui sont prévus à l’occasion de cette présidence et qui concernent l’Afrique. Il s’agit notamment du rôle de l’Organisation Internationale de la Francophonie dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité et la 14ème consultation entre le Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies et le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine.

Le poids de l’Afrique est important à l’Organisation Internationale de la Francophonie. Par ailleurs, cette institution en sus de formations qu’elle organise dans divers secteurs ayant un lien avec la paix et la sécurité en faveur de différents acteurs y compris les forces de défense et de sécurité, joue un rôle important dans le processus électoral en Afrique à travers son apport technique aux États, et en anticipant sur les contentieux électoraux.

Enfin, la 14ème consultation entre le Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies et le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine est un moment de concertation, de coordination et d’harmonisation entre les deux instances sur les crises et conflits qui assaillent le continent africain et le monde. Notre pays ne peut que saluer cette initiative dont l’objectif est de trouver des solutions communes aux crises africaines.

Par ailleurs, au-delà, des dossiers africains, les questions qui font l’objet de préoccupation pourraient revenir sous la présidence du Niger, à l’instar du Nucléaire iranien, du Jammu et Cachemire, de la Syrie, de la Palestine, pour ne citer que ces dossiers brûlants.



En dehors des activités prévues à New York, avez-vous envisagé d’autres activités au plan national ici à Niamey pour marquer l’évènement ?

En raison des mesures de restriction de séjour édictées par les autorités américaines du fait de la pandémie du Covid 19, le Niger présidera le Conseil de Sécurité de l’ONU à partir de Niamey. Le Président de la République présidera par visioconférence une Session du Conseil de Sécurité sur la gouvernance politique et économique mondiale post covid-19.

A l’exception des interventions in situ qui seront faites par notre Mission permanente à New York, j’animerai moi-même l’essentiel des activités à partir de Niamey avec le concours de la Cellule centrale d’Appui mise en place par le Gouvernement, sur instruction du Président de la République, pour apporter l’expertise et l’expérience dans le cadre de l’exercice de ce prestigieux mandat du Niger. Nous avons mis en place les moyens conséquents pour mener à bien ces activités à distance dans les meilleures conditions techniques possibles. Je dois d’ailleurs saluer la compétence marquée et la disponibilité de l’Agence Nationale sur la Société de l’Information (ANSI) qui nous accompagne dans ce travail.



Au titre des activités prévues à Niamey, une exposition, consacrée au Système des Nations Unies et au maintien de la paix et de la sécurité internationales, sera organisée et s’étalera sur une période allant de 7 à 10 jours. Cette exposition permettra au grand public, plus particulièrement les élèves et les étudiants, de découvrir le Système des Nations Unies et la contribution de notre pays à l’accomplissement de ces missions.

En outre, deux conférences seront animées par des chercheurs, des diplomates et des fonctionnaires internationaux sur l’Agenda du Niger au Conseil de Sécurité et le rôle éminent joué par notre pays dans le domaine des opérations de maintien de la paix à l’échelle internationale.



Par ces conférences, mon ambition est d’informer et sensibiliser nos compatriotes et nos partenaires installés au Niger sur la politique étrangère de notre pays, notamment ses efforts soutenus en faveur de la paix et de la sécurité internationales.



En plus de la menace sécuritaire, le Niger à l’instar des autres pays du monde fait face à la pandémie du Covid-19 : comment le gouvernement gère-il cette menace ?

Vous le savez, la pandémie du COVID-19 a surpris le monde entier : d’abord par son apparition soudaine dans les conditions qui sont connues et ensuite par sa contagiosité élevée. L’absence de thérapeutique efficace et de traitement préventif a complétement désarmé les systèmes sanitaires les plus performants du monde.

En outre, la COVID-19 intervient pour nous dans un contexte marqué par l’insécurité au Sahel, aggravant de fait la situation de précarité qui prévaut déjà et sapant les efforts déployés par nos pays pour rétablir la paix et la sécurité internationales. Force est donc de reconnaitre que la COVID-19 a eu des impacts négatifs indiscutables sur nos capacités d’action et de ripostes appropriées. Ainsi, en plus du défi sécuritaire s’ajoute un défi sanitaire redoutable qui compromet notre système de santé déjà fragile et notre économie largement éprouvée par la restriction et le ralentissement des activités économiques et du tourisme.

Face à une telle situation, des États comme le nôtre n’ont vraiment pas le choix. Ils doivent en toute urgence prendre les mesures préventives qui s’imposent. C’est ainsi que, dès les premières semaines consécutives à l’apparition de la pandémie, le Président de la République, SEM Issoufou Mahamadou, s’est adressé à la Nation pour annoncer les décisions qui sont prises en conséquence.

Sur la base d’un plan audacieux de riposte, le Gouvernement a également pris des mesures d’atténuation des impacts socioéconomiques, notamment le règlement total ou partiel des factures d’eau et l’électricité pour les couches les plus vulnérables, l’exonération des taxes à l’exonération des produits de premières nécessités, la mise en place d’un fonds de solidarité, l’appui aux PME à travers des lignes de crédits.

La conjugaison des efforts du gouvernement et de ceux des partenaires a donné le résultat que nous connaissons aujourd’hui, qui fait que le Niger est reconnu comme l’un des pays africains qui gère la situation de façon satisfaisante. Malgré ces résultats encourageants, nous restons très vigilants.



Monsieur le Ministre, le Niger vient d’être déclaré zone rouge par la France à la suite de l’attaque terroriste de Kouré où six humanitaires français et deux nigériens ont perdu la vie. Quelles appréciations faites-vous de cette situation ?

A la suite du message ému de condoléances du Président de la République à son homologue, à la nation française et aux familles des victimes, votre question me donne l’occasion de réitérer à mon tour la très forte solidarité du Niger envers la France et envers toutes les victimes du terrorisme. Ce sont de jeunes gens talentueux, des humanitaires engagés pour le bien des communautés les plus vulnérables que la France, le Niger et le monde entier honorent. Leur noble mission d’aider et de servir partout dans le monde est un exemple de courage et de don de soi. Nous ne les oublierons jamais!

Nous réaffirmons notre condamnation de cet acte odieux qui relève d’un terrorisme qui a pris pied au sahel et gagné les frontières du Niger, en dépit des efforts fournis par le gouvernement, les forces de Défense et de Sécurité et l’appui constant et précieux de la communauté internationale, en particulier la France.

Cependant, nous avons été amenés à relever, avec étonnement, en ce moment de chagrin et de consternation, que le Niger dans son ensemble vit depuis la survenue de ce crime ignoble, la publication, par le centre de crise de Quai d’Orsay, d’une carte du Niger peinte en rouge, avec des indications, signalant un danger global et une interdiction à l’attention des ressortissants français, mais aussi et malheureusement au-delà, du monde entier.

Nous respectons le droit du gouvernement français de prendre les mesures qu’il juge appropriées pour assurer la sécurité de ses citoyens ; mais dans la mesure où le risque zéro n’existe pour aucun pays, nous estimons que peindre nos pays en rouge n’est pas la solution. Le Niger regrette une telle décision, ce d’autant plus que cette stigmatisation ne correspond nullement à la réalité sécuritaire dans plusieurs régions de notre pays aujourd’hui. En effet, il faut le reconnaitre, le Niger n’a pas connu d’attaque de cette nature depuis fort longtemps.

Notre action commune face à ce drame devrait plutôt reposer sur la solidarité et la coopération. Si la mise en zone rouge de notre pays devrait perdurer, cela risque de compromettre tous les efforts du gouvernement nigérien de lutte contre la pauvreté, avec un arrêt des investissements, une disparition du tourisme et un ralentissement de la circulation des capitaux. Bien sûr notre pays poursuit avec détermination ses efforts pour assurer la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire.

Je voudrais donc marquer notre désapprobation par rapport à cette décision unilatérale qui a une incidence négative sur l’image du Niger et sur la relation qu’il développe avec le reste du monde.
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